vendredi 16 décembre 2005

Question orale de Jean-Luc CRUCKE au Ministre André ANTOINE sur "les présomptions de corruption dans l'attribution de la Coupe du Monde de Football"

M. Jean-Luc Crucke (MR). – Monsieur le ministre, je ne reviendrai pas sur le fait que nous n’ayons pas été sélectionnés pour l’organisation du Mondial de football car une des leçons du sport est qu’il faut savoir perdre. En revanche, je souhaite faire référence à la déclaration suivante de M. Stéphane Pauwels quelques heures après l’attribution : « Je savais depuis deux mois que la Russie serait retenue et l’enveloppe était conséquente. » Des amis libéraux hollandais, flamands et anglais ont également émis ce genre de doutes. Votre homologue néerlandaise a d’ailleurs mis ce point à l’ordre du jour d’une réunion des ministres des sports. Il sera demandé à la Fifa qu’un groupe indépendant d’experts, juristes et proches du sport, se réunissent afin de mener une enquête sur ces présomptions de corruption. Si ces démarches ne changeront en rien la décision de la Fifa, elles permettront néanmoins d’éviter ce genre de suspicion à l’avenir. Rappelons que les montants non négligeables engagés par la Communauté française sont de l’ordre de 600 000 euros. Comptez-vous vous associer à l’action de votre homologue néerlandaise ? Pour ceux qui ignorent le contexte, notons que le Qatar a été soutenu par quelques personnalités françaises, dont M. Zidane. Ce dernier a reconnu avoir reçu un montant équivalent à ce que la Belgique tout entière a déboursé pour soutenir la candidature belge, à savoir dix millions d’euros. C’est pourquoi je vous demande de bien vouloir soutenir les projets d’enquête.

M. André Antoine, vice-président et ministre du Budget, des Finances et des Sports. – Nous sommes bien sûr déçus que les candidatures belge et hollandaise n’aient pas été retenues et nous saluons d’ailleurs tout le travail accompli par le comité organisateur présidé par M. Alain Courtois et plus largement par les deux ministres belges qui se sont succédé, MM. Herman Van Rompuy et Yves Leterme. Le travail des gouvernements, des majorités et des oppositions, a permis de présenter une candidature convaincante et parfaitement conforme au cahier des charges. Nous savons aujourd’hui ce qu’il en est de la désignation curieuse de la Russie dont la candidature n’était pas conforme au cahier des charges et de la désignation du Quatar dont la candidature a été soutenue par MM. Zidane et Platini. Depuis lors, par amertume, déception ou soupçon, certaines personnes réclament une enquête internationale indépendante. Cette demande provient essentiellement des milieux libéraux hollandais, anglais et flamands si mes informations sont bonnes. Ces demandes d’enquête ne précisent toutefois aucune modalité. Nous avons donc sans doute davantage affaire à une protestation forte qu’à une proposition concrète. Reconnaissons que les 22 membres qui représentent 208 nations ont eu la tâche difficile, en raison de la qualité des candidatures. Les statuts de la Fifa interdisent toute forme d’intrusion politique sous peine d’exclusion aux prochaines coupes du monde. La tâche des politiques est donc difficile, sinon hasardeuse. Je ne voudrais pas annoncer ici même dans quelques mois à M. Crucke que notre pays a été sanctionné. Je me contenterai dès lors de poser certaines questions et de suivre les interventions de Mme Schippers aux Pays-Bas. J’invite celles et ceux qui disposeraient de preuves à déposer une plainte en justice.

M. Jean-Luc Crucke (MR). – La ministre néerlandaise des Sports fait preuve d’endurance. Manifestement, le ministre Antoine ne suit pas la cadence.

Question orale de Jean-Luc CRUCKE au Ministre Marie-Dominique SIMONET sur "le refus d'organiser un cours d'éducation affective et sexuelle"

M. le président. – Ces interpellations sont jointes.

M. Jacques Morel (ECOLO). – Le journal Le Soir rapportait la semaine dernière que, selon des déclarations de membres de votre cabinet, l’éducation à la vie sexuelle et affective était impraticable. On croit rêver. Ou plutôt cauchemarder. Depuis 2001, au moins, la Communauté française s’est accordée sur l’importance de généraliser l’éducation à la vie sexuelle et affective à l’école et a mené et évalué de multiples projets pilotes. Elle a sollicité des études auprès de l’École de santé publique de l’ULB et des Facultés Notre-Dame de la Paix à Namur. De plus, les recherches et les observations fournies par les acteurs de terrain comme les centres de planning familial, les SPSE ou les CPMS convergent toutes. La résolution adoptée par les parlements en 2008, les accords de gouvernement en 2009 de la Communauté française, de la Région wallonne et de la Commission communautaire française, démontrent s’il le fallait la nécessité de généraliser l’éducation à la vie sexuelle et affective dans l’enseignement. Au niveau régional, les accords de majorité prévoient de concrétiser un accord de coopération entre les entités, de désigner les opérateurs et d’entrer dans la phase de déploiement. Sur le terrain, la volonté d’intégrer un programme Evras, en tous cas, dans l’enseignement technique et professionnel, devrait trouver sa concrétisation dans les plus brefs délais. Le groupe de travail mis en place suite à la réunion conjointe des gouvernements doit impérativement se mobiliser pour finaliser ces objectifs conformément aux échéances prévues. Récemment, le parlement de la Communauté française a adopté deux résolutions complémentaires recommandant la généralisation de l’Evras. La première résulte des conclusions de la réunion du comité mixte avec le Jura dont on a parlé ce matin ; le Jura a, comme la Suisse, intégré l’Evras dans le cursus scolaire. Le Jura a donc une belle expérience. La seconde a été adoptée à l’unanimité ici même le 1er décembre à l’occasion de la Journée mondiale du sida. Plus récemment encore, le Conseil supérieur de la jeunesse a adopté un avis recommandant la généralisation de l’éducation à la vie sexuelle et affective dans les écoles. De plus, quatre fédérations de centres de planning familial ont, en août dernier, adopté une position commune partant du principe que l’éducation sexuelle est un droit. Nous apprenons alors par voie de presse, que le cabinet de la ministre qualifie à présent ces cours d’impraticables et en subordonne la conception à la mise en place de cellules sur le bien-être chargées de « régler » un ensemble disparate de problèmes qui affectent les écoles comme l’éducation à la sexualité certes, mais aussi les assuétudes, les jeux vidéo, le décrochage scolaire ou l’éducation citoyenne. L’école est un espace pertinent pour les questions relevant du domaine de la santé, qu’il s’agisse de l’alimentation, des assuétudes, des activités physiques, etc., et de l’éducation à la vie sexuelle et affective, à l’environnement, à la consommation ou encore à la citoyenneté responsable. Les nombreux intervenants qui se présentent à l’école ou qui sont requis par elle ont soit des missions exclusives, comme les PSE et les PMS, soit particulières, thématiques, comme le planning familial, certains services de santé mentale ou certains acteurs d’éducation ou de promotion de la santé. La Déclaration de politique communautaire intégrera des cellules « bien-être » au projet pédagogique des établissements, sous la coordination des PSE et/ou des PMS. Ces cellules, évoquées par la presse, visent à structurer les intervenants extérieurs et ne sont aucunement en contradiction avec la volonté des gouvernements de généraliser l’Éducation à la vie relationnelle, sexuelle et affective – l’Evras. Il conviendrait toutefois qu’elles ne mettent pas en péril ou ne retardent pas la concrétisation de nos engagements. En ce qui concerne l’Evras, je voudrais m’appuyer sur les résultats des nombreux travaux, des expériences pilotes et études réalisés en Communauté française durant ces dix dernières années. Il n’a jamais été envisagé de dispenser des cours de vie sexuelle et affective mais bien d’y consacrer un espace dans le cursus scolaire sous forme de modules de quelques heures dans chacun des cycles, en utilisant éventuellement les plages blanches. Cet espace doit permettre de favoriser la relation des enfants avec la famille, qui n’est évidemment pas évincée dans cet apprentissage et dans la prise de parole sur ce sujet parfois encore difficile à aborder. L’animation des modules serait confiée, à la fois pour des raisons de compétence et de neutralité, à des professionnels de la santé issus des plannings familiaux, PMS ou PSE. Madame la ministre, ayant eu connaissance des résultats des études réalisées, dont celle de l’ULB-Promes, vous aurez constaté que des animations ont déjà lieu dans nombre d’établissements ; vous aurez aussi observé que les enseignements technique et professionnel sont peu concernés par ces animations. L’objectif est de généraliser le dispositif pour en faire bénéficier tous les jeunes, sans discrimination. Il est heureux que les gouvernements de la Communauté française, de la Région wallonne et de la Cocof aient conjointement installé le pilotage du groupe de travail sur le sujet, dans le cadre des compétences Égalité des chances de la ministre Laanan. Cela démontre que l’enjeu est triple. Le premier enjeu est l’égalité sociale. En effet, les questions de sexualité sont moins abordées dans les établissements fréquentés par une population socio-économiquement défavorisée. Le deuxième enjeu est la non-discrimination tant de genre que de statut sexuel, notamment visà- vis des homosexuels ou des transsexuels. Le troisième enjeu vise à accorder une place essentielle aux questions relatives à la sexualité. Nombre d’événements récents confirment la nécessité d’apporter davantage de sérénité dans les rapports humains ; pour s’en convaincre, il suffit de voir les faits de violence à l’encontre des femmes, les grossesses non désirées, les grossesses chez les adolescentes, la pédophilie, la maltraitance sexuelle, la pornographie, etc. Pour toutes ces raisons, il était légitime que la DPC et les différentes résolutions intègrent dans le cadre de l’école une approche de la vie sexuelle et affective. Les propos de votre cabinet remettentils en question ces engagements pris par notre assemblée? Qu’en est-il des travaux du groupe de travail issu de la réunion conjointe des gouvernements et chargé de conduire la mise en oeuvre d’une coopération des entités fédérées et des acteurs pour concrétiser ces engagements en faveur d’une généralisation de l’éducation à la vie affective et sexuelle ?

M. Richard Miller (MR). – M. Morel a souligné à quel point les parlementaires que nous sommes ont été surpris par les déclarations de votre cabinet relayées dans la presse. Celui-ci déclarait son impuissance à créer une éducation à la vie sexuelle et affective, les cours étant impraticables, etc. Une vision positive de la promotion de la santé conduit à considérer que toute personne a le droit de vivre sa vie affective et sexuelle de façon libre, épanouissante et responsable, ce qui implique notamment de disposer d’informations objectives et de repères éducatifs. C’est en effet par ces quelques mots qu’est introduite la proposition de résolution du 26 juin 2008 « recommandant la généralisation des animations à la vie relationnelle, affective et sexuelle en milieu scolaire » cosignée par les quatre formations politiques démocratiques qui composent cette assemblée. La forme et la place que doivent prendre ces animations dans le contexte scolaire ont révélé certaines divergences entre nous. Certains sont adeptes d’un véritable cours – le conseil de la Jeunesse a récemment rappelé son plaidoyer en ce sens, et il n’est pas le seul –, d’autres penchent plutôt vers des « modules ». Contrairement aux apparences, cette divergence va bien au-delà d’une simple question pratique et soulève de manière très concrète la question du lien entre l’évolution de l’école et l’évolution de la société. Au niveau sociétal, les signaux sont alarmants. Alors que la vie affective et sexuelle se développe de plus en plus tôt chez les adolescents, leurs connaissances, leurs repères sur le sujet semblent inexistants. Les conséquences de ces manquements sont souvent douloureuses : maladies sexuellement transmissibles, grossesses non voulues, recours à l’interruption de grossesse, etc. Il suffit pour s’en convaincre de consulter les résultats et statistiques d’études diverses comme l’enquête « Santé et bien-être » – selon laquelle 52%des élèves de 15 à 18 ans déclarent avoir déjà eu des rapports sexuels – et celle réalisée par la Commission d’évaluation de la loi sur l’interruption volontaire de grossesse qui rend compte d’une augmentation de 15 % entre 2000 et 2005 pour les jeunes filles entre 10 et 19 ans. En commission, j’ai exprimé à plusieurs reprises mon étonnement face à la croissance du nombre d’IVG pratiquées notamment dans les centres de planning familial. J’espère qu’elles sont pratiquées dans des conditions médicales et sanitaires optimales. Ce sont en effet souvent des personnes issues de milieux totalement défavorisés qui ont recours à ces centres. À lire ces statistiques, on ne peut que se demander ce que fait le gouvernement. Selon l’article de presse précité, votre cabinet, madame la ministre, évoque pour sa défense des questions d’organisation, d’horaire et de contenu. On peut certes en tenir compte mais il faut savoir ce que l’on veut : pour atteindre les objectifs, « l’intendance » doit suivre. Puisque nous sommes confrontés à un problème important pour la vie sexuelle et affective des adultes de demain, il est de votre devoir de ministre de l’Éducation de trouver une solution. La déclaration de votre cabinet est donc très surprenante. Le problème découle également de ce que l’on demande à l’école. Lorsque nous étions enfants, les choses étaient claires pour la majorité des gens : les parents éduquaient et l’école instruisait. Il existait une sorte de « frontière ouverte » qui permettait d’émanciper et de « construire » les futures générations. Cette « frontière ouverte », tous les parents ne la concevaient peut-être pas de la même manière, mais la majorité d’entre eux partageaient cette façon de voir. Aujourd’hui, la distinction des rôles entre la famille, les parents et l’école est de plus en plus floue. Les raisons en sont multiples : évolution des moeurs, parents davantage occupés par leurs obligations professionnelles – trajets plus longs, les deux parents travaillent, familles monoparentales –, problèmes liés à l’immigration, pornographie facilement accessible notamment sur Internet, etc. La tendance est de laisser à l’école des missions qui ne lui étaient pas dévolues précédemment. En même temps, cette espèce de relégation vers l’école de la mission d’éducation s’accompagne curieusement d’une sorte de remise en question de l’autorité scolaire : il ne faut plus obéir aux professeurs, les enfants peuvent se débrouiller, etc. Nous sommes donc confrontés à un problème d’ordre sociétal. L’école doit-elle rester les bras croisés face à cette évolution ? Je ne le crois pas. Il est possible d’organiser des animations dans le cadre d’un cours sur la vie relationnelle, affective et sexuelle, au sein de l’école et en collaboration avec elle. Mon groupe plaide depuis des années pour une meilleure utilisation des temps scolaires. Ce que l’école ne peut pas accomplir ne doit pas nécessairement être réalisé en dehors de celle-ci. Il suffirait de faire preuve d’un peu plus de volontarisme et d’accueillir dans les écoles, pendant les jours blancs, des représentants des centres PMS, des centres de planning familial ou d’autres organisations similaires pour que les enfants reçoivent, en partie du moins, cette éducation à la vie relationnelle, affective et sexuelle. Ils en bénéficient visiblement de moins en moins aujourd’hui. Qu’attendez-vous, madame la ministre ? Votre formation politique n’a-t-elle pas elle aussi signé la proposition de résolution à laquelle j’ai fait allusion? Je sais, madame la ministre, que mes propositions ne résoudront pas tous les problèmes mais elles apporteront quelques améliorations. Il y a peu, un de vos prédécesseurs soulignait: « En cinquante ans, les jours d’ouverture des écoles sont passés de quatre cents demi-jours à cent quatre-vingt-deux jours fictifs. Fictifs parce qu’il faut en déduire des jours consacrés aux examens, à leur correction, aux procédures de recours. On le sait, les écoles se vident vers la mijuin. Mais il faut encore soustraire les jours de formation des enseignants, leurs congés de maladie sans remplacement organisé et les effets néfastes de la pénurie et des vacances anticipées ou prolongées en raison des prix des billets d’avion. Un tel rétrécissement du temps scolaire n’est évidemment pas sans conséquences. La dilapidation du temps scolaire est tellement entrée dans les moeurs que d’aucuns n’imaginent même plus qu’on puisse faire autrement ». Madame la ministre, aujourd’hui, quelle que soit la façon dont vous aborderez les responsabilités et les missions de l’enseignement, vous ne ferez pas l’économie d’un débat fondamental sur l’organisation du temps scolaire. Il faut avoir le courage de le mener de front, quitte à passer sous les fourches caudines des pouvoirs organisateurs, des syndicats et autres organismes dont la mission première est de maintenir les choses en l’état. Nous devons assumer notre responsabilité politique. Madame la ministre, vous pouvez compter sur les groupes politiques qui composent cette assemblée pour oser aborder cette question de front : comment pourrions-nous organiser l’école au mieux ? Nous venons d’avoir un débat sur les résultats des études Pisa. Hier, nous avons discuté des divers aspects de notre société pluriconvictionnelle. J’estime qu’il est également important de lancer un débat sur la vie affective des enfants et des futurs adultes. J’écouterai votre réponse avec beaucoup d’attention. Vous avez entre les mains l’avenir de toute une génération et vous auriez grand intérêt à faire confiance à cette assemblée parlementaire.

M. Jean-Luc Crucke (MR). – L’article paru dans la presse le 6 décembre dernier nous pousse à clarifier la position de la Communauté française et de la ministre par rapport à l’organisation de ce cours qualifié « d’impraticable ». Nous vivons dans un contexte sociétal très contradictoire. Notre société tend à l’hyper sexualisation des comportements des jeunes qui, à la pré-adolescence, se comportent déjà comme de véritables adultes. Le sexe est à la mode, mais on oublie une série de valeurs qu’il faut pouvoir retrouver. Le rôle de l’éducation et de l’enseignement est primordial mais les cours qui seraient organisés devraient prendre la forme d’un dialogue entre les élèves, les enseignants et la famille et non celle d’un enseignement théorique. Il faut resituer les valeurs et non le gadget – ou ce que j’ai qualifié tout à l’heure de jeunisme – qui serait considéré comme étant « la » raison d’être, la raison de vivre, l’exemple à suivre. C’est évidemment le contraire. J’ai été surpris par le contenu de cet article :« Les centres de planning familial ont conclu que l’éducation sexuelle était un droit. » Madame la ministre, considérez-vous que c’est un droit ? Dans l’affirmative, ce cours doit-il être légalement inscrit dans un programme ? Cette question est essentielle car, si c’est un droit, vous devez y apporter une réponse. Dans certaines écoles, ces cours existent sous l’une ou l’autre forme. Mais pourquoi dans certaines écoles et pas dans d’autres ? C’est une forme d’inégalité face à ce qui serait un droit. Il serait donc nécessaire de légiférer ou du moins de préciser le contenant et le contenu. Selon la presse, les trois partis au gouvernement ne seraient pas du même avis. Un cours obligatoire peut-il mettre toutes les écoles sur un même pied ? Certains le pensent mais, selon Le Soir, il n’y a pas d’accord au sein du gouvernement PS-Ecolo-cdH. Où se situe le désaccord ? Qui est d’accord et qui ne l’est pas ? Quels sont ceux qui sont prêts à soutenir l’initiative ? Je m’adresse à tous les politiques. M. Miller et moi-même pourrions déposer une résolution et inviter ceux qui le souhaitent à la cosigner. Il faut qu’ils sachent que, si certains font de l’obstruction sur ce dossier, ils peuvent compter sur le MR pour progresser. Le journaliste Hugues Dorzée, dont les qualités sont incontestables, rapporte les propos qui lui ont été tenus. Il écrit que, selon le cabinet de la ministre Simonet, l’idée d’un cours à part entière intégré dans les programmes est « impraticable en termes de grille horaire ». Vous devez justifier ce caractère « impraticable». Richard Miller l’a très bien expliqué : si c’est un droit et que l’on constate qu’il ne peut être exercé partout de la même manière, il faut légiférer. Il faut le rendre praticable ! Madame la ministre, j’aurais aimé savoir ce que vous appelez « des propositions alternatives». Quelles alternatives proposez-vous ? Comment font les autres pays ? Il y a peut-être des exemples à suivre en Europe ou dans le monde. Comment fait la Communauté flamande ? Dans d’autres pays, l’éducation à la vie affective et sexuelle est-elle considérée comme un droit des élèves ? Une méthodologie et une pédagogie ontelles été inscrites dans leurs programmes ? Ou d’autres formules sont-elles employées ? Ce débat ne doit pas nécessairement être clos aujourd’hui mais il doit nourrir notre réflexion. Nous pourrons y revenir de façon approfondie en commission de l’Éducation. Nous n’avons pas besoin de savoir qui a tort ou raison, mais votre réponse doit alimenter notre jugement.

M. le président. – La parole est à Mme de Groote.

Mme Julie de Groote (cdH). – Le titre d’un article de presse m’a fait réagir car je suis très attachée à cette question. Sous la précédente législature, Paul Galand, Fatiha Saïdi et moi-même sommes intervenus à plusieurs reprises à ce sujet. Mme Fadila Laanan nous a, un soir, répondu devant un parterre clairsemé. Aujourd’hui, nous avons donc l’occasion de mener un débat plus structuré que lorsque nous revenions à la charge de façon épisodique. Mon groupe partage les deux objectifs rappelés aujourd’hui par mes collègues. Je ne pense pas que vous n’y souscriviez pas, madame la ministre. Je ne veux pas vous faire de procès d’intention. Le premier objectif est que des animations – et non des cours – sur l’éducation à la vie sexuelle et affective soient organisées et abordent le thème de façon très large. Sous la précédente législature, Paul Galand et moi-même, en tant que présidents des commissions concernées, avons insisté sur une éducation non seulement à la vie sexuelle mais aussi à la vie affective. Au-delà de l’apprentissage des méthodes de contraception par exemple, ce qui est certes important, il y a aussi la connaissance et le respect de l’autre. Cet apprentissage est particulièrement important, à ce moment de vie où les jeunes ne savent pas où ils en sont, « ni dans leur corps ni dans leur coeur », et où, comme l’a rappelé M. Miller, il y a beaucoup de non-dit. C’est notre premier objectif. Le second objectif sera la généralisation de ces animations à l’ensemble des établissements. Nous en sommes tous demandeurs. On constate malheureusement que les grossesses précoces, par exemple, surviennent précisément dans des établissements qui n’organisent pas ce type d’animation. Comment procéder ? La priorité est la création d’un cours de philosophie et d’éducation aux religions. Nous nous rejoignons tous à cet égard. De même, nous reconnaissons tous l’existence d’un vrai problème de moyens et d’organisation. Ces deux constats ne sont d’ailleurs pas contradictoires. Il faudra faire le maximum pour créer le cours et résoudre les problèmes de ressources. Je voudrais ajouter une dimension supplémentaire : la méthode poursuivie est importante ; chaque établissement doit pouvoir s’approprier un tel projet, mais dans le cadre général de la santé, comme l’a rappelé M. Miller. Ce cadre comprend également, par exemple, la question des assuétudes et de la prévention du suicide ou d’autres phénomènes qui préoccupent les jeunes. La Déclaration de politique communautaire prévoit la création de cellules de bien-être dès l’école primaire, à créer en coordination avec les CPMS, les PSE et les Points d’appui sur les assuétudes. L’idée de travailler à partir de ces cellules me semble intéressante et j’aimerais donc savoir, madame la ministre, où en est ce dossier. Chaque établissement doit avoir sa propre feuille de route de façon à pouvoir aborder, au fil du temps et en fonction des âges concernés, tous les sujets et problèmes de société – animations Evras, problématiques du suicide, des assuétudes, des troubles alimentaires, etc. – qui nous semblent, à nous parlementaires, des priorités.

M. le président. – La parole est à M. Senesael.

M. Daniel Senesael (PS). – Le Conseil de la jeunesse réclame un cours de vie affective et sexuelle dans tous les établissements d’enseignement secondaire. Cet organe représentatif des jeunes en Communauté française recommande au gouvernement de mettre en place un tel cours et d’organiser des formations pour les enseignants. En outre, en août dernier, les quatre fédérations de centres de planning familial ont conclu que l’éducation sexuelle était un droit et qu’elle devait être inscrite dans le programme scolaire. Nous avons eu l’occasion, à de nombreuses reprises déjà, d’examiner des demandes de groupes et d’associations réclamant l’inscription de telle ou telle matière dans le programme scolaire. Nous savons toutefois que les apprentissages de base constituent la priorité. L’école doit beaucoup mais elle ne peut pas tout. Je partage votre avis, madame la ministre, que l’organisation qu’inscrire pareil cours dans la grille horaire est impraticable. Cependant, cette matière est primordiale et l’école peut être un lieu de sensibilisation formidable. Vous avez rencontré les fédérations de centres de planning familial et le Conseil de la jeunesse afin d’entendre leur point de vue et de débattre du sujet. Pouvez-vous nous indiquer quelles sont les initiatives actuelles d’éducation à la sexualité pour la sensibilisation des élèves et celle des enseignants ? Quelles sont les pistes à l’étude ? Quel est l’état de la réflexion au gouvernement ?

Mme Marie-Dominique Simonet, ministre de l’Enseignement obligatoire et de promotion sociale. – Vos questions appellent une réponse claire et précise sur un sujet important au coeur de mes préoccupations comme de la Déclaration de politique communautaire. La question porte sur un cours d’éducation sexuelle. La réponse est non à un cours de plus dans la grille horaire mais oui, évidemment, aux deux objectifs rappelés par Mme de Groote. D’ailleurs les acteurs ne réclament pas un cours ex cathedra. L’organisation de ce cours, en tant que tel, soulève toute une série de problèmes mais je suis favorable d’une approche d’animation de l’éducation à la vie sexuelle et affective pour tous à l’école. M. Miller s’est interrogé à cet égard sur les missions fondamentales actuelles de l’école. Il a rappelé que la situation a fortement évolué, qu’il n’est plus question de transférer du savoir à l’école mais d’y promouvoir la confiance en soi, de permettre l’appropriation des savoirs, de préparer les élèves à être des citoyens responsables et d’assurer à tous les élèves des chances égales. C’est évidemment dans cette perspective que nous devons trouver les réponses à tous les questionnements. Après ce rappel du cadre général, je voudrais focaliser ma réflexion sur la promotion de la santé et l’éducation au bien-être en milieu scolaire. Les plans d’action, comme les intervenants, sont très nombreux, ce qui engendre parfois quelque confusion parmi les mesures. Les établissements scolaires sont sans cesse conduits à s’intéresser à des sujets multiples et variées, imposés pour des raisons historiques ou sociales, comme le rappelait M. Miller, mais ils ne disposent ni du temps ni des ressources pour les inscrire systématiquement dans leurs programmes. Chacun dans son domaine tient à dire son mot sur la manière dont l’école et singulièrement les enseignants devraient s’y prendre. Les assemblées consultatives, les experts multiplient leurs recommandations et invitent l’école à s’intéresser en priorité au sujet qui les préoccupe. Qui oserait contester la pertinence de dispositifs de prévention au suicide dans les établissements scolaires ? Personne ! Il en est de même pour la prévention de l’assuétude à l’alcool, au tabac ou aux jeux, que ce soit le jeu du foulard ou d’autres jeux violents. L’école sera également sollicitée sur la citoyenneté ou la philosophie. Je saisis l’occasion pour souligner la qualité des échanges que nous avons eus récemment à ce propos. Monsieur Miller, fautil choisir entre des cours d’éducation sexuelle ou de philosophie ? Quelles seraient vos priorités ? Il faut encore évoquer le sport, la lutte contre le suicide, le développement durable, le respect de l’environnement, l’égalité des chances, le surendettement, sans oublier les compétences fondamentales comme la lecture et les mathématiques et les sciences. La liste est loin d’être exhaustive. Tous ces thèmes importants paraissent prioritaires aux yeux de ceux qui les défendent mais, faut-il le rappeler, on ne donne pas cours la nuit ou le weekend! Doit-on, pour autant, chaque fois qu’un problème se pose, le traduire en cours, au risque de surcharger la grille horaire ? Non, bien évidemment. Parmi ces thèmes, l’éducation à la vie relationnelle, affective, sexuelle est un sujet important. Le Conseil supérieur de la jeunesse a récemment communiqué, comme de nombreux autres acteurs avant lui, ses recommandations au monde scolaire. Il faut veiller à intégrer l’Evras dans les grilles horaires mais non en faire un cours hebdomadaire! Cette recommandation légitime et généreuse pose une série de questions, que vous avez soulignées. Comment organiser cette intégration, à quel moment de la scolarité, avec quels acteurs, sous quelles formes ? Faut-il privilégier des cours ou des modules, et avec quel contenu ? Nous comprenons tous la limite de l’exercice, quelles que soient les matières envisagées. J’en arrive au coeur de la question : l’éducation à la vie relationnelle, affective et sexuelle. J’ai pris connaissance des évaluations, des projets pilotes, des études et des recommandations de différents acteurs. Je suis convaincue de l’importance et de la nécessité d’intégrer l’Evras dans la vie scolaire mais surtout de veiller à y impliquer tous les acteurs de l’école. Les recommandations sont claires : il ne faut pas limiter l’Evras à quelques animations qui ne font que passer dans l’école et qui interviennent à un moment qui ne correspond pas nécessairement aux attentes de l’élève ; chacun évolue à un rythme qui lui est propre. Il faut plutôt assurer une présence pour que l’élève qui se pose des questions trouve les réponses au moment opportun, auprès d’un adulte, d’un professionnel. L’idée de proposer des animations Evras pendant les jours blancs est évidemment intéressante mais on ne disposera pas de tout le personnel puisque les équipes pédagogiques sont particulièrement occupées durant ces périodes. Certains élèves seront déjà partis ou ne seront pas réceptifs. Cette réponse serait insuffisante. Les recommandations insistent sur la nécessité de mobiliser les acteurs tout au long de l’année scolaire. Sans écarter toutes les opportunités, chacun reconnaîtra sans doute avec moi que la question est évidemment bien plus complexe.
L’évaluation des projets pilotes d’Evras est globalement positive. Mon intention est bien sûr d’en tenir compte et de prendre en considération les freins à la généralisation dans les écoles qui ont été mis en évidence, notamment par les fédérations de centres de planning familial. Je relève entre autres que « l’imposition de thèmes et de rythmes affecte l’autonomie pédagogique des centres de planning et les limite dans la prise en compte des besoins locaux
spécifiques ». Ces mêmes centres insistent sur le fait que l’implication de l’école est essentielle. La qualité du cadre proposé pour les interventions externes en constitue un élément majeur. En ce qui concerne les modalités de l’Evras – nombre d’heures, niveaux d’enseignement – le groupe de travail installé conjointement par les gouvernements et qui a été chargé de conduire la mise en oeuvre d’une coopération des entités fédérées et des acteurs pour concrétiser les engagements de généralisation de l’Evras a considéré que « poser le problème en ces termes enfermerait la problématique, la réduisant à la détermination
d’un quota d’heures d’animation, sans les restituer dans une politique globale de promotion de la santé ». C’est donc une thème plus large. En effet, une vie affective douloureuse peut mener au suicide, aux assuétudes. Tout est lié : il ne faut pas segmenter les choses. C’est pourquoi je ne suis pas favorable à la création d’un cours à part entière intégré dans le programme. M. Morel a d’ailleurs précisé qu’il n’était pas question de cela. Par contre, la question était posée dans l’article. Je ne suis donc pas favorable ni à un cours à part entière ni à des animations ponctuelles ou à des modules, mais bien à une intégration transversale, quotidienne. Les programmes sont chargés, tout le monde s’accorde sur ce point. Il faut centrer l’enseignement sur les apprentissages de base. Par contre, je ne remets absolument pas en cause les options, les engagements et les objectifs rappelés par Mme de Groote en matière d’Evras. Je souhaite simplement en faire les buts d’un dispositif plus large, prévu dans la Déclaration de politique communautaire, à savoir les cellules de bien-être. J’ai déjà expliqué à cette assemblée la politique que je souhaitais mener en matière de bien-être à l’école. Elle s’inscrira dans la durée et dans un projet global qui sera modulé selon le contexte et les besoins ; elle favorisera les méthodes interactives conçues avec et pour les jeunes ; elle visera à promouvoir le bien-être de tous en développant une stratégie d’éducation, de prévention, d’intervention globale et durable. Conformément aux recommandations, je souhaite que ce soit également le cas pour l’Evras. Le principe fondateur des cellules « bien-être » à l’école est de distinguer et de relier les différents acteurs, de veiller à la cohérence des interventions en articulant celles-ci sur les spécificités de chaque partenaire. Des actions ponctuelles et thématiques seront poursuivies, mais en tenant compte de leurs limites. Ainsi, le chef d’établissement, accompagné des membres de la cellule « bien-être » et, le cas échéant, en partenariat avec un centre de planning familial, pourra proposer aux élèves une politique beaucoup plus globale, ce qui me semble bien plus pertinent. Dans ces cellules, dont la création est prévue par la déclaration de politique communautaire, les CPMS et les SPSE, en tant que services de première ligne, auront à jouer un rôle moteur. La cellule « bien-être » sera composée, sans exclure d’autres partenaires ou personnes ressources, des acteurs de première ligne, qui se concerteront régulièrement pour aider le chef d’établissement à définir les lignes de force de son école. Elle dynamisera la promotion de la santé dans le temps et l’espace scolaires, identifiera les ressources internes, déterminera les services de deuxième ligne et les services extérieurs auxquels faire appel. Un tel dispositif tient compte des évaluations des projets pilotes, des études menées en matière d’éducation à la vie relationnelle, affective et sexuelle et des recommandations des centres de planning familial. L’objectif est que les animations Evras n’interviennent plus de manière ponctuelle, mais dans une approche plus globale s’inscrivant dans la durée. En collaboration avec le cabinet de Mme Laanan, je compte développer des projets pilotes dès septembre 2011. L’idée est de créer, à titre expérimental, des cellules « bien-être » dans les établissements de tous les niveaux et réseaux d’enseignement. Pour ce faire, nous souhaitons recourir prioritairement aux acteurs qui souhaiteraient développer une action de promotion du bien-être à l’école, mais qui éprouvent des difficultés à mobiliser une équipe reconnue dans un établissement scolaire. Notre projet est de construire avec eux une politique de prévention globale et durable, et de les accompagner dans la mise en oeuvre de ce projet par l’ensemble de la communauté éducative. Notre objectif est de susciter des pratiques locales, et non d’imposer des recommandations ou des injonctions quant à la manière d’agir, de proposer un questionnement et des points de repères, d’assurer la mise en oeuvre et l’évaluation de cette promotion du bien-être à l’école à travers lesdites cellules. Je souhaite privilégier une dynamique ancrée dans la réalité. Nous devons éviter les recettes toutes faites, les codes de bonnes pratiques qui ne mobilisent que les acteurs déjà sensibilisés. Nous devons conscientiser des personnes-relais, les aider à mobiliser des équipes et à construire des cellules. Il s’agit d’en faire un projet pour toute l’école. Des établissements scolaires ont déjà développé des animations Evras en collaboration avec les équipes des CPMS, des SPSE ou des centres de planning familial. Certains enseignants ont dès à présent intégré cette thématique dans leurs cours. Je les en félicite et les encourage à poursuivre ! Je souhaite prioritairement soutenir les chefs d’établissements qui sont confrontés à ces questions sur le terrain et qui n’ont pas toujours à leur disposition les réponses adéquates. Par la généralisation de l’Evras, je n’entends pas une systématisation contrainte, mais un soutien, une aide généralisée, qui ait du sens pour les acteurs de terrain, dans le respect de leur rôle et de leur mission. La mise en place du dispositif favorisera l’ar ticulation de différents facteurs. Au départ des réalités locales, il stimulera l’émergence de points de repères communs et la construction d’une dynamique cohérente de promotion du bien-être à l’école. Il guidera les acteurs locaux dans l’appropriation des recommandations des experts du projet politique de la Communauté française en matière de promotion du bien-être à l’école. L’intégration de l’Evras dans une dynamique de promotion du bien-être au coeur des politiques scolaires entre pleinement dans les missions de l’école.

M. Jacques Morel (ECOLO). – Les précisions que vous venez d’apporter, madame la ministre, permettent d’inscrire l’éducation à la vie sexuelle et affective dans une perspective globale de la mission de l’école, et je vous en remercie. Les besoins et demandes dans ce secteur sont clairement exprimées et identifiées. Il est temps de mettre en oeuvre les engagements que nous avons pris depuis des années et d’en tester la faisabilité. Les cellules « bien-être » représentent un facteur de régulation de toute une série de problématiques amenées dans l’école ou suscitées par elle. L’échange devrait se passer de manière dialectique et pourrait être une façon de mettre en rapport, dans un projet d’alliance éducative, les intervenants extérieurs issus du milieu associatif et ceux qui représentent les relais au sein de l’école, à savoir les professeurs, dans le cadre du projet d’établissement. De ce côté là, l’effet est positif. Je me demande si l’éducation à la vie sexuelle et affective doit être abordée par la même structure qui s’occupe de l’explication de la pyramide alimentaire ou de la prévention des assuétudes. Tous les jeunes ont le droit de bénéficier de l’Evras. Cela permettrait de replacer, au delà des aspects que je qualifierais de techniques, cette préoccupation essentielle dans la réalité des adolescents. Elle ne doit pas nécessairement passer par le filtre des cellules « bien-être ». C’est d’un autre ordre, c’est reconnaître que la sexualité fait partie de la vie tout court.

M. Richard Miller (MR). – Je remercie la ministre pour sa réponse. Je remarque qu’elle a clairement pris ses distances par rapport à l’article de presse qui nous avait inquiété sur cette question qui est pour nous très importante. Cependant, nous suivrons d’un oeil attentif les initiatives que Mme Laanan et elle-même envisagent de prendre. La première partie de la réponse de la ministre nous fait poser une question fondamentale. Toute une série de thématiques importantes concernent le monde scolaire. Hier, nous avons eu un débat très intéressant en commission ; ce matin, nous avons abordé le rapport Pisa. Cela montre bien que nous ne ferons pas l’économie d’une réflexion approfondie sur l’utilisation du temps scolaire et sur ce que nous voulons inscrire dans ce que les Grecs appelaient la « paideia » et sur le rôle que l’école doit y jouer. Des dispositions réglementaires – c’est l’article 50 – sont prévues pour que nous puissions en débattre au parlement, sans que cela ne porte préjudice aux prérogatives ministérielles.

M. Jean-Luc Crucke (MR). – La ministre a été claire sur sa décision de ne pas organiser un cours d’éducation sexuelle. Sa réponse qui, d’une certaine manière, renvoie à l’autonomie des directions des écoles est intéressante. Encore faut-il qu’elles en aient les moyens ! Comme l’a très bien dit M. Miller, nous sommes dans un débat qui dépasse celui qui est en cours et qui porte sur les disponibilités horaires dans les écoles et les priorités. On ne peut pas le résumer à une question, aussi importante soit-elle. En tout cas, je ne suis pas sûr que ceux qui ont initié le débat par presse interposée seront très rassurés ou qu’ils trouveront, dans nos propos, une solution à ce problème. Le débat doit être plus large.

M. le président. – Les incidents sont clos. Je vous propose d’interrompre ici nos travaux.

jeudi 15 décembre 2005

Interpellation de Jean-Luc CRUCKE au Ministre Benoît LUTGEN sur "des fouilles archéologiques pour permettre la recherche du Trésor des Templiers"

Mme la Présidente. L'ordre du jour appelle la question orale de M. Crucke à M. Lutgen, Ministre des Travaux publics, de l'Agriculture, de la Ruralité, de la Nature, de la Forêt et du Patrimoine, sur «les fouilles archéologiques du Blanc Scourchet à Ellezelles.» et l'interpellation de M. Crucke à M. Lutgen, Ministre des Travaux publics, de l'Agriculture, de la Ruralité, de la Nature, de la Forêt et du Patrimoine, sur «des fouilles archéologiques pour permettre la recherche du Trésor des Templiers.».
La parole est à M. Crucke pour poser sa question et développer son interpellation.

M. Crucke (MR). Madame la Présidente, Monsieur le Ministre, chers collègues, je pense que M. Senesael intervient également sur le sujet. Monsieur le Ministre, c'est un sujet qui me tient à c ur, j'ai la passion pour le sujet. On en avait déjà parlé ensemble une première fois, et votre réponse m'avait plu. Elle m'avait plu parce que j'avais vu que vous y aviez accordé un certain intérêt, pour ne pas dire un intérêt certain. Je reconnais bien là, outre le ministre du patrimoine, aussi un ministre qui a une certaine passion pour le tourisme, le développement de la Wallonie en général, parce qu'on peut y trouver un développement de la Wallonie.
Tout cela part d'un texte ancien - en plus, c'est cela qui est merveilleux, il y a de l'histoire, qui rejoint une richesse patrimoniale - qui s'appelle les Centuries, 4.000 vers, et que l'on peut dater de 1323- 1328. C'est un monsieur qui s'appelle Rudy Cambier, personnage qui vaut la peine d'être rencontré. Je lui ai même dit que je tenterais de vous réunir, - parce que je sais que vous connaissez la région et que vous aimez, de temps en temps, à des fins tout à fait privées, mais on peut aussi en venir à des fins moins privées, plus publiques... -, et de lui permettre d'exposer la manière dont il est arrivé à penser, pour ne pas dire affirmer, que le trésor des Templiers se trouve à Ellezelles, dans ce qui est sa propriété. Ce texte, en picard ancien, d'ailleurs très beau quand on voit certains éléments du texte, la calligraphie qui existait à l'époque. C'est extraordinaire. Il a été rédigé par un moine qui s'appelle Yves de Lessines et qui raconte comment trois hommes ont tenté de sauver le trésor des Templiers en le cachant - cela aussi, c'est tout un poème - en plein c ur de la terre des débats - c'est le nom qui est cité dans les Centuries -, une terre sans maître, au milieu du pays des collines, en plein centre d'un village qui a, au demeurant, pas mal de qualités sur le plan folklorique, qui est le village
d'Ellezelles. Quand on lit cet ouvrage - 4.000 vers, ce n'est pas rien - je ne l'ai pas lu entièrement, que les choses soient claires, mais je me le suis fait relater par M. Cambier, on est dans ce qu'on appelle un chemin initiatique où le côté visuel a une importance capitale. En réalité, on part d'un point à un autre et on déchiffre un point par rapport à un autre, notamment par le côté visuel. Il y a un élément de réflexion mathématique à faire, mais c'est la vue qui vous amène au point suivant. C'est vous dire si c'est important. Il faut savoir que les points de départ sont différents mais, depuis le XIVe siècle, cette vue qui permet ce chemin initiatique n'a jamais été obstruée. Il n'y a jamais eu, heureusement, de sceau qui aurait mis une construction en plein milieu, qui ferait en sorte qu'on ne puisse pas gérer ce chemin initiatique. Je l'ai fait. Ce n'est pas par curiosité, mais je l'ai fait un peu par égoïsme local ou chauvinisme local parce qu'une des stations finales qui permet d'arriver à Ellezelles et passe par la commune de Frasnes-Les- Anvaing, c'est Moutiers. Le petit village de Moutiers est déjà, en soi, toute une histoire, où il y a deux églises sur la place. Cela se voit rarement, un petit village avec deux églises. Donc, de là, j'ai essayé de faire ce chemin initiatique pour arriver au Blanc Scourchet à Ellezelles. Je vous assure, c'est merveilleux. Il y a d'ailleurs un chemin, un sentier balisé qui permet de suivre cela. C'est vous dire si cela ne date pas non plus de quelques semaines, de quelques jours. Il y a derrière tout cela une théorie fort importante et il y a cette route qui mène au Blanc Scourchet, l'une part de Paris, l'autre de La Panne, de Bruges, de Ninove, de Cologne, de Nivelles et de Cambron.
Tous les chemins mènent à la Croix Philosophe parce que l'endroit où l'on pense que se trouve le trésor des Templiers, c'est un croisement entre deux vieux chemins qu'on appelle la Croix Philosophe. Monsieur le Ministre, vous avez compris, c'est vraiment une histoire de vues, et quand je dis vues, c'est avec un V majuscule. Mon histoire aurait pu s'arrêter là si la bêtise humaine ou la cupidité matérielle de l'un ou l'autre ne faisait pas qu'avant cette dernière étape initiatique, la propriétaire, et chaque propriétaire fait ce qu'il veut, je ne suis pas là pour critiquer la propriétaire non plus, le but n'est pas celui-là d'ailleurs, mais la propriétaire a décidé de lotir un terrain qui se trouve face à l'endroit où on pourrait retrouver le trésor. C'est important par rapport à ce que j'ai dit en « terme visuel » parce que c'est vraiment en plein milieu du jeu de quilles. Et lorsque nous avions évoqué à l'époque ce dossier ensemble, vous m'aviez dit qu'il y avait des fouilles qui allaient être effectuées et qu'il fallait se montrer prudent et attendre de voir le résultat des fouilles. Le problème est que ces fouilles ont été réalisées et sont terminées sur le terrain qui est à lotir. Et là, je souris un peu parce que tout le monde sait que sur ce terrain, on ne va rien trouver, ce n'est pas là que se trouve le trésor, c'est sur le terrain de M. Cambier. Par contre, ce terrain a une certaine importance par rapport à tout ce côté visuel dont je vous ai parlé. On lotit ce terrain et on fout en l'air toute la trame du dossier de la recherche du trésor des Templiers, les centuries perdent leur valeur. C'est un crime patrimonial. On est vraiment pris entre un intérêt patrimonial qui est l'intérêt général, historique, et j'aurais envie de dire, plus qu'historique parce qu'on pourrait retrouver là un gisement en terme de tourisme intelligent dans la région et un intérêt plus particulier qui est celui de dire « je valorise un terrain qui m'appartient, c'est un terrain à bâtir». Cette demande de lotissement se fait quand même, c'est important de le dire, même si je ne suis pas toujours d'accord avec lui et le fonctionnaire délégué, je suis même plus souvent en désaccord, contre l'avis du fonctionnaire délégué, contre les recommandations du Parc Naturel des collines. Je sens bien qu'une commune dit qu'elle veut privilégier une sorte de richesse immobilière sur un patrimoine commun et historique. Monsieur le Ministre, il y a quelques éléments dans le dossier qui en dehors de ce qu'on appelle les Centuries, peuvent avec une dose raisonnable de confiance, vous faire dire que cela vaudrait la peine qu'on fouille sur le terrain de M. Cambier. Il a luimême, et c'est parfois un reproche qu'on lui fait sur le plan décrétal, je réponds peut-être à une remarque que vous pouvez me faire, mais il s'est prêté luimême à des sondages archéologiques par une firme anglaise Earth Sciences Systems Ltd qui est reconnue pour son sérieux, qui a vraiment pignon sur rue en la matière et qui a détecté du métal. On s'est arrêté à cela mais on sait bien aussi ce qu'on cherche dans le trésor. Il y a en tout cas une source d'informations intéressante. Je dis que c'est parfois un reproche qu'on lui fait parce qu'il a commencé de fouilles avant d'avoir l'autorisation de l'administration. Enfin, j'espère qu'on ne s'arrêtera pas à cela. Vous me faites «non» et donc, je suis très rassuré, parce que l'un ou l'autre fonctionnaire lui avait dit cela mais il fallait bien qu'il crédibilise la démarche aussi. Sans cela, ce dossier aurait peut-être été moins crédible tandis qu'avec cela, il l'est d'autant plus. Monsieur le Ministre, sachant cette vérité littéraire et historique, connaissant les essais qui ont été faits, je pense qu'à l'heure d'aujourd'hui, on devrait pouvoir se mettre d'accord sur l'un ou l'autre point et c'est pour cela que je veux vous poser ces questions. Est-ce que vous êtes d'avis qu'il faut sauvegarder ce site du Blanc Scourchet, et quand je dis sauvegarder le site, c'est en ce compris les terrains à lotir, et l'inscrire d'extrême urgence sur la liste de sauvegarde de la Wallonie afin qu'aucune construction et a fortiori aucun lotissement n'y soit possible, ne fut-ce que pour un délai limité? Je comprends très bien qu'on ne puisse pas dire à un propriétaire ad vitam aeternam qu'il a un terrain à bâtir qu'il ne pourra jamais l'utiliser si demain on prouve qu'il n'y a rien et que ce trésor est finalement une magnifique histoire mais sans fondement. Mais je pense quant à moi qu'elle a du fond. Peut-on, pour un temps limité, pendant un délai d'un an, dire qu'on ne touche à rien en termes de surface et d'aménagement du territoire? Est-ce que le ministre peut marquer son accord pour que ce site soit ensuite classé comme un site historique de premier plan? En tout cas, que la démarche soit effectuée pour aboutir à cette décision. Conformément a l'AGW du 17 juin 2004, le ministre autorise-t-il que soient effectuées ou en tout cas, je sais que la demande a été faite, j'ai vu M. Cambier qui a adressé tout le dossier à la fois à votre administration, à vous-même, au Ministre-Président Demotte également, des fouilles sur le terrain de M. Cambier qui permettent de mettre à jour les biens et les documents historiques que le terrain contient? Et enfin, parce que la dernière fois, vous m'aviez également parlé d'un rapport de l'administration que vous attendiez et je ne sais pas si ce rapport sur le terrain à lotir, et si c'est cela, je ne vous demande même pas le contenu du rapport parce qu'il n'est pas intéressant par rapport à l'historique dont je vous parle, mais si par contre, c'était un rapport plus conséquent sur le sujet, évidemment, il serait intéressant d'en prendre connaissance ou en tout cas, de ses conclusions. Voilà, Monsieur le Ministre où on en est. Vous savez, je ne vous le dis pas pour flatter votre ego, on sait très bien que ce n'est pas dans mes habitudes et je ne vais pas commencer aujourd'hui. Mais à tous les interlocuteurs que j'ai rencontrés dans ce dossier depuis quinze jours-trois semaines, je leur ai dit:« J'ai confiance en la décision du ministre. Sa réponse à la première question était une réponse intelligente et utile.». Je crains aussi, Monsieur le Ministre, de manière purement subjective, comme on peut faire une analyse d'un dossier où parfois on se dit que l'un ou l'autre ne joue peut-être pas dans la même cour, qu'au niveau de l'administration peut-être, certains ont tenté de circonscrire l'ampleur de ce dossier en limitant ce fameux terrain à lotir. Et ce serait vraiment dommage parce qu'on passerait à côté de la darse, si vous me permettez l'expression, on ne fait pas d'omelette sans casser des oeufs. Mais dans ce cas, il faut savoir en casser quelques-uns, quitte à dire à l'Administration communale d'Ellezelles, et je sais qu'il y a sur le banc communal d'Ellezelles, mais n'en faisons pas une affaire politique de grâce, des personnes que vous connaissez, quitte à leur dire de prendre patience. L'enjeu vaut de vous demander cette patience, l'enjeu de ce dossier vaut la peine qu'on n'aille pas créer un lotissement qui foutrait tout en l'air s'il devait se réaliser. Voilà, Monsieur le Ministre, l'espoir que j'ai et que d'autres ont également en vous interpellant aujourd'hui.

Mme la Présidente. En fait, vous avez fusionné votre question orale et l'interpellation, c'est bien. M. Senesael a demandé à se joindre à l'interpellation de M. Crucke.
La parole est à M. Senesael.

M. Senesael (PS). Merci à M. Crucke pour son interpellation parce qu'au-delà des clivages politiques, cet enjeu pour la Wallonie picarde peut être d'importance, d'importance capitale, ne fût-ce qu'au niveau historique, au niveau patrimonial, et au niveau aussi de la connaissance de notre territoire. C'est l'asbl Yvo de Lessinis, chargée de l'organisation du chantier de fouilles du site du Blanc Scourchet à Ellezelles qui prépare un dossier de demande d'autorisation de fouilles archéologiques à l'endroit présumé être le lieu d'enfouissement du Trésor des Templiers, d'après le décryptage du texte des Centuries par Rudy Cambier, personnage ô combien attachant comme M. Crucke vient de le rappeler. À côté de cela, Rudy Cambier prépare aussi un dossier de demande de protection du paysage autour du Blanc Scourchet à Ellezelles, point culminant de la description de l'itinéraire emprunté par les Templiers dans les Centuries. Par parenthèse, je suis aussi attaché au dossier des Templiers puisque je suis natif de Saint Léger, la commune des Templiers à Etaimpuis avec un couloir secret qui reliait ou aurait relié l'église des Templiers de St Léger à la cathédrale de Tournai. En tant que professeur d'histoire, j'ai suivi aussi un peu l'itinéraire de ces templiers et à l'instar de mon collègue Jean Luc, j'y suis particulièrement attaché. Au vu des déboires survenus tout récemment,relatifs à la fouille du site à un mauvais endroit, puisje vous demander d'accorder une attention particulière à ces nouveaux dossiers que prépare M. Cambier à destination du SPW DG04 afin de faire enfin la lumière sur cette affaire du trésor. En particulier, j'attire votre attention sur le caractère tout à fait atypique de cette entreprise qui ne s'accommode pas de la marche d'un chantier de fouilles ordinaire, en ce qu'elle nécessite notamment des moyens techniques, électroniques ou magnétiques pour sonder préalablement le sol, ceci au vu des matières incroyablement fragiles recelées dans le sol. Si les retombées culturelles et touristiques engendrées par cette découverte étaient considérables, non pas seulement pour une commune mais pour toute une région, il faut savoir qu'à différents niveaux, elles se sont déjà fait sentir en particulier dans le développement d'un réseau de sentiers de promenades lié aux derniers chemins des Templiers. En effet, Monsieur le Ministre, des organismes publics, associatifs et privés, sont en train de monter ou de concrétiser des projets de voies lentes et durables, directement liés aux recherches de M. Cambier et qui s'inscrivent dans un projet de territoire durable. Je vous sais également sensible à tout ce qui est développement de la mobilité douce et notamment, le RAVeL, pour que vous soyez aussi particulièrement attentif à cette dynamique. Il y a d'un côté la promenade de Moutiers Wodecq, inaugurée en avril dernier, et qui emprunte le même parcours que les Templiers en 1307 d'après les Centuries. Il y a le projet de Sentier Rando des Templiers que prépare actuellement l'Intercommunale IDETA et la Maison du tourisme du Tournaisis, lesquelles prévoient un balisage et une fiche pratique dans le cadre de leur développement des sentiers de randonnée. La randonnée vélo transfrontalière Audenarde-Wodecq, une boucle de 62 kilomètres gérée par l'asbl flamande «Pottelberg» sera inaugurée au printemps prochain. Il y a la deuxième boucle autour de Moutier que les sentiers de grande randonnée inaugureront aussi au printemps prochain, et pour évoquer le secteur privé, il y a enfin le double projet d'Éric Domb relatif au personnage d'Yves de Lessinnes, quinzième prieur de l'Abbaye de Cambron, auteur présumé des «Centuries» entre 1323 et 1328. Il s'agit, d'une part, de l'aménagement d'une voie lente entre Wodecq et Brugelette qui relierait le point culminant décrit dans les Centuries à Wodecq, lieu de résidence de leur auteur, Cambron Casteau, l'actuel Pairi Daiza. Il s'agit,d'autre part, d'un son et lumière sur le site de Cambron Casteau retraçant l'histoire du personnage emblématique d'Yves de Lessines. J'ai voulu ainsi apporter un autre éclairage ou en tout cas complémentaire à l'intervention de notre collègue Jean Luc. Au vu de toutes ces opérations et aménagements, que ceux-ci soient en projet, en cours de réalisation ou déjà réalisés, n'est-il pas temps, Monsieur le Ministre, de mettre enfin les moyens nécessaires et adéquats et j'insiste sur «adéquats» pour percer le mystère du Blanc Scourchet à Ellezelles. Vous sachant tout à fait disponible à notre écoute et aussi favorable au développement de cette région, je vous remercie des réponses positives que vous ne manquerez pas de nous apporter.

Mme la Présidente. La parole est à M. le Ministre Lutgen.

M. Lutgen, Ministre des Travaux publics, de l'Agriculture, de la Ruralité, de la Nature, de la Forêt et du Patrimoine. Merci Madame la Présidente, merci à M. Crucke, à l'excellent M. Crucke pour plagier Daniel Senesael qui a autant de qualités et d'attachement, c'est vrai, l'un comme l'autre, à votre région et même si je ne suis pas né à Moutiers ou dans un couloir reliant une cathédrale à une église en Wallonie picarde, je suis aussi attaché à cette région parce que je trouve qu'elle recèle d'abord de beaucoup trésors sur le plan patrimonial mais qui a aussi une culture d'entreprises, qui est dynamique et qui va de l'avant, et qui a aussi une certaine idée de l'accueil. Je ne peux évidemment que m'en réjouir. Au-delà de tout cela, M. Crucke, vous m'aviez interrogé sur ce sujet. Vous avez, avec beaucoup d'honnêteté, reconnu que nous avions bien pris votre demande en considération. En effet, il est certain qu'il existe un intérêt de ma part. En aucun cas, nous ne voudrions balayer cette demande d'un revers de la main. J'ai évoqué un rapport de mon administration que j'ai effectivement sollicitée après avoir entendu et lu beaucoup de choses dans la presse, parfois sans avoir moi-même l'information au sein de mes services. Différentes questions ont été posées pour essayer d'y voir le plus clair possible dans l'ensemble de ces éléments. Vous avez, avec beaucoup de talent, l'un et l'autre, parcouru l'intérêt sur le plan historique, patrimonial - à vérifier, sur certains points, je le souligne - mais aussi touristique. Bref, le rapport que j'ai sollicité auprès de mon administration nous informe que trois demandes de mise sur liste de sauvegarde et/ou de classement ont été adressées au SPW en date du 27 mars 2008, du 31 mars 2008 et du 23 septembre 2010. Toutes ces requêtes concernent des parcelles différentes. Deux d'entre elles, formulées par les propriétaires euxmêmes, portent notamment sur le classement de parcelles comme sites archéologiques. Malheureusement, ces demandes étaient incomplètes, ce qui a été précisé aux demandeurs qui n'ont pourtant pas donné suite aux sollicitations de mon administration. La troisième demande concerne les cinq nouvelles parcelles qui ont fait l'objet des sondages effectués le 23 novembre dernier. Ces parcelles ne sont pas propriété de la personne qui a introduit la demande. Le courrier adressé par le demandeur à mon administration, ainsi qu'à moi-même, précisait qu'une pétition nous serait envoyée. En effet, le demandeur n'étant pas propriétaire, sa requête doit être appuyée par une pétition qui rassemble la signature de 300 personnes inscrites au registre de la population de la commune où le bien est situé, s'il s'agit d'une commune comptant moins de 5.000 habitants. Je ne vais pas rentrer dans les détails des autres possibilités, c'est la formule la plus classique dans ce genre de situation. Bref, trois demandes ont été introduites, pour trois groupes différents de parcelles d'un même site; deux demandes portaient sur un classement mais étaient incomplètes, la troisième porte une inscription sur la liste de sauvegarde et est relative à un nouveau lot de parcelles. Toutefois, cette demande doit être appuyée par une pétition. Il va de soi que ce dossier a un grand intérêt, je ne dis pas le contraire. J'ai, moi aussi, entendu M. Cambier nous signaler que les fouilles entreprises ne servaient à rien, une autre localisation étant plus opportune. Je veux simplement indiquer qu'en ce qui concerne les fouilles, une demande d'autorisation a bien été introduite en 2001 par une asbl, qui n'est pas celle qu'on cite habituellement. Cette demande était incomplète, d'après les informations qui me sont revenues de l'administration. Sur cette base, mon prédécesseur a signé un arrêté ministériel de refus. L'asbl a introduit une requête en annulation, mais s'est finalement désistée. Concernant les recherches pratiquées par la société anglaise, dont on parlait tout à l'heure, à ma connaissance, et celle de mon administration, nous n'avons jamais reçu les rapports. Je vous fais part de ce que l'administration m'affirme officiellement et jusqu'à preuve du contraire, il n'y a pas de raison de ne pas lui faire confiance. Que ce soit en 2001, date de la première demande d'autorisation de fouilles, avant ou après cette première demande, nous n'avons donc pas les rapports en question. J'en viens maintenant aux sondages effectués par les services d'archéologie le 23 novembre dernier. La parcelle sondée a fait l'objet, d'une part, d'une demande de lotissement par son propriétaire, et d'autre part, d'une demande - comme vous le savez - d'inscription et donc, d'un éventuel classement pour intérêt historique et paysager, puisque les deux peuvent intervenir. Je ne vais pas reprendre vos propos sur ce sujet. L'objectif des sondages était de vérifier le potentiel archéologique en vue d'argumenter les deux demandes. Il est logique de vérifier ces éléments. Cette intervention consistait en 13 tranchées de 2 mètres de large sur 40 mètres de long, 60 centimètres de profondeur et distantes de 10 mètres chacune. Ce sont donc plus de 600 mètres cubes de terre qui ont fait l'objet de ce sondage. Deux sondages de 1,5 mètre de profondeur ont également été réalisés en vue d'une étude géologique. Aucun vestige n'a été trouvé, le terrain a été remis en état. Cette intervention s'inscrivait dans une démarche d'archéologie préventive, dont les priorités sont établies en fonction de la nécessité de libérer de toute contrainte archéologique des terrains à aménager. C'était bien l'objet de la demande. La demande ne portait pas sur autre chose que cela. Nous avons donc répondu et les choses ont été exécutées très rapidement, à partir du moment où l'information m'est revenue, et vous y avez contribué. Quant à savoir si rien n'a pu être trouvé dans ces parcelles, dois-je rappeler que ces deux demandes de classement introduites en 2008 concernaient une reconnaissance de parcelle comme site archéologique, j'insiste une deuxième fois sur ce point. Il me semble pouvoir dire que les services de l'archéologie ont rempli leur mission légale en matière d'archéologie préventive, mais ont également fait preuve de proactivité ces derniers mois et ces dernières semaines sur ce dossier. Compte tenu des précédentes demandes de fouille et de classement de certaines parcelles du site comme site archéologique, d'aucuns auraient pu faire le reproche de ne pas avoir effectué ces sondages. La moindre des choses était de le faire. Concernant l'autorisation de fouilles sollicitée par M. Rudy Cambier qui dispose, au sein de son asbl, d'archéologues et d'un équipement important, un courrier lui a été adressé, le 24 novembre dernier, par les services de l'archéologie. C'est moi qui ai demandé à mon administration d'écrire à M.Cambier pour lui expliquer les prescrits du CWATUP - auxquels vous avez d'ailleursfait référence dans votre interpellation - pour éviter toute mauvaise compréhension. Je comprends l'intérêt qui est le vôtre pour ce dossier et je le respecte parfaitement, mais il y a des procédures à respecter, qu'on se trouve à Ellezelles, à Arlon ou à Verviers. Je crois que tout le monde peut le comprendre. Une demande doit donc être réalisée en bonne et due forme. On a rappelé, malgré les années qui se sont écoulées pendant lesquelles il n'y a pas eu de demande - ce dossier étant en cours depuis 2001 - à M. Cambier l'ensemble des obligations qui existent, et elles ne sont pas non plus démesurées, pour pouvoir sonder dans les endroits qu'il considère comme les terrains les plus intéressants. C'est l'objet du courrier adressé par mon administration. Je la remercie d'ailleurs d'avoir envoyé les différents éléments pour que, non seulement, la procédure soit bien comprise, mais pour que l'administration et in fine moi-même puissions être sollicités et se prononcer. Je rappelle aussi que M. Cambier a quand même à sa disposition des gens de talents, dont vous MM. Senesael et Crucke, pour l'aider, le cas échéant, à rédiger les différents éléments. Je crois qu'il a aussi, autour de lui, dans son équipe, les outils à la fois intellectuels et matériels nécessaires pour pouvoir remplir et faire une demande en bonne et due forme. C'est donc sur base d'une demande que je pourrai - je l'avais d'ailleurs dit en aparté - prendre une décision. Sur base de cette demande, l'avis de l'administration sera sollicité, puis, je remettrai une décision. Je ne peux pas, comme cela, d'autorité - d'aucuns le voudraient parfois, mais beaucoup me le reprocheraient- décider qu'on vienne fouiller dans un jardin ou dans un autre. D'un coup de baguette magique, je pourrais alors aller voir dans le jardin de M. Senesael voir ce qu'on pourrait y trouver comme trésor, dossiers ou autres archives. Je dis cela par boutade, mais vous comprenez bien qu'il est normal de suivre les procédures et les respecter. Elles n'ont pas été imaginées pour rien. Il y a des raisons à tout cela même si je ne vais pas reprendre l'ensemble des éléments. C'est d'ailleurs M. Demurger, dans la préface de la réédition de son ouvrage consacré aux Templiers, qui disait: « L'histoire n'est pas figée, elle n'est pas non plus un éternel recommencement, elle fait son chemin, voilà tout». C'est une très belle phrase, cela permet d'être acteur de cette histoire, à condition de pouvoir, au travers de demandes, vérifier l'ensemble des éléments. Je ne suis pas resté les bras croisés puisqu'il y a deux éléments qui ont été réalisés depuis qu'on a eu le plaisir de parler de ce dossier. Les fouilles devaient être réalisées, une demande préventive ayant été clairement déposée sur le site dit archéologique. Cela a donc été fait. J'entends bien qu'il était prévisible de ne rien trouver mais je rappelle qu'il s'agissait de fouilles préventives, leur nom dit bien ce que cela veut dire. Par ailleurs, sur les autres parcelles, j'ai dit à mon administration de ne pas attendre que M. Cambier écrive pour lui expliquer les démarches qu'il doit suivre pour, le plus rapidement possible, solliciter une demande. Nous pourrons donc regarder l'ensemble des éléments à l'aune de ce qu'on pourrait, une fois qu'une décision sera prise, rencontrer sur le site. Voilà ce que je peux vous dire aujourd'hui et qui démontre combien il y a eu proactivité en la matière. L'intérêt réel mais il faut respecter les démarches dans toute demande et il n'y a pas lieu de faire exception dans le cas présent. Je compte continuer à faire preuve de réactivité et de proactivité au vu des délais et des enjeux. On continuera de la sorte tout comme mon administration, j'y veillerai. De toute façon, si je n'y veillais pas, je suis certain que, l'un comme l'autre, vous reviendriez en vue d'attirer mon attention sur une éventuelle absence de décision. Il nous faudra, néanmoins, le temps d'étudier le dossier et l'ensemble des éléments y afférant. Quoi qu'il en soit, la procédure a été réexpliquée le 23 novembre dernier. Je ne souhaite qu'une chose, c'est qu'une demande puisse être déposée dans les meilleurs délais par les intéressés et qu'on puisse prendre une décision très rapidement vu les enjeux très importants. Vous l'avez relayé avec une force extraordinaire, et je vous rends hommage en le disant. Désormais, mettez tous les moyens possibles pour faire en sorte que la demande rentre le plus vite possible. Chaque jour qui s'écoule depuis le 23 novembre dernier est un jour perdu. Je ne voudrais pas non plus qu'après, on me reproche de prendre trop de temps pour donner ma décision. Maintenant, cela fait déjà 15 jours que le courrier a été envoyé et, sauf erreur de ma part, - la demande ayant éventuellement pu rentrer ce matin à l'administration -, il n'y a pas eu de demande introduite à ce jour. En outre, au-delà du courrier, cela fait maintenant neuf ans qu'une première demande a été formulée. En toute hypothèse, mais c'est une autre discussion que nous devrions avoir. Quoi qu'il arrive, croyez bien que j'y serai attentif, vous l'avez bien compris au travers de mes propos. Sans tomber dans la passion qui l'emporterait, il nous faut aussi garder de la raison par rapport à un dossier comme celui-là, et rester rationnel. Avec la passion qui est la vôtre, et que je peux partager par rapport à une valorisation à la fois historique, littéraire et paysagère de cette zone, je crois que cela vaut la peine qu'on en reparle avec les différents acteurs concernés que ce soient les historiens, les archéologues, les opérateurs touristiques ou encore les communes concernées - elles sont nombreuses, puisqu'elles sont traversées par différents chemins -, afin de partager les points de vue. Nous devrions aussi y associer le Ministre Furlan car ce dossier présente indéniablement un axe patrimoinetourisme. Cette discussion peut venir in fine en raison de toute cette richesse patrimoniale, y compris en dehors du trésor des Templiers, puisque c'est toute cette zone qui a un riche passé. Partant de cela, et comme je vous le dis, c'est une discussion qui viendra en toute hypothèse par la suite, quel que soit le résultat des demandes. Et quoi qu'il en soit, j'espère que la demande viendra le plus vite possible. Quand on a consacré autant de temps à des recherches en information et qu'on est persuadé et convaincu que cet endroit recèle de trésors patrimoniaux, quels qu'ils soient, je trouve qu'il y a une responsabilité à introduire une demande. Je ne peux pas le faire à la place de qui que ce soit, tout le monde l'aura bien compris. Dès lors, que chacun prenne les contacts nécessaires, et je vous y invite, pour soutenir, le cas échéant, l'introduction de cette demande au niveau de la procédure et de la légalité par la ou les personnes concernées. J'aurai aussi une attention toute particulière par rapport à ce site.

Mme la Présidente. La parole est à M. Crucke.

M. Crucke (MR). Je veux sincèrement remercier le ministre pour sa réponse. Tout ce qu'il a dit sur le plan administratif est parfaitement correct et exact, conforme à la réalité. Il y a effectivement eu trois demandes, deux qui ont été jugées incomplètes et l'une qui visait des fouilles préventives même si on sait que ce n'est pas là qu'il fallait fouiller. Vous l'avez expliqué et je n'ai rien à redire par rapport à ces éléments. Je suis heureux d'avoir mené mon interpellation en collaboration avec M. Senesael. J'ai l'impression que c'est la preuve de l'efficacité d'une devise que connaît encore ce pays, à savoir « L'union fait la force». Avec votre aide, ce sera une union encore plus intéressante. Aujourd'hui, vous avez commencé par nous rappeler une vérité administrato-historique puisque c'est la réponse que vous deviez donner, ce n'est pas un reproche que je vous fais. Toutefois, deux éléments importants doivent être retenus dans ce dossier à l'heure actuelle.
Premièrement, nous devrons pouvoir, ne fut-ce que pour une période limitée dans le temps, neutraliser la demande de lotissement et deuxièmement, il s'agira d'effectuer des fouilles chez M. Cambier. Pour information, sachez qu'une demande vous a été adressée hier mais il est normal que vous n'en ayez pas encore eu connaissance. Ils ont essayé d'introduire leur demande dans les règles, deux demandes préalables ayant été jugées incomplètes. Tout cela prend donc un peu de temps et ne peut se faire en 24 heures.

M. Lutgen, Ministre des Travaux publics, de l'Agriculture, de la Ruralité, de la Nature, de la Forêt et du Patrimoine. Madame la Présidente, puis-je ajouter quelques compléments d'information?

Mme la Présidente. Je vous en prie.

M. Lutgen, Ministre des Travaux publics, de l'Agriculture, de la Ruralité, de la Nature, de la Forêt et du Patrimoine. Je vous en remercie. Soyons bien d'accord, l'un est lié à l'autre. Nous n'allons pas bloquer un lotissement si on constate finalement qu'il n'y a pas de vestiges sur le terrain, au-delà des fouilles qui pourraient être réalisées en fonction de la demande qui serait faite. L'un est quand même lié à l'autre.

M. Crucke (MR). Nous sommes bien d'accord que l'un est lié à l'autre. C'est bien pour cela que je vous demande un délai par rapport au lotissement. Je réclame ici un délai de suspension par rapport à cette demande et non pas une condamnation. Je pense que l'intérêt du dossier vaut la peine de suspendre quelque peu la demande relative au lotissement. Par ailleurs, la demande par rapport aux fouilles vous ayant été adressée hier, vous pourrez bientôt en prendre connaissance. Je vais aller plus loin dans mon raisonnement car votre réponse permet réellement d'aller jusqu'au bout du dossier. Je resterai donc attentif même s'il ne sert à rien de revenir tous les quinze jours en vous posant une question sur le sujet. Dès lors, je pense donc qu'il faut, premièrement, neutraliser la demande relative au lotissement et deuxièmement, effectuer les fouilles sur les parcelles désignées par M. Cambier. La demande vous ayant été adressée, j'aimerais savoir dans quelle mesure, Monsieur le Ministre, il ne serait pas intéressant que votre cabinet ou l'administration soit encore plus pro-actif et aide M. Cambier en lui indiquant ce qui doit être ajouté pour être complet et qu'on ne passe pas son temps entre des courriers envoyés et retournés, et qu'au bout du compte, on n'avance pas. Si votre cabinet ou votre administration pouvait apporter une aide pour compléter cette demande, ce serait une bonne chose. Si l'administration pouvait jouer un rôle actif dans la demande, ce serait des plus opportuns. Je m'engage également, dans la mesure où cette demande vous est arrivée, à réunir les Bourgmestres locaux impliqués tout comme les autres acteurs comme vous-même, Daniel Senesael qui m'a fait le plaisir d'intervenir aujourd'hui et des représentants de l'administration. Il s'agira de mettre tout le monde autour de la table et pour mieux « dépatouiller» le dossier au-delà des coups de téléphone et des
contacts informels. Je m'engage à le faire avant la fin de l'année ou au plus tard, au début de l'année prochaine, chacun ayant des agendas qu'il faut pouvoir respecter. Vous pouvez venir aussi, Monsieur le Ministre, et vous verrez que c'est un très beau coin où il y a plein de choses à faire. Pour votre campagne électorale, ce n'est pas inintéressant que vous veniez un peu dans les collines vous montrer. Je vous adresserai donc l'invitation, vous en ferez ce que vous voulez, et je le ferai également à l'égard du Ministre Furlan.

Mme la Présidente. La parole est à M. Senesael.

M. Senesael (PS). Tout d'abord, je vous remercie, Monsieur le Ministre, de ne pas avoir considéré les différentes demandes qui vous ont été adressées comme farfelues ou fantaisistes. Deuxièmement, je suis tout à fait d'accord avec vous pour respecter les démarches administratives indispensables dans ce dossier. Il faut absolument que les demandes parviennent en bonne et due forme. Par rapport à la proposition de M. Crucke, je ne peux qu'appuyer cette initiative. A cet égard, j'ajouterai qu'IDETA est le promoteur du tourisme dans la Wallonie picarde et qu'il peut donc aussi aider à mettre le dossier en place s'il le fallait. J'insisterai aussi de mon côté, on n'est jamais de trop. Troisièmement, je crois que Monsieur le Ministre a mis le doigt sur quelque chose de nouveau qui me paraît pertinent. En effet, si le dossier administratif doit être introduit en bonne et due forme et qu'il faut répondre à la demande de M. Crucke de geler, pendant une période déterminée, la demande relative au lotissement pour permettre aux fouilles d'être effectuées, il importe aussi de ne pas négliger la valorisation du patrimoine de cette zone et ce, en collaboration avec le Ministre Furlan. Je pense qu'on a parlé à un certain moment d'un rayonnement sur notre région avec les iguanodons de Bernissart, à la même enseigne, on peut se dire qu'il y a ici des niches de patrimoine et de tourisme, qui pourraient être développées et avoir un impact sur le développement économique de notre région, ce qui n'est jamais à sous-estimer.

mercredi 14 décembre 2005

Question orale de Jean-Luc CRUCKE au Ministre André ANTOINE sur "Avenir du football en Communauté française après le vote de la FIFA"

M. Jean-Luc Crucke (MR). – Monsieur le ministre, à l’issue du vote intervention à Zurich le 2 décembre dernier, vous avez déclaré : « c’est la victoire de la géopolitique et de l’argent. » En même temps vous avez ajouté souhaiter qu’une dynamique se développe en Communauté française
autour du football. Avec quelques jours de recul, maintenez-vous votre sentiment ? Pensez-vous encore que tout a été fait pour arriver à obtenir l’organisation mais que d’autres valeurs que celles généralement revendiquées dans le sport ont présidé à cette décision? Mais oublions le passé et tournons-nous vers l’avenir. Comment faire en sorte que cet échec ne constitue pas un frein mais un tremplin pour redynamiser un football belge qui va inévitablement connaître des changements à cause de la communautarisation ? Quels seront les prochains défis à relever ? Y aura-t-il des modifications structurelles dans l’administration ? Par ailleurs, un groupe d’experts serait chargé d’établir un rapport sur la situation du football en Wallonie et en Communauté française. Quand sera-t-il désigné ? Quelle sera sa composition ? Dans quel délai devra-t-il remettre son rapport ?

M. Pierre Migisha
(cdH). – Monsieur le ministre, nous savons que la Belgique et les Pays-Bas n’organiseront pas la coupe du monde de football en 2018. Le comité exécutif de la Fifa a choisi la
Russie dans des conditions qui suscitent de nombreuses interrogations que je n’aborderai pas ici. L’organisation de la Coupe du monde aurait inévitablement eu des retombées positives pour la promotion du sport en Communauté française. J’aimerais aujourd’hui voir avec vous comment envisager une telle promotion sans l’organisation de cette coupe du monde. Monsieur le ministre, quels enseignements tirez-vous de l’échec de notre candidature ? L’organisation de cette coupe aurait certainement généré de l’engouement pour la pratique sportive en Communauté française. Dès lors, quelles initiatives de promotion du sport, imaginées dans le cadre de l’organisation de cette coupe, pourraient-ellesêtre malgré tout intégrées à la politique de la Communauté française ? Envisagez-vous des actions alternatives pour la promotion du sport et, plus particulièrement, du football, sachant la future communautarisation de celui-ci ? À plus long terme, vous souhaitiez disposer d’un rapport complet sur le football francophone afin de clarifier de quelle manière réaliser cette communautarisation et envisager le développement du football.

M. Philippe Dodrimont (MR). – Pour ma part, j’insisterai sur le fait que pratiquement aucun stade belge n’est conforme aux réglementations, notamment pour la sécurité. Beaucoup de procèsverbaux ont été rédigés à ce sujet. Des amendes pendent parfois, telles l’épée de Damoclès, audessus de la tête des dirigeants de clubs. Il faut prendre des décisions. Certains, dont le Standard de Liège, attendaient sans doute la décision de la Fifa avant de choisir dans quelle direction avancer. D’après les dirigeants de ce club, une réunion devrait se tenir ce jeudi 16 décembre entre les parties intéressées à financer l’agrandissement du stade. Monsieur le ministre, assisterez-vous à cette réunion ou y serez-vous représenté ? Quelle aide la Communauté française pourrait-elle accorder ? Ce dossier va probablement passer du secteur public au secteur privé. Leurs vues semblent divergentes et le fait de ne pas organiser la coupe du monde change peut-être la donne. Un autre point problématique concerne les sites d’entraînement. Y a-t-il des projets d’amélioration de ce type d’infrastructure, à côté des stades qui accueillent les compétitions ? Il serait intéressant de faire le point sur ce dossier, à l’heure où la Communauté française se prépare à accueillir la fédération.

M. André Antoine, vice-président et ministre du Budget, des Finances et des Sports. – Toutes ces questions concernent la Région wallonne et la Communauté française puisqu’elles portent sur
l’infrastructure et la politique sportive. Ne m’en veuillez donc pas, monsieur le président, si je franchis parfois le Rubicon. Je sais que certains n’apprécieront pas mais, si je ne le faisais pas, ma
réponse ne serait pas complète. Je me réjouis de la prise de position de MM. Crucke, Dodrimont et Migisha, que je connaissais déjà ; leur attitude tranche quelque peu avec celle de Mme Cornet qui considérait, notamment dans le débat sur l’emploi, que l’on investissait trop dans le sport au détriment d’autres domaines. Chacun apprécie à l’aune de ses préoccupations. Oui, nous sommes déçus par le choix de la Fifa, moins parce que nous ne sommes pas retenus qu’en raison du fait que la décision finale ne remplit pas les critères fixés préalablement. Ainsi, la Russie ne méritait pas de cotation positive ni sur le critère écologique – c’était un des paramètres essentiels –, ni sur celui de la mobilité et du transport, ni pour la disponibilité des stades. Or la Russie a été retenue...
Le Qatar est un pays extrêmement important, on le sait, mais comme le disait Beckenbauer, « on devra probablement jouer en janvier, si l’on veut une température supportable pour les joueurs ». Tout cela – et qui suis-je pour le dire – laisse tout de même un sentiment d’amertume et l’impression que les dés étaient pipés. En effet, notre préparation basée sur le respect du cahier des charges ne nous a pas servis. Pour répondre à une question fréquemment posée, la Communauté française a engagé 600 000 euros. Cette somme faisait partie du budget de 10 millions d’euros élaboré par la fondation commune Pays-Bas et Belgique. Sur ces 10 millions, 2835 000 étaient à charge de notre pays. C’est pour cette somme que nous avons réservés les 600 000 euros. LaWallonie n’a rien payé puisqu’il appartient à la Communauté française d’assumer la politique sportive. Je voudrais saluer l’engagement total de Alain Courtois dans ce dossier. Il a accompli un travail remarquable, de même que les premiers ministres successifs, MM. Leterme et Van Rompuy. Rarement une cause aura été aussi bien défendue. Pardelà la frontière linguistique et le clivage entre majorité et opposition, nous avons connu une véritable union nationale, qui nous fait tellement défaut actuellement. Pour ce qui est de l’intervention des uns et des autres, monsieur Migisha, vous aurez remarqué que la Communauté française a eu sa part de remerciements puisque nous avons correctement rempli notre rôle, en dégageant les moyens et en créant des contacts, notamment à travers la francophonie, pour soutenir notre candidature. Se pose toutefois la question des stades. Comme je l’ai souvent indiqué, le fait que nous organisions ou non le Mondial ne change rien à la nécessité de prévoir des stades, au moins deux. À Charleroi, il n’y a plus de permis. Le dernier que j’ai délivré a été invalidé par le Conseil d’État. De plus, une série d’actions engagées par les riverains devant plusieurs tribunaux civils visent à obtenir une astreinte en cas d’utilisation future du Stade du pays de Charleroi. Toutes ces actions s’exercent à des niveaux différents, mais si des décisions devaient tomber, nous risquerions de connaître des situations particulièrement fâcheuses. Il faut donc reconstruire ce stade. Quant au stade du Standard à Sclessin, nous devons assurer sa mise en conformité avec les normes UEFA et trouver une solution aux difficultés de parking. Il faudra également améliorer la capacité de ce stade, sachant que le Mondial a modifié la donne. Il ne s’agit plus en effet de construire deux stades de quarante mille personnes. À Charleroi, avec un stade qui en accueille moins de la moitié, on devrait pouvoir faire correctement face aux besoins du club. Pour le Standard il s’agit d’une tout autre capacité d’accueil. Finalement, nous nous rapprocherons du dispositif prévu pour le Mondial. Pour ce faire, le 19 décembre 2009, le gouvernement a dégagé deux fois dix millions d’euros qui constituent une première tranche de subventions. Je rappelle que, du côté flamand, il était question d’un prêt et non d’une subvention. Nous sommes évidemment attentifs à l’évolution de ces dossiers. Nous sommes disposés, le cas échéant, à dégager des enveloppes complémentaires, mais les pouvoirs locaux, qu’il s’agisse de villes, d’agglomérations, de communautés de communes, de provinces ou d’intercommunales, et le club luimême devront également intervenir. Les clubs devront marquer leur accord de seengager à intervenir financièrement et, pour Charleroi, de jouer dans ce stade. Ce n’est pas le cas actuellement puisque M. Bayat s’est plaint de ne pas avoir été associé au projet d’aménagement du stade de la Ville de Charleroi. La Communauté française interviendra très clairement. Pour cette décennie, la Région wallonne a engagé en fin de compte cent vingt millions d’euros. En effet, outre les deux clubs phares, il faut aussi veiller aux besoins des clubs de D1, de D2, de divisions provinciales ou de promotion. La somme est à ce point importante que nos amis flamands se sont plaints de concurrence déloyale. Je rappelle que le football n’étant pas communautarisé du côté néerlandophone, le gouvernement flamand ne peut intervenir. Nous nous montrerons disponibles, je le répète, et nous participerons à toutes les réunions de concertation à l’invitation des clubs, des villes ou des intercommunales. L’essentiel est que nous progressions rapidement afin de doter ces deux villes des installations dont elles ont besoin. En vue de la communautarisation du football au 1er janvier, nous créons actuellement une fédération francophone, à savoir l’Association des clubs francophones de football. Quelques changements seront opérés car le président a récemment démissionné. J’ai demandé à un groupe de spécialistes du football, notamment de la formation, qu’il définisse une méthode de travail. J’en aurai connaissance la semaine prochaine. Lorsqu’elle aura été approuvée, nous révélerons les noms des personnes concernées. Leur mission devrait débuter le 1er janvier 2011 pour une durée de six mois. L’objectif sera de rencontrer l’ensemble des clubs, des provinciales à la division 1, d’entendre les dirigeants, de dresser un plan de formations et de débattre d’autres questions avec les clubs, comme la loi « football » pour la division 2, les volets fiscaux et sociaux, les infrastructures, l’emploi optimal des pelouses synthétiques, qui pourraient le cas échéant être partagées.
Ce travail devra alimenter, en concertation avec la Fédération francophone et l’Union belge de football, la politique que nous souhaitons mener, sachant qu’environ 2,5 millions d’euros supplémentaires sont affectés au football en Communauté française. Cette démarche nous permettra aussi d’insister sur la formation des jeunes et des formateurs dans les provinces. L’attente est grande dans ce domaine, car la communautarisation du football est vécue comme une chance et non comme une fatalité. Beaucoup espèrent, à travers cette fédération et les moyens supplémentaires qui ont été dégagés, améliorer l’environnement footballistique, surtout celui des plus jeunes. Ainsi, nous pourrions soutenir et agréer des écoles de football. Nous en comptons déjà
quelques-unes qui sont remarquables : l’Académie Robert Louis-Dreyfus à Liège, le complexe de Marcinelle, le Futurosport de Mouscron, le Centre national Euro 2000 à Tubize, le Cref de Blegny, etc. Avec la fédération, je souhaiterais soutenir ces installations comme centres de référence, sachant que nous ne pourrons pas les multiplier à l’infini. Nous voulons donc investir dans la formation. L’Académie des administrateurs de clubs permettra à ceux-ci de mieux se préparer et de mieux connaître les législations communautaires et fédérales, notamment sur l’application de la TVA, le statut des bénévoles ou les transferts. Un service d’appui sera créé pour répondre aux questions pointues portant sur la fiscalité, les aspects sociaux ou les cadres légaux. Nous souhaitons donc améliorer la gestion de nos clubs, au-delà de la formation des jeunes et des formateurs. Une formation destinée aux entraîneurs a d’ailleurs été inscrite au budget, ce qui n’était plus arrivé depuis une vingtaine d’années. Après la déception née de la non-organisation de la Coupe du monde et avec la communautarisation du football, le moment est venu de réagir. Nous avons besoin de stades et de formations, d’autant plus que le football francophone connaît un renouveau indiscutable, même si nos clubs rencontrent parfois quelques difficultés. Songeons aux nombreux joueurs francophones qui évoluent au plus haut niveau. Nous pourrions presque créer une équipe nationale francophone ! Citons Axel Witsel au Standard, David Hubert à Genk, Lukaku à Anderlecht, Jérémy Serwy à Charleroi, Christian Benteke à Malines, Eden Hazard en France, Kevin Mirallas en Grèce, sans oublier Vincent Kompany ou Legear. Le football, comme les autres disciplines, a besoin de références, de véritables vedettes qui suscitent l’enthousiasme et fassent des adeptes. Lukaku a reçu le prix du Mérite sportif de la Communauté française comme meilleur jeune espoir. À son âge il figure déjà dans le onze de base de l’équipe Europe et c’est pour lui une véritable consécration. Nous devons profiter de cette génération pour susciter des vocations dans son sillage et pour offrir de nouvelles structures d’accompagnement. Dans cette optique, l’initiative « mon club, mon école » en amenant le foot dans les écoles vise à sensibiliser les filles et les garçons à cette discipline, à leur assurer une bonne formation et à détecter les talents. Dès que les groupes d’experts seront désignés, je serai heureux de les inviter en commission afin qu’ils puissent exposer leurs intentions et vous écouter. En plus des clubs, fédérations et ententes provinciales, j’estime que le monde politique a également le droit d’exprimer ses souhaits et ses doléances. Les experts seront choisis dans toute la Wallonie afin que toutes les sensibilités du foot soient représentées. Lorsque le rapport issu de leur collaboration sera rédigé, je vous en présenterai les conclusions.

M. Jean-Luc Crucke (MR). – Je vous suggère d’injecter plus d’argent dans le sport et vous donnerez alors satisfaction à vos détracteurs. À propos des événements de Zurich, je trouve naïf de croire que seul un cahier des charges, aussi intéressant soit-il sur le plan environnemental par exemple, suffise pour emporter l’adhésion.

M. André Antoine, vice-président et ministre du Budget, des Finances et des Sports. – La plus grosse surprise a été que l’Angleterre annoncée comme gagnante soit éliminée dès le premier vote. Probablement que la campagne qu’elle a menée avec certains journaux britanniques s’est retournée contre elle. Nous avons adopté un profil juste, mais nous ne pouvions l’emporter que si les grandes nations entraient en conflit, ce qui n’a pas été le cas. Impossible de faire face au poids de la Russie.

M. Jean-Luc Crucke (MR). – Il faut envisager l’avenir. Je trouve vos propositions sur le groupe d’experts intéressantes. Il faut oser envisager une collaboration entre les clubs, sans aller jusqu’à leur fusion, ce qui toucherait à des habitudes parfois ancestrales. La plupart des petits clubs en province ont du mal à survivre et un changement d’attitude leur serait bénéfique. Un groupe d’experts aurait la latitude d’aborder ce type de question et de briser certains tabous dans le monde du foot. Enfin, le monde du football doit être conscient qu’il a tourné une page. Auparavant, il avait tendance à jouer uniquement dans des structures privées où les politiques étaient juste des supporters, aujourd’hui les secteurs privé et public se trouvent associés dans la réflexion qui est menée. Les deux devront fonctionner ensemble.

M. Pierre Migisha
(cdH). – Étant donné l’importance du budget que notre Communauté avait prévu pour la candidature de la Belgique, nous étions en droit d’attendre une réaction de votre part suite à la décision qui a été prise. Vous nous avez fait part de votre déception et de votre surprise. Il est vrai que nous y avons cru jusqu’au dernier moment. À présent, nous devons aller de l’avant. J’ai
relevé dans votre réponse quelques éléments qui m’ont plu. Tout d’abord, l’engouement. Pas d’événement en 2018, mais il faut continuer à soutenir le mieux possible la politique du football de manière générale en fonction des moyens de la Communauté française. Vous avez parlé des joueurs qui sont, qu’on le veuille ou non, les premiers à pouvoir donner envie aux jeunes de pratiquer ce sport, si possible dans de bonnes conditions. Ensuite, vous avez souligné que seuls Charleroi et Liège disposent d’infrastructures qui soient dignes de ce nom. Je souhaiterais néanmoins attirer votre attention sur l’implication possible de l’État fédéral à ce niveau. Je me souviens du montant versé par la Loterie nationale à l’occasion de l’Euro 2000. On pourrait envisager qu’il puisse, par ce même biais, participer à la rénovation ou à la reconstruction des stades en Belgique de manière équitable selon les Régions. Enfin, j’insiste sur le travail à réaliser dans le domaine de la formation des jeunes et des formateurs. Nous pourrons ainsi participer au développement de notre football.

M. Philippe Dodrimont (MR). – Je me réjouis, monsieur le ministre, que vous ayez également abordé les infrastructures sportives des plus petits clubs. Nous avons besoin de vitrines pour un sport comme le football, mais également de travail en profondeur. Il est donc important de penser aux petites infrastructures. Vous avez dit, mais j’espère que ce ne sera jamais qu’une fiction, que nous pourrions avoir une équipe uniquement composée de francophones. C’est sûr, mais pensons au désastre que causerait une scission du championnat belge. Il serait très difficile d’en proposer un de qualité dans ces conditions. C’est valable à tous les niveaux, tant au niveau sportif qu’au niveau des infrastructures. Associer des clubs de division II et de division III, voire de promotion, pour faire un championnat d’élite au niveau de la Communauté française ne serait pas souhaitable. Je me réjouis également de l’attention que vous accordez aux infrastructures du Standard. Nous avons besoin de ce club « phare » qui joue chaque semaine devant un public de près de vingt mille personnes et qui mériterait de disposer d’équipements plus importants.

Question orale de Jean-Luc CRUCKE au Ministre André ANTOINE sur "Soutien de la Communauté française à Axel Zebroeck"

M. Jean-Luc Crucke (MR). – Axel Zeebroek a réussi la plus belle performance de sa carrière en terminant quatrième de l’Iron Man de Cozumel au Mexique. Il s’agit d’une épreuve composée de 3,8 km de natation, de 180 km à vélo et d’un marathon de 42 km. Il n’a fini qu’à douze minutes du vainqueur dans un temps qui permet d’envisager avec beaucoup d’espoir la suite de sa carrière. En effet, le triathlon est un sport d’endurance dans lequel les sportifs atteint son apogée vers trente-six ou trente-sept ans. Axel Zeebroek fait donc partie de ceux qui pourraient décrocher le Graal : l’Iron Man d’Hawaï. J’ai fait des bonds de joie en apprenant cette performance d’un Wallon. J’ai toutefois dû déchanter quelque peu puisque, selon la presse, « la Communauté française lui aurait coupé les vivres ». Est-ce effectivement le cas ? Si c’est vrai, je n’y comprends plus rien. Voilà en effet un athlète qui est à l’apogée de la maîtrise d’un sport extrêmement difficile qui nécessite de s’y consacrer à plein temps. La décision qu’aurait prise la Communauté pourrait-elle être revue à la suite de cette performance ? Enfin, pourquoi le triathlon n’est-il pas sport olympique ? Est-ce pour des raisons d’organisation ? Ou la demande n’a-t-elle jamais été faite au CIO ?

M. André Antoine, vice-président et ministre du Budget, des Finances et des Sports. – Monsieur Crucke, je vous remercie d’avoir utilisé le conditionnel et de porter un intérêt évident à la politique de soutien aux sportifs de la Communauté française. Celle-ci leur offre en effet des contrats professionnels. Leur nombre est passé de vingt-trois à cinquante-deux et il dépassera septante l’année prochaine, après l’engagement des coureurs de l’équipe cycliste. Le cas d’Axel Zeebroek illustre à souhait cette action vieille de plusieurs années qui permet de soutenir des athlètes de haut niveau. J’ai lu avec beaucoup de satisfaction ce qu’Axel Zeebroeck a publié sur son propre site: « En effet, après dix années de bons et loyaux services à la Communauté française, mon contrat prendra fin ce 31 décembre. Je remercie au passage toute l’équipe de la cellule haut niveau de l’Adeps pour leur soutien tout au long de ces années. Les JO, c’est un peu grâce à eux également. » Axel Zeebroek a fait partie des premiers bénéficiaires des contrats de sportif de haut niveau de la Communauté français, il y a une dizaine d’années. Dès 2003, il a pu s’entraîner et jouir des services réservés aux élites : contrat, aide individuelle pour les stages et les compétitions, aide médicale et psychologique. Depuis plusieurs années, il dispose également du soutien de la cellule Ariane pour assurer sa fin de carrière. Comme vous l’avez souligné, en triathlon, l’âge de la maturité est aux environ de 36 ou 37 ans. Né en juillet 1978, cet athlète, âgé de 32 ans, peut encore progresser. Nous n’avons jamais hésité à le soutenir mais, cette année, il a décidé de briguer un contrat privé dans une équipe professionnelle, attirée par ses performances et sa constante évolution. Un triathlète, qui a choisi d’évoluer dans des compétitions non olympiques mais néanmoins prestigieuses comme l’Ironman d’Hawaï, ne pouvait rêver mieux. Le parcours de ce sportif est remarquable. Déjà en 1998, il a été champion de Belgique en catégorie junior. En 2008, aux Jeux Olympiques à Pékin, il s’est classé treizième sur les distances olympiques – natation, 1 500 m; vélo, 40 km et course à pied, 10 km. Depuis lors, il a choisi de se consacrer aux longues distances : 3 800 mètres en natation ; 100 km en vélo, et 42 km de marathon. Les contrats et le soutien de la Communauté française lui ont permis d’atteindre les performances que vous avez mentionnées. Il a l’occasion d’évoluer dans une équipe professionnelle et n’a pas hésité un seul instant. Il n’y a donc absolument pas eu de mesure de disgrâce de notre part. D’ailleurs, il remercie notre Communauté et son administration sur son site. Il n’aura donc plus de contrat avec la Communauté française mais nous sommes fiers, notamment la cellule d’évaluation des performances sportives, d’avoir pu contribuer à sa formation et de l’avoir amené à ce haut niveau de compétition. Par ailleurs, la relève se prépare déjà puisque la Communauté française a accordé un statut d’espoir sportif à sept jeunes : Régis Bader, Paul Bara, Christophe Dekeyser, Norman Lacourt, Maxim Swertvaegher, Erwin Vanderplanck et Maxim Verstraete. De plus, deux contrats de sportifs haut niveau ont été offerts à des athlètes particulièrement prometteurs. Le premier revient à une jeune triathlète de 23 ans, Alexandra Tondeur, qui a décroché la médaille d’or au championnat d’Europe Espoir en duathlon et qui a bouclé la distance olympique en triathlon en 2 h19 min 42 sec, à seulement 6 min 9 sec de la Polonaise Agnieszka Jerzyk qui l’a emporté, ce qui augure de belles performances pour les prochains J.O. Le deuxième sportif sous contrat est Antoine Duvivier qui malheureusement s’est blessé lors d’une chute à Nancy, mais qui reste un athlète séduisant. Enfin, je voudrais saluer le travail remarquable des fédérations francophones de triathlon et de duathlon, dont le développement est particulièrement dynamique malgré la difficulté de ces disciplines. Le nombre d’affiliés a progressé de 41 pour cent ces deux dernières années. Avec la consécration d’Axel Zeebroek, la collaboration entre les fédérations, la Communauté française, les espoirs sportifs et les sportifs de haut niveau démontre que nous sommes bien au rendez-vous et même au-delà des espérances.

M. Jean-Luc Crucke (MR). – Je remercie le ministre pour cette réponse et pour le complément d’informations qu’il nous a donné. Voir un garçon comme Axel Zeebroek décrocher un contrat professionnel est très prometteur et entièrement mérité. La Communauté française a bien fait son travail. Je ne manquerai pas d’aller consulter son site internet. Je ne peux que confirmer tout le bien qu’il pense de l’aide qui lui a été accordée.