Divorces transfrontaliers, vers une harmonisation des règles: La Belgique prudente
Chambre,novembre 2008:Commission de la Justice
02 Question de M. Jean-Luc Crucke au vice-premier ministre et ministre de la Justice et des Réformes institutionnelles sur "les divorces transfrontaliers" (n° 8319)
02.01 Jean-Luc Crucke (MR): Madame la présidente, monsieur le ministre,
Mon attention a été attirée par une réunion du conseil des ministres de la Justice de l'Union européenne qui s'est tenue le 25 juillet dernier. À cette occasion, huit pays européens ont formellement demandé à la Commission, sur base d'une procédure formelle – de présenter une proposition dans le cadre de que l'on pourrait appeler une coopération renforcée, ce afin de déterminer des règles communes pour la loi
applicable en cas de séparation d'un couple transfrontalier.
Monsieur le ministre est-il exact que la Belgique ne fasse pas partie des 8 pays ayant pris cette initiative ? Si oui, est-ce le résultat du hasard ou d'un manque de volonté de tenter de trouver des solutions souvent complexes ? Pour avoir déjà eu l'occasion de gérer ce genre de question, je sais qu'il ne s'agit pas seulement de questions théoriquement juridiques. Le problème concerne également des femmes, des
hommes et souvent des enfants. Considère-t-on comme superflus une harmonisation en la matière ? Une réponse positive à cette question – je l'avoue – me frustrerait et m'étonnerait.
02.02 Melchior Wathelet, secrétaire d'État: Madame la présidente, effectivement lors du conseil des ministres de l’Intérieur et de la Justice de l’Union européenne des 24 et 25 juillet 2008 auquel vous faites
référence, un débat a eu lieu sur l’état de la procédure concernant la proposition de règlement relatif à la compétence et à la loi applicable en matière matrimoniale - c’est donc Rome 3 - notamment en cas de divorce.
Le Conseil a pris acte de l’intention d’au moins 8 états membres d’inviter la Commission à présenter une proposition de coopération renforcée et du fait que d’autres soient susceptibles d’y participer suite à une proposition de la Commission. Vous savez comme moi que la procédure très spécifique de la coopération
renforcée fait qu’en sorte qu’au moins 8 pays initient une procédure. Ensuite, il revient à la Commission de faire et d’émettre une proposition.
La Belgique a fait savoir lors du Conseil du 25 juillet 2008 qu’elle ne s’y associerait pas étant donné que 8 pays étaient déjà présents et que c’était suffisant pour lancer la coopération renforcée, mais qu’elle suivrait le dossier de près.
La mise en place d’un tel mécanisme ne doit pas se faire dans la précipitation. Une réflexion approfondie à ce sujet a été indispensable et je pense que la Commission qui était chargée aujourd’hui de déposer une proposition se rend compte que c’est évidemment un dossier extrêmement complexe.
La décision de s’engager dans une coopération renforcée ne doit pas être prise à la légère étant donné qu’il s’agit d’une première coopération renforcée en matière de justice intérieure.
En effet, il s'agirait d'un précédent étant donné qu'une coopération renforcée n'a jamais été instaurée en matière de droit international privé. De plus, il s'agit d'une matière extrêmement sensible. Si vous avez lu les interventions des divers membres du Conseil, vous aurez constaté les différences existantes entre les
ministres et gouvernements à ce sujet.
En ce qui concerne le fond de la proposition de règlement, le texte tel qu'il est établi actuellement est perfectible. Une coopération renforcée entre seulement quelques États membres risque d'aboutir à un instrument compliqué qui pourrait entraîner l'insécurité juridique et un manque de transparence. La prudence
s'impose donc. Il est nécessaire au préalable d'analyser les conséquences au niveau technique d'une telle coopération. L'objectif final doit être d'offrir une plus-value claire pour l'ensemble des citoyens.
La Belgique pourrait envisager de s'associer à une coopération renforcée en la matière si un nombre suffisant d'États membres devaient se joindre au mécanisme; des garanties devraient également exister quant à la plus-value de l’instrument et quant à sa transparence.
En résumé, comme vous, je ne peux qu'être enclin à considérer une telle avancée comme positive. Qui pourrait ne pas se réjouir d'une harmonisation de l'exécution des décisions en matière de divorce. Mais il faut que cela se passe d'une façon cohérente, correcte et en accord avec l'ensemble des pays. L'avantage,
c'est qu'en l'occurrence il y a eu cette initiation dans une procédure tout à fait spécifique de la coopération
renforcée des huit États. Il faudra voir quelle sera la proposition qui sera déposée, comment on pourra la faire évoluer et évaluer, à ce moment-là, si suffisamment de pays peuvent entrer dans le système pour que la Belgique fasse le choix d'y adhérer également.
02.03 Jean-Luc Crucke (MR): Monsieur le ministre, je vous remercie pour votre réponse.
Il est que cette procédure de coopération renforcée est un précédent, mais c'est précisément parce que c'est le cas que, politiquement, il est intéressant que la Belgique soit dans le wagon, elle qui est un des moteurs de l'Europe et en a été à l'origine. Il est rassurant de constater que si nous ne sommes pas dans le wagon
de tête, nous sommes dans le train. Je ne minimise pas votre réponse. Il faut faire preuve de prudence. Ce sont des matières compliquées mais tellement sensibles aussi que l'urgence existe. Derrière cette problématique, il y a des hommes, des femmes, des enfants qui souvent subissent les conséquences des
difficultés de législations qui doivent être harmonisées. Je vous engage à suivre ce dossier et à tenter de trouver une solution.
02.04 Melchior Wathelet, secrétaire d'État: Nous ne sommes pas formellement dans les huit pays qui ont lancé la coopération renforcée. M. n était présent et vous aurez pu lire dans les PV que nous nous sommes associés, que nous avons suivi le dossier et que nous serons l'un des pays partenaires de ces avancées,
même si nous devrons évaluer la plus-value que représentent ces avancées et essayer de recueillir un maximum d'États. En effet, les reconnaissances n'ont d'intérêt qu'à la condition qu'un grand nombre d'États travaillent ensemble. Le but sera de convaincre un maximum d'États, en sachant qu'un ou deux n'entreront jamais dans le jeu, pour que cela représente la plus-value la plus importante possible pour les citoyens.
02.05 Jean-Luc Crucke (MR): Je remercie le secrétaire d'État pour ces précisions importantes. Je modifierai ma formule en conséquence: nous ne sommes pas dans la locomotive mais nous sommes déjà dans le premier wagon, ce qui est de bon augure.
02.06 Jo Vandeurzen, ministre: C'est un sujet très intéressant. Nous avons provoqué une situation permettant de savoir qui voulait avancer et de donner le signal que nous serions présents à condition qu'un nombre suffisant de pays participent. Si deux ou trois pays ne veulent pas collaborer, soit. Nous avons
manoeuvré pour savoir si nous serions au moins 18 ou 19. pour cela, il a fallu faire preuve de stratégie pour déterminer s'il y allait avoir huit pays au milieu du désert ou un grand groupe de pays qui allaient suivre.
Cette stratégie a réussi: nous serons 18, peut-être 19, ce qui était le souci de la Belgique. Nous nous sommes investis dans le processus de décision pour savoir si nous aurions huit pays isolés ou huit pays qui donnent le ton et qui obtiennent le soutien d'autres pays. J'ai laissé entendre à mes collègues que le premier groupe devait être assez important pour entraîner le deuxième derrière lui.
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