dimanche 4 février 2007

Situation tendue au sein du Centre régional psychiatrique "Les Marronniers" à Tournai

QUESTION ORALE DE M. CRUCKE À MME TILLIEUX, MINISTRE DE LA SANTÉ, DE L'ACTION SOCIALE ET DE L'ÉGALITÉ DES CHANCES

M. Crucke (MR). – Madame la Présidente, Madame la Ministre, chers Collègues, je ne vais pas répéter ce qui a été dit par mes collègues, mais c'est un dossier que je côtoie depuis un certain nombre de semaines et qui m'a déjà donné le plaisir de conférer avec Mme la Ministre au moins à deux reprises.

L'avantage c'est qu'il y a des questions et des réponses. On peut recouper à la fois questions et réponses et se dire : « est-ce que j'ai vraiment à un moment donné été un hurluberlu ? Ai-je eu des lubies à ce point importantes que j'ai dû raconté n'importe quoi ? » Ou bien, est-ce que, comme le dit parfois le proverbe, on a toujours tort d'avoir raison trop tôt ?

Je lisais il y a quelques jours dans un journal : « Et la caravane des Ministres passa ». Le personnel des « Marronniers » fixe un ultimatum à la direction : « Cinq ministres pour ne rien régler, cela suffit ». Je vous assure que ce n'est pas moi qui parle, ce sont les syndicats tous bords confondus, en front commun.

Sachant que je réclamais depuis un certain temps des documents, et ma question commence d'ailleurs par cela, c'est de dire des documents exigés, demandés et quand je dis exigés, il faudrait un jour ici qu'on refasse le rôle du Parlement parce que contrôle du Parlement à l'égard du Gouvernement il est absolu - et je le dis en face, devant la ministre et dans les yeux -. Il est absolu.

J'ai dû écrire à la Présidente du Parlement wallon pour que les documents soient communiqués. J'ai même suggéré de le faire à titre confidentiel, dans un bureau où un parlementaire est surveillé par un membre de l'administration de ce Parlement wallon pour être certain qu'on ne prenne pas copie ici. Je suis tombé à la renverse lorsque j'ai vu que ce qui est confidentiel n'a rien de confidentiel. Il y a deux documents dans ce dossier. Un rapport de l'année 2000 - il y a dix ans - de l'Université de Liège que tout le monde connaît. Cela n'a rien de confidentiel. Je l'ai demandé, c'est vrai. Il a fallu passer par là alors que pour l'avoir, n'importe qui écrit à l'Université de Liège, il l'aura. Je pensais effectivement en demandant à la Ministre, cela irait un peu plus vite. L'autre document est un courrier de réponse du Président du Conseil d'administration et du Directeur général de l'Institution à une lettre de la Ministre. Il n'y a rien de confidentiel là-dedans.

Je n'ai pas appris là-dedans une ligne en plus de tout ce que j'avais déjà pu lire. J'oserai même dire que je trouve la technique particulière. Relisez vos réponses. De deux choses l'une, vous me dites avoir sollicité des rapports à l'administration et dans ce cas où sont ces rapports ; ou bien ce rapport existe et vous ne l'avez pas communiqué au Parlement wallon.

Je n'apprécie pas. Ou bien ce rapport n'existe pas et contrairement à ce que vous m'avez dit, vous n'avez pas diligenté vis à vis de l'administration une demande de rapport. Parce que ça, avoir comme seule réponse du Directeur général et du Président du Conseil d'administration qui nous répondent, cela veut dire quoi ?

Je regarde ma collègue en face de moi, elle occupe une belle maison, mais tout le monde me dit : cette maison-là, attention, elle est insalubre, incommode, il y a le feu, ça va se déstabiliser. On a connu ça il y a pas très longtemps à Liège. Et pour être certain que cette maison est salubre, stable, qu'est-ce que je fais ? Je ne demande pas à l'administration d'intervenir, je ne demande pas au Commandant des pompiers d'y aller. J'écris au propriétaire en disant : dites-moi si ça va bien ou si ça ne va pas. Et les réponses sont suffisantes. Et aux yeux de la Ministre, c'était suffisant parce que c'était ma deuxième intervention dans cette commission. C'était un jour de me retrouver devant une télévision locale où je voyais la Ministre, et c'est pour cela que je suis finalement pas heureux - mais que je rejoins : « Et la caravane des Ministres passa » -, c'est de voir une Ministre qui se rend « aux Marronniers » et qui dit : « Tout va bien, je renouvelle ma confiance ». Et vous renouvelez votre confiance sur cette base-là ? J'ai vraiment des craintes par rapport à la manière dont on prend au sérieux les plaintes des uns et autres.

Et depuis lors, que s'est-il passé « aux Marronniers » depuis qu'on m'a dit : « tout va bien » ? J'espère bien qu'on ne le dira pas une troisième fois aujourd'hui. Depuis lors, il y a eu un médecin qui s'est fait virer. Vous savez, il faut établir la vérité, il faut exécuter. Moi, je ne suis pas juge du médecin encore moins son avocat. C'est Maître Uyttendaele qui le défend. On ne peut pas dire qu'il est sujet à caution avec le libéralisme qui est le mien. Il s'est fait viré pour manque de confiance. C'est quoi la confiance ? Je l'avais dit ici que je craignais pour ce médecin. C'est le cas.

Et depuis lors, qu'est-il arrivé ? Un rapport à la Cour des comptes que nous avons tous reçu. Ce rapport souligne que « Les Marronniers » n'ont pas remis leurs comptes pour 2005 et 2008.

Troisième chose, les syndicats s'en mêlent. Il y a un préavis de grève.

Et vous soutenez encore que tout va bien ?

Madame la Ministre, la manière dont vous m'avez répondu dans ce dossier n'est pas sérieuse, mais c'est le passé. Maintenant, on va regarder vers l'avenir. Je vous avais demandé en son temps un audit. Vous m'avez répondu : « pas indispensable, je demande des rapports, je saisis l'administration et je lui demande un rapport ». Ce que moi je vous demande aujourd'hui c'est deux choses. Lorsque vous avez rencontré la Direction des Marronniers, lorsque vous êtes venue dire sur antenne : « tout va bien », étiez-vous informée du fait qu'on virait le premier qui parle, du fait que les comptes n'avaient pas été rendus à la Cour des comptes et du fait que les syndicats disent aujourd'hui « depuis 10 ans, dans le statut, rien n'a changé, on est toujours au même point » ? Est-ce que oui ou non, vous étiez en possession de cette information ?

Que faudra-t-il pour que vous communiquiez au Parlement wallon les rapports que vous avez ? Je veux savoir s'il y en a d'autres. Et s'il y en a pas d'autres, qu'attendez-vous pour diligenter non seulement un rapport à l'administration et un audit sur ces « Marronniers » ?

La manière dont ce dossier est traité est le plus mauvais des services qu'on peut rendre à une institution qui le plus grand hôpital de Wallonie.

Parce que soit il n'y avait rien dans ce dossier, et il fallait à ce moment-là clairement l'établir ; soit, il y avait, et rien n'a été fait pour tenter de le retrouver. Et ça, cela me semble en termes de responsabilités impardonnable.

Mme la Présidente. – La parole est à Mme Tillieux.

Mme Tillieux, Ministre de la Santé, de l'Action sociale et de l'Égalité des chances. – Les rapports que M. le Député Crucke avait demandés ont bien été communiqués au Parlement wallon en janvier dernier. Et vous le savez, ces rapports portent à la fois sur l'audit 2000 et à la fois sur les rapports établis par la Direction et le Conseil d'administration de l'hôpital, en suite des questions que j'avais posées à cet égard.

Les organisations syndicales se sont exprimées en assemblée générale du personnel ce 26 janvier et ont déposé un série de revendications. Mme Salvi en a fait part : avancements de statut, remplacement des agents absents, reprise des années d'ancienneté, question du pécule de vacances, politique orientée dans les examens de promotion, pécules de sortie des agents de l'ex asbl, nomination d'agents qui ont réussi le méga-concours de la Région wallonne, politique de nomination au sein de l'Institution, réactualisation du cadre du personnel.

Il convient tout d'abord de rappeler que suite à la réforme du statut du Centre régional psychiatrique « Les Marronniers » - adoptée par notre Parlement wallon le 30 avril dernier -, les questions relatives au remplacement des agents absents, la politique de promotion et de nomination relève aujourd'hui exclusivement des compétences du Conseil d'administration du Centre.

En ce qui concerne le statut spécifique et le cadre du personnel, des discussions ont été menées au sein d'un groupe de travail interne de concertation sociale et ce groupe comprend les organisations syndicales. Ce groupe de travail a bien avancé depuis la mise en place du nouveau Conseil d'administration en juillet dernier : pas moins de sept réunions ont été organisées.

En ce qui concerne la nomination des agents qui ont réussi le méga-concours de la Région wallonne, comme prévu dans le décret, la nomination est prévue pour le 1er juillet 2010. Le point a régulièrement été évoqué dans les réunions du groupe de concertation sociale et certaines modalités font partie des demandes du Comité de pilotage.

En ce qui concerne le remplacement des agents absents, dans la mesure des bases réglementaires et contractuelles, le Centre « des Marronniers » cherche à remplacer le plus vite possible les membres du personnel absents, et cela par le biais d'une équipe mobile. Les absences qui font suite à un accident de travail, font l'objet d'un remplacement dans le mois. Les écartements prophylactiques sont remplacés dans 80% des cas. Pour les métiers en pénurie et principalement, ici, on parle des infirmiers, il est pourvu au remplacement dans 100% des cas, pourvu bien sûr qu'il soit possible de trouver des travailleurs qui répondent aux conditions - et chacun sait que dans le secteur ce n'est pas nécessairement chose aisée -.

J'ai pris l'initiative de convoquer le 10 février prochain à mon Cabinet le Comité de pilotage qui a suivi tout le processus de réforme - Comité de pilotage auquel participe : le Conseil d'Administration, la Direction et les organisations syndicales -.

Cette réunion se fera en présence du Cabinet du Ministre de la Fonction publique. L'objet de la rencontre sera de finaliser les dispositions qui doivent être reprises dans un nouveau statut du personnel. Ce projet sera ensuite soumis formellement à la concertation sociale au sein du comité du secteur 16.

En ce qui concerne la question des 13,07 %, celle-ci apparaît très différemment de ce qui s'est produit dans les autres OIP et le personnel du Service public de Wallonie. Une analyse juridique est actuellement en cours sur la légalité de la retenue. Vous comprendrez que je ne peux à ce stade vous en dire plus.

Pour le calcul du pécule de vacances, le Centre a toujours appliqué les principes relatifs au personnel du secteur public. Il faut savoir que jusque 1996, les rémunérations du Centre étaient calculées par le Service central des dépenses fixes, qui est un service des Finances. Selon ce service, la retenue des 13,07% n'a jamais fait l'objet d'un paiement à un quelconque organisme, car elle ne serait pas considérée comme une retenue dans le seul but d'être reversée, mais plutôt comme une diminution du pécule de vacances.

Enfin, je m'étonne de voir ressurgir la question de la disparition de l'asbl qui, du temps de la Communauté française, gérait le personnel du centre. À ma connaissance, ce transfert a été réglé à l'époque - on parle ici de 1996 -, et fait de toute façon l'objet d'une prescription.

En ce qui concerne la question relative au docteur Bouillon, il convient de préciser qu'il n'est pas exact de parler dans son cas d'un licenciement : le docteur Bouillon était sous convention d'entreprise avec le Centre régional psychiatrique. Par décision du Conseil d'Administration, il a été mis fin à cette convention avec prise d'effets à la date du 6 janvier 2010, conformément aux dispositions de cette même convention. Le Conseil médical - à l'unanimité - a remis un avis positif à ce sujet. Par ailleurs, l'ensemble du corps médical, en Assemblée générale, et le Conseil d'Administration ont constaté la rupture de confiance avec le docteur Bouillon, ce qui rendait impossible de poursuivre la convention.

Le docteur Bouillon ne preste pas de préavis. Il lui a été accordé conformément à la réglementation qui régit les rapports juridiques entre les médecins et le Centre une indemnité dont le montant s'élèverait à quelque 60.000 euros.

Le cas du docteur Bouillon et les revendications du personnel consistent en deux situations totalement différentes.

En ce qui concerne les comptes des deux centres hospitaliers pour l'exercice 2008, ils seront inscrits à l'ordre du jour du Gouvernement wallon du 11 février prochain pour approbation. Pour ce qui concerne les comptes 2005 des deux CHP, ils ont été approuvés par le Gouvernement wallon le 10 novembre 2006. Je vérifierai avec l'Administration pourquoi ils ne sont pas parvenus à la Cour des comptes.

Pour rappel, le CHP n'est pas un OIP classique, dans la mesure où il ne reçoit pas de dotation régionale : les moyens financiers lui sont octroyés par le Fédéral. Il doit aussi répondre aux normes fédérales d'agrément, ainsi qu'aux règles en matière de comptabilité qui sont également fixées par le Fédéral.

Je répète encore une fois ce que je vous ai répondu le 8 décembre dernier : la situation actuelle me semble relever d'un fonctionnement normal de l'institution, avec comme pour toute entreprise - qu'elle soit publique ou privée -, ses difficultés passagères. Je vous rappelle aussi que lors des débats budgétaires, il avait été prévu d'aborder en Commission le thème du Centre hospitalier psychiatrique et cela afin de mieux le connaître. La Direction du Centre se tient à votre totale disposition pour organiser l'éventuelle visite. Ce serait, me semble-t-il, une bonne façon de vous permettre de vous rendre compte de visu du travail qui est réalisé aujourd'hui encore aux « Marronniers ».



Mme la Présidente. – La parole est à M. Crucke.

M. Crucke (MR). – Je suis pour le moins insatisfait de la réponse de Mme la Ministre et je pense que sincèrement, elle ne prend pas ce Parlement wallon au sérieux.

Pour ce qui concerne le licenciement du médecin, si j'ai bien compris, il s'agit d'un remerciement... Les tribunaux arbitreront.

Par contre, Madame la Ministre, vous confirmez que vous avez communiqué au Parlement wallon ce dont vous aviez la possession, c'est-à-dire deux documents : un rapport en 2000 et le rapport qui a été remis par le Président du Conseil d'Administration, le Directeur général en date du 30 octobre 2009. Cette réponse vous est parvenue le 30 octobre 2009. Le 8 décembre, vous affirmiez devant cette commission, « vu la gravité des éléments que vous avez évoqués dans votre première interpellation, j'ai immédiatement interpellé l'Administration, le Conseil d'Administration, les Commissaires du Gouvernement et en particulier la DG05 ». Où sont ces rapport, vous ont-ils fait rapport ?

Que cachez-vous au Parlement wallon? Avez-vous demandé ces rapports ? Quand vous me répondez au mois de décembre, soit vous êtes en possession d'autres documents, soit vous n'êtes pas alors en possession, parce que vous ne l'avez pas demandé. S'entendre dire que ça va bien - plus tout à fait aussi bien, les syndicats sont montés au créneau -, qu'il n'y a pas de problèmes de personnel, alors que je lis : « Le cadre du personnel n'a pas été revu depuis 7 ou 8 ans », dit un syndicaliste, « il ne correspond plus aux nouvelles fonctions. Et le recrutement ? Ici, c'est la politique du costume sur mesure. On choisit un candidat et on établit un profil qui lui correspond ».

Je vous demande un peu plus de sérieux dans la gestion de ce dossier. Je vous redemande un rapport d'administration. Je vous demande de faire ce que vous aviez promis au Parlement wallon. À défaut, avec mon Groupe, nous reviendrons par interpellations et par motions. Mais je ne laisserai pas le Gouvernement wallon travailler comme cela, c'est-à-dire ne pas travailler. La politique de l'autruche c'est la plus mauvaise des politiques que l'on peut adopter en politique.

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