Sport: dopage:ratification de la convention internationale contre le dopage dans le sport
Interpellation de M. Jean-Luc Crucke à Mme Marie-Dominique Simonet, vice-présidente et ministre de l'Enseignement supérieur, de la Recherche scientifique et des Relations internationales, et à M. Claude Eerdekens, ministre de la Fonction publique et des Sports, ayant pour objet « la ratification de la convention internationale contre le dopage dans le sport » (Article 59 du règlement)
M. Jean-Luc Crucke (MR).
– Il ne se passe pas un jour, en Communauté française comme ailleurs, sans qu'il soit question de dopage, de non-respect délibéré des règles dans le milieu du sport. Certaines prouesses sportives se transforment en cauchemar pour leur auteur tandis que la valeur du résultat s'apparente à un échec.
En 2004, l'AMA, l’Agence mondiale antidopage, avait élaboré un code mondial antidopage adopté par 163 pays signataires de la Convention de Copenhague. Cependant, cette déclaration ne lie pas les gouvernements. Pour pallier cette insuffisance de force contraignante, l'Unesco et son directeur général, M. Matsura, ont préparé la Convention internationale de lutte contre le dopage. L'objectif, partiellement atteint, était son entrée en vigueur avant les Jeux olympiques de février 2006 à Turin. Cette convention, qui fut adoptée par les États le 19 octobre 2005, doit encore être ratifiée par les parlements. Pour entrer en vigueur, elle doit avoir été ratifiée par trente pays. C'est aujourd'hui chose faite puisque le trentième pays – le Luxembourg – l'a ratifiée récemment et que la France le fera dans deux jours.
Qu'en est-il en Communauté française ? Le 3 mai 2006, M. Eerdekens évoquait l'alchimie institutionnelle de notre pays et affirmait qu'une étape importante avait été franchie, celle du ministère fédéral des Affaires étrangères, où le groupe de travail sur les traités mixtes avait reconnu le caractère mixte de cette convention. Aujourd'hui, quelle est l'explication du blocage ? La commission des Relations internationales souhaite travailler au plus vite à ce traité. En dépit de l'alchimie institutionnelle, une certaine proactivité permettrait de faire avancer ce dossier qui relève à la fois de nos compétences en relations internationales et en matière sportive.
L'intérêt de figurer au nombre des trente premiers signataires ne résidait pas seulement dans la fixation de la date d’entrée en vigueur, à savoir le 1er février 2007, mais aussi dans la composition du comité de suivi. Il est évident que les pays les plus rapides à faire procéder à la ratification par leur parlement se retrouveront en position favorable pour un siège dans ce comité de suivi.
Cela signifie-t-il que l'on renonce à l'ambition de s'y retrouver ? Y participer est à la fois un message adressé aux autres pays et un message intérieur. La confrontation et le dialogue avec les autres pays signataires permettent de tirer des conclusions en matière de suivi. Les autorités publiques pourraient aussi lancer un message fort à leur opinion publique en montrant qu’elles prennent ce problème au sérieux. Renoncera-t-on à cette ambition qui me semble pouvoir être partagée par la majorité et par l'opposition ?
Par ailleurs, l'AMA a également prévu que les pays qui ne respecteraient pas les conditions de la convention ne pourraient plus organiser de compétitions internationales. Nous devons tout faire pour que les compétitions internationales organisées dans le pays respectent en tous points les conditions imposées par la convention internationale de lutte contre le dopage. Si tel n'est pas le cas, quelle serait la sanction ? Il n'y en a pas puisque notre parlement n’a pas ratifié la convention. Il s’agit là d’une difficulté supplémentaire.
Cela ne signifie pas que les autorités internationales ou l'AMA iront jusqu'à refuser un pays qui organise de nombreuses compétitions internationales mais si nous ne donnons pas de signes positifs, la concurrence est telle pour l'organisation de certains événements internationaux – je pense à
des événements organisés à Bruxelles, mais aussi aux championnats d’Europe de volley-ball féminin qui seront organisés en 2007 à Charleroi avec le Luxembourg et la Communauté française –, que l’on risque de jeter le discrédit sur notre pays alors que les compétitions internationales devraient plutôt servir à asseoir notre réputation d'excellence en matière sportive.
Vous l'aurez compris, cette interpellation ne se veut pas polémique. Je suis sincèrement déçu que nous n'ayons pas avancé plus vite. Nous devons tout faire pour que ce dossier arrive rapidement au parlement.
Je souhaiterais également obtenir une réponse aux autres questions plus concrètes qui vous ont été posées.
Mme Marie-Dominique Simonet, vice-présidente et ministre de l'Enseignement supérieur, de la Recherche scientifique et des Relations internationales. –
Vous interpelez régulièrement mon collègue Claude Eerdekens, monsieur Crucke, et nous avons supposé que vous aviez aussi envie de m'entendre. Je répondrai au nom du gouvernement, donc du ministre Eerdekens, ainsi qu’en mon propre nom.
Comme vous venez de le dire, une conférence avait été organisée le 10 janvier 2003 par l'Unesco. Elle regroupait les ministres et les hauts fonctionnaires de l'éducation physique et du sport. Ces derniers étaient convenus d'élaborer le plus rapidement possible une convention internationale contre le dopage dans le sport. Nous connaissons en effet les dérapages dans ce domaine et je crois qu'il y a un large consensus au sein de cette assemblée, et au-delà, pour les enrayer.
Le 19 octobre 2005, le projet de convention internationale de lutte contre le dopage dans le sport a été adopté à l'unanimité. C’est une belle victoire de plus de l'Unesco, grâce à sa conférence générale. La Communauté française a particulièrement veillé à ce que cette convention soit ratifiée dans les meilleurs délais. La Belgique a été le premier État européen à adopter une législation antidopage dans sa loi du 2 avril 1965, laquelle criminalisait le recours au dopage, tant dans le chef du sportif que dans celui de son entourage.
À la suite de la réforme de l'État de 1985, les compétences en matière de sport et donc, de lutte contre le dopage ont été transférées aux communautés. Le 8 mars 2001, la Communauté française a adopté le décret relatif à la promotion de la santé dans la pratique du sport, à l'interdiction du dopage et à sa prévention. Ce décret est entré en vigueur le 24 décembre 2002. Il dépénalise le dopage dans le chef du sportif, lequel encourt toutefois une sanction disciplinaire et/ou administrative décidée par la fédération sportive concernée. De plus, il organise la prévention, le suivi médical, la promotion de la santé dans le sport ainsi que les procédures de contrôle, de sanction et de recours en matière de dopage.
La convention Unesco impose effectivement aux États contractants de mettre en oeuvre dans leur législation interne les principes du Code mondial antidopage. Ainsi, ce dernier sera appliqué non seulement via des actions du mouvement sportif mais aussi, de façon complémentaire, via des actions menées par des autorités publiques.
Les parties contractantes à la convention s'engagent notamment à adopter des mesures aux niveaux national et international conformes au code, à encourager toutes les formes de coopération internationale visant la protection des athlètes, l'éthique sportive ou le partage de résultats d'enquêtes et, enfin, à promouvoir la coopération internationale entre les parties contractantes et les organisations de lutte contre le dopage dans le sport, en particulier l'Agence mondiale antidopage.
J'en viens à l'état des lieux en Communauté française. Comme mon collègue l'a sans doute dit en avril dans sa réponse, le groupe de travail sur les traités mixtes, au sein du service public fédéral Affaires étrangères, a considéré le 21 mars 2006 que la convention relevait exclusivement de la
compétence des communautés. Ce n'est pas une étape de pure forme, mais elle est très importante et même indispensable pour entamer les procédures de ratification.
En mai 2006, les Nations unies ont envoyé un modèle d'exposé des motifs destiné à être adapté par chacun des pays signataires. Fin juillet, il y a eu une réunion entre mon administration et l'administration des sports afin d'adapter cet exposé des motifs. En novembre 2006, ce dernier a été finalisé au sein de mon administration, et l'avis de l'Inspection des Finances a été demandé le 22 décembre; nous l'avons reçu le 28 décembre.
La phase administrative du dossier a donc été menée à bien dans des délais tout à fait normaux et raisonnables. Elle est désormais achevée, ce dont nous nous félicitons.
La procédure d'assentiment étant achevée et le dossier étant complet, je vais pouvoir le présenter lors de la prochaine réunion du gouvernement. Ce ne sera dès lors plus qu'une question de semaines avant qu'il soit présenté devant ce parlement pour y être ratifié.
Le comité de suivi de la convention antidopage n'est pas une structure où certains pays seraient admis et d'autres pas. Le nombre de pays participants n'est pas limitatif et il n'y a pas davantage de date limite de participation.
Le comité de suivi est une conférence des États-parties extrêmement collégiale, qui se réunit en session ordinaire tous les deux ans en vertu de l'article 28 de la convention. Elle se tiendra pour la première fois à Paris dans le courant de février. Notons que si seuls les États-parties à la convention peuvent assister à la conférence comme participants à part entière et ayant le droit de vote, les autres États membres de l'Unesco, dont la Belgique, peuvent néanmoins assister aux travaux et y participer en tant qu'observateurs. La Communauté française sera représentée. Nous serons donc présents à la Conférence de Paris en tant qu'observateurs. Nous aurons ensuite le statut d'État-partie dès que le processus d'approbation aura abouti.
Ces éléments me paraissent clairs et rassurants. Le traité sera adopté et nous participerons à la Conférence de Paris en février avec d'autres pays l'ayant déjà ratifié ou étant sur le point de le faire.
M. Jean-Luc Crucke (MR). –
Ce sujet est assez technique et fait appel à des notions de relations internationales. Vous avez rappelé vous-même, madame la ministre, que la Belgique a été le premier pays à se doter d'une législation anti-dopage. C'était en 1965. Nous ne serons donc pas le premier parlement à ratifier un traité de ce type. J'ai compris que la procédure administrative était quasiment terminée. Il n'en reste pas moins désolant de voir que le Luxembourg nous a précédés en la matière.
Le formalisme en matière de relations internationales est important. Lors d'une mission à Genève où nous avons notamment travaillé avec l'Unesco, nous avons pu voir que le rôle d'observateur n'est pas le même que celui d'État-partie, malgré le fait qu'il donne accès aux mêmes informations. Cela changera une fois que le traité sera ratifié. J'espère que cela pourra avoir lieu dans les plus brefs délais.
Libellés : dopage, Parlement wallon, sport
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