lundi 30 avril 2007

Question de M. Jean-Luc Crucke à la ministre de l'Intégration sociale, des Pensions et des Grandes

Jean-Luc Crucke (MR): Madame la présidente, madame la ministre, l'élargissement du Fonds
mazout est l'une de ces rares législations que le Parlement a adoptée depuis les élections. Je pense qu'il s'agit d'une bonne mesure pour réagir face à l'augmentation du coût de l'énergie. Il fallait intervenir.
Néanmoins, cette mesure a pour conséquence d'augmenter le nombre de bénéficiaires qui a triplé, voire quadruplé si l'on en croit les chiffres avancés par certains. Vous savez comme moi que les CPAS ont
d'autres missions également liées au bien-être et à l'aide sociale.
Lorsque nous avions débattu de cette législation au Parlement, j'avais attiré l'attention de votre prédécesseur sur le risque de mettre en difficulté certains services du CPAS ou certains CPAS en raison de l'accroissement de la demande à laquelle ils seraient confrontés et de l'aumône – il faut le reconnaître – qui leur est accordée.
J'entendais tout à l'heure que vous parliez d'interventions de 25 euros dans le domaine des garanties locatives mais, en l'espèce, il s'agit de 10 euros par intervention. Et encore – je ne dois pas vous le dire,
vous le savez parfaitement –, il s'agit de 10 euros par dossier. Cela signifie que lorsque la personne revient à plusieurs reprises au CPAS pour le même dossier, celui-ci ne reçoit toujours que 10 euros. Il est évident que cela pose des difficultés importantes.
Je respecte cette législation votée par le Parlement. Je ne l'aurais pas évoquée à nouveau si je n'avais pas entendu le cri d'alarme lancé par le président de la Fédération wallonne des CPAS, Christophe Ernotte. Il
affirme que si cela continue, c'est le fonctionnement même des CPAS qui sera en péril. Je me dis que si le président tient de tels propos, cela a plus de poids qu'un parlementaire, et s'il donne raison à un parlementaire tant mieux. Mais je voudrais surtout qu'on puisse améliorer la situation.



04.04 Jean-Luc Crucke (MR): Madame la ministre, je suppose que vous n'irez pas jusqu'à mettre en faillite ceux qui doivent aider les plus nécessiteux, à savoir les CPAS.

04.05 Marie Arena, ministre: Être à gauche ne signifie pas mettre en faillite.

04.06 Jean-Luc Crucke (MR): J'ai dit que j'espérais que vous n'iriez pas jusque là!

La présidente: (…)
04.07 Jean-Luc Crucke (MR): Madame la présidente, vous lisez dans mes pensées. Je pense qu'elle est capable de tout, du meilleur comme du pire, pour avoir travaillé avec elle à d'autres niveaux de pouvoir.
Madame la ministre, ce que je vous demande ici, c'est le meilleur. Allez-vous répondre à cet appel au secours du président de la Fédération wallonne des CPAS?
Pour vivre la situation sur le terrain dans une commune rurale où parfois les choses sont un peu moins présentes que dans les grandes communes, et encore…, je constate qu'un réel problème se pose. À partir du moment où un État décide quelque chose et surtout décide de le faire faire par d'autres, il faut qu'il leur vienne en aide. M. Furlan lui-même avait dit: "Plus de législations venant du fédéral ou du régional sans donner les moyens pour pouvoir les mettre en application". Pour une fois, je le suis et partage son avis. Je vous demande donc de faire écho à ce genre d'appel.

La présidente: Voici le soutien de M. Crucke pour augmenter le budget dans le contrôle budgétaire et répondre à cette demande.

04.08 Marie Arena, ministre: Monsieur Crucke, vous n'êtes pas sans savoir que nous sommes attentifs aux actions des CPAS, car non seulement la situation des bénéficiaires, c'est-à-dire les personnes qui sont en situation précaire, nous tient à coeur, mais de plus, au cabinet de l'Intégration sociale, nous travaillons directement avec les CPAS. Un CPAS efficace est bien entendu un CPAS qui offre le service le plus pertinent aux publics les plus précarisés.
Comme j'ai eu l'occasion de le dire lors de la présentation de la politique générale, ne vous trompez pas de cible! Ne visez pas celle qui donne des moyens aux CPAS. Visez plutôt celle qui n'en donne aucun.
Toutefois, il est de notre devoir de prendre en considération les demandes qui sont formulées auprès des
CPAS.
Eu égard à la problématique énergétique, nous nous sommes rendu compte que, si les bénéficiaires des
CPAS étaient bien entendu des personnes précarisées, d'autres personnes étaient concernées par le seuil
de pauvreté et avaient du mal, dans les périodes de chauffe, à remplir leur cuve à mazout. Si nous n'avions pas mis en place un système d'élargissement du Fonds mazout, elles auraient dû s'adresser au CPAS, parce qu'elles se seraient trouvées dans une situation de précarité, à laquelle le CPAS aurait dû faire face.
Ce que nous et nos prédécesseurs ont voulu au niveau du gouvernement fédéral, c'est l'élargissement du Fonds mazout au niveau des publics. C'était une bonne chose, car les précarisés ne sont pas uniquement constitués de personnes vivant avec des revenus de substitution. Il s'agit aussi de personnes confrontées à un pouvoir d'achat relativement faible.
Nous ne remettons pas en question l'élargissement du Fonds mazout à certains publics, D'ailleurs, vous savez que des moyens importants y ont été dédiés: 30 millions d'euros supplémentaires sur une base annuelle. L'objectif du gouvernement, que je soutiens bien entendu, était que le bénéficiaire reçoive le maximum. En effet, si un effort budgétaire est consenti pour prendre en considération le coût de l'énergie, l'objectif est que cette décision profite directement et de façon optimale au bénéficiaire final. C'est la raison pour laquelle les charges administratives prises en considération pour les CPAS en la matière n'ont pas été revues à la hausse.
Cependant, le gouvernement a été attentif à cet élargissement en vue de prendre en considération des catégories qui, administrativement parlant, étaient déjà identifiées par les CPAS. Ce sont les catégories MAF qui demandaient un travail administratif beaucoup plus léger au niveau des CPAS. Il est vrai qu’il y a plus de dossiers qu’avant en raison de l’élargissement, ce qui est logique. Toutefois, il faudra procéder à une évaluation du nombre de personnes participant de cette extension. En effet, les indicateurs dont nous disposons aujourd’hui n’ont pas fait exploser les plafonds de consommation.
En outre, je voudrais préciser – mais je ne souhaite pas le faire pour attaquer M. Ernotte avec qui je travaille main dans la main dans le cadre des politiques à mener en matière de CPAS – qu’en cas de surcharge, nombreux sont ceux qui réclament, mais personne ne dit jamais ce qui a été fait pour alléger la charge de
travail des CPAS.
C’est une des raisons pour lesquelles je suis ravie de revenir à l’Intégration sociale. En effet, en 2004, nous avions identifié beaucoup de problèmes de surcharge administrative au niveau des CPAS, mais aussi des délais de paiement énormes. Nous avons donc réduit au maximum ces délais. Étant donné qu'on n'est jamais mieux servi que par soi-même, je me permets d’attirer l’attention sur ce point.
On a aussi permis aux CPAS d'accéder aux nouvelles technologies de l’information afin d’automatiser au maximum les flux de données. Par exemple, la connexion à la Banque Carrefour, constitue un avantage considérable pour les CPAS car cela leur permet d’alléger considérablement leur charge administrative en termes de recherche d’informations. D’ailleurs, le succès est tel que la Banque Carrefour est aujourd’hui débordée. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle nous sommes en train de voir avec cette banque s’il est possible de fluidifier la connexion avec les CPAS.
Hier, je me trouvais dans les locaux de l’administration de l'Intégration sociale qui vient de lancer un "front desk" pour les CPAS afin de leur donner le plus rapidement possible les réponses aux questions d’ordre administratif qu’ils se posent. Par ailleurs, j’estime que nous devons continuer de mettre tout en oeuvre pour alléger le travail administratif des CPAS. Ce faisant, nous leur donnons l’occasion d’effectuer plus de travail social et de se mettre au service de ceux qui en ont le plus besoin, ce qui est d’ailleurs leur finalité. Et je comprends M. Ernotte lorsqu’il dit qu’il ne faut pas trop charger la barque.
Pour terminer, je tiens encore à attirer votre attention sur le fait que, vu les besoins grandissants de la population, nous mettons tout en oeuvre pour permettre aux CPAS d’effectuer plus de travail social que ce n’est le cas actuellement.

04.09 Jean-Luc Crucke (MR): Madame la présidente, je remercie tout d'abord la ministre pour sa réponse.
Je ne demande pas de remettre en question l'élargissement du fonds. Je veux, pour qu'il fonctionne correctement, que les intermédiaires indispensables, ceux par qui passent le pragmatisme et l'efficacité, en l'occurrence les CPAS, soient correctement indemnisés et évitent d'être pénalisés en appliquant une législation au détriment d'autres services qui sont aussi les leurs. Finalement, il ne faudrait pas que la ministre de l'Intégration sociale soit aussi la ministre de la "désintégration" des services des CPAS.
Madame la ministre, j'ai bien entendu que votre collègue ministre du Budget ne vous accordait pas tout ce que vous souhaitiez. Je n'hésiterai donc pas à lui rappeler qu'il s'agit pour vous d'obtenir davantage de moyens pour vos réalisations.
Quant à M. Ernotte, je n'entamerai pas de discussion à son sujet. Il est peut-être victime du "syndrome syndical": il crie sans doute plus que nécessaire. Si je suis souvent d'accord avec les syndicats sur ce sujet, je le suis moins avec le président de la Fédération wallonne des CPAS: eux crient à juste titre.
Het incident is gesloten.
L'incident est clos.

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