mercredi 14 décembre 2005

Question orale de Jean-Luc CRUCKE au Ministre Jean-Marc NOLLET sur "les contestations de la Febeg à l'égard de la redevance gaz"

M. le Président. L'ordre du jour appelle les questions orales de M. Crucke à M. Nollet, Ministre du Développement durable et de la Fonction publique, sur « les contestations de la Febeg à l'égard de la redevance gaz » et de M. Yzerbyt à M. Nollet, Ministre du Développement durable et de la Fonction publique, sur « l'inapplicabilité de l'arrêté du Gouvernement wallon sur la nouvelle redevance gaz».
La parole est à M. Crucke pour poser sa question.

M. Crucke (MR). C'est une question que j'ai déjà posée dans le cadre du budget, mais finalement, l'on m'a demandé de la reposer dans les questions orales, ce que je fais volontiers. Je veux l'avis de M. le Ministre par rapport aux commentaires que la FEBEG fait sur l'applicabilité concrète de l'arrêté de l'exécutif wallon. Pour faire bref, la FEBEG résume son opposition à trois éléments: l'absence de modalités précises d'application du décret ; l'absence d'une uniformité de consensus entre GRD et ce n'est pas la première fois que l'on parle de cette absence de consensus; et l'effet rétroactif de la législation. M. le Ministre, reconnaissez-vous les difficultés qui sont soulignées? Connaissez-vous une certaine précipitation qui aurait empêché une concertation plus ample et, peut-être également plus utile? Comment accéder à cette demande de transparence et d'uniformité sollicitée par la FEBEG?

M. le Président
. M. Yzerbyt n'arrive pas. Je le constate avec désolation.

M. Nollet, Ministre du Développement durable et de la Fonction publique. Ah, le voilà! M. Le Président, je vous propose de permettre à M. Yzerbyt de développer sa question.

M. le Président. À la seconde près!

M. Crucke (MR). Et quand c'est moi...

M. Nollet, Ministre du Développement durable et de la Fonction publique. Non, je propose à M.Yzerbyt de reprendre.

M. le Président. La parole est à M. Yzerbyt.

M. Yzerbyt (cdH). Monsieur le Président, Monsieur le Ministre, chers collègues, comme je suis discipliné, merci à tous, et merci à vous, Monsieur le Président, de me permettre de poser cette question qui est quand même d'actualité. Mais vous me direz que toutes les questions sont d'actualité. M. le Ministre, il ressort d'un article de presse, paru dans la Libre Belgique du 30 novembre dernier, que la FEBEG dénonce l'inapplicabilité sur le terrain de l'arrêté du Gouvernement wallon du 15 juillet 2010 relatif, à la redevance pour l'occupation de domaines publics pour le réseau gazier. C'est d'abord la rétroactivité de cet arrêté qui est mis en cause par la Fédération. En effet, l'arrêté du 15 juillet 2010, publié le 16 août, prévoit l'application de la redevance au 1er janvier 2010. Vu les importantes difficultés techniques et la surcharge de charges administratives engendrées par ce système, les fournisseurs disent ne pas pouvoir systématiquement répercuter ces tarifs rectifiés aux près de leurs clients actuels et anciens.
Ensuite, c'est surtout l'absence également de normes uniformes qui est critiquée par la Fédération. En effet, l'absence de modalités précises d'application et de consensus parmi les GRD wallons impliquent une application non uniforme sur noter territoire wallon. En témoigne d'ailleurs la récente initiative de l'ALG qui a fait, pour d'autres raisons, trois heures de débat dans la Commission des affaires intérieures qui a déjà, de son côté, mis en pratique la redevance gaz. En découlent une complexification du fonctionnement du secteur, peut-être une discrimination à l'égard des consommateurs, des incertitudes sur le plan juridique et, peut-être également, des coups inutiles. Pour éviter de telles conséquences, il faudrait définir préalablement des règles précises d'application transparentes et uniformes pour l'ensemble des GRD. Par ailleurs, n'oublions pas que l'inapplicabilité de cet arrêté du Gouvernement wallon pourrait avoir mais je dirais que plus le temps passe, plus il va avoir des conséquences importantes en matière de budget communal. En effet, il est prévu que la nouvelle taxe rapporte, permettez-moi le terme, environ 35 millions d'euros par an, dont 64% reviennent aux communes. Les communes comptent sur ces rentrées. Aujourd'hui, beaucoup de communes finalisent leur budget même si l'on sait que toutes auraient dû l'avoir finalisé. Mais même celles qui l'ont finalisé sont d'ailleurs moins inquiètes qu'aujourd'hui puisqu'elles ont inclus dans leur budget une recette « redevance gaz», puisqu'on sait que les recettes sur « redevance voiries gaz», « redevance voiries électricité» doivent revenir intégralement aux communes. Donc, M. le Ministre de l'Intérieur, M. le Ministre Furlan, avait déjà été interrogé à ce niveau-là et, effectivement, il est question d'intégrer ces prévisions de recettes dans les budgets 2011. Aujourd'hui, il apparaît que ce serait quelque chose qui devient de plus en plus aléatoire. Monsieur le Ministre, comment réagissez-vous aux déclarations de la FEBEG, relatées dans la presse. Comment allez-vous faire en sorte que ce décret soit applicable sur le terrain et donc, quelle mesure envisagez-vous concrète d'ici la fin de l'année, mais surtout les heures qui suivent puisque j'estime que cela devient d'une urgence collective?

M. le Président
. La parole est à M. le Ministre Nollet.

M. Nollet, Ministre du Développement durable et de la Fonction publique. Non seulement avec la FEBEG, mais également avec les gestionnaires de réseaux. Le représentant de la FEBEG avait d'ailleurs apprécié cette consultation lors d'un récent contact, il a encore souligné que de leur point de vue, notre méthode de travail avait été correcte et bien concertée. Cet arrêté est entré en vigueur le jour de sa publication au MB, à savoir le 16 août 2010 et pour l'année 2010, les gestionnaires de réseau procès au paiement sur la base des volumes
de la consommation 2009. Il est important à souligner aussi que la question de la rétroactivité n'a pas été relevée par le Conseil d'État dans son avis. Il est clair que la CREG nous a répondu: quand je dis nous, c'est à la fois à moi, comité d'énergie et au Ministre-président, puisqu'il s'agit de relations intrabelges entre l'autorité fédérale et l'autorité régionale et que maintenant, le Gouvernement wallon doit être saisi de la réponse à apporter à la CREG. Je vous ai déjà dit, Monsieur Crucke, et vous m'avez déjà interpellé là-dessus. Pour vous, ce n'est pas une première. Quel est mon raisonnement? Vous le connaissez. Je peux le redonner un peu dans le cadre du débat et surtout, l'étayer par quand même quelques avis du Conseil d'État. Ce n'est quand même pas rien ce que le Conseil d'État a déjà eu à discuter de cette question-là. Ainsi, les tarifs des gestionnaires de réseaux de distribution sont engagés par l'arrêté royal, on le sait, du 2 septembre 2008 et approuvé par la CREG. Il ressort de la jurisprudence du Conseil d'État. Bon, maintenant, tout cela fera l'objet de débats. Mais dans son avis relatif à l'article 20 du décret gaz, modifié par le décret programme portant diverses mesures concernant la redevance de voirie, le Conseil d'État avait souligné que selon l'article 6 de la loi spéciale, l'autorité fédérale est, en ce compris la politique de l'énergie, compétente en matière de tarifs. « Il n'appartient dès lors pas aux régions dans le cadre juridique actuel de prévoir qu'un coût déterminé peut-être répercuté, je cite le Conseil d'État, dans les tarifs, même si pour le surplus, il est fait référence à la réglementation fédérale en la matière. Parce que poser le principe de cette répercussion éventuelle, c'est déterminer également un élément de la structure tarifaire ce qui, selon la disposition qui vient d'être évoquée, relève de la compétence fédérale». C'est ce genre d'avis du Conseil d'État qui est là. Maintenant, on va faire analyser cela finement par nos juristes au niveau du gouvernement. Je dois encore dire que cette interprétation est également rappelée par le Conseil d'État dans un autre avis relatif à l'ordonnance bruxellois du 1e avril 2004, relative à l'organisation du marché du gaz dans la Région bruxelloise. Ils ont rappelé l'avis qu'ils avaient déjà donné. Dans l'avis portant sur l'arrêté royal du 2 septembre 2008, relatif aux règles en matière de fixation et de contrôle du revenu total de la charge bénéficiaire, idem. Et là, le Conseil d'État:« ne voit pas sur quelle base légale repose les dispositions de l'article 13 de l'arrêté en projet concernant les impôts, prélèvements sur charge, contributions et rétributions ». Je ne vais pas vous faire tout le raisonnement juridique, mais vous voyez qu'à chaque fois, en tout cas le Conseil d'État donne un point de vue cohérent et correspondant. C'est là que cela devient très compliqué pour voir effectivement qui doit agir. L'analyse fine d'un point de vue juridique est en cours au gouvernement pour voir quelles réponses on peut apporter au niveau de la lettre que l'on a reçu de la CREG.

M. le Président. La parole est à M. Crucke.

M. Crucke (MR). Merci pour la réponse de M. le Ministre. Si je me suis permis de revenir, c'est parce qu on est ici avec la FEBEG qui semble tirer la sonnette d'alarme. J'ai quand même l'impression que l'on n'est pas sorti de l'auberge. Je comprends bien ce que dit le Conseil d'État, mais j'ai envie de vous dire que l'on ne peut qu'en prendre acte, sous réserve d'une analyse plus approfondie, mais il y a un gap entre ce que dit le Conseil d'État et l'applicabilité.

M. Nollet, Ministre du Développement durable et de la Fonction publique. Si c'est elle qui attaquait...

M. Crucke (MR). Moi, c'est ma crainte. Ma crainte est que vous allez être attaqué. Enfin, quand je dis vous, c'est l'administration. J'ajouterai à cela que ce n'est pas propre à ce dossier-ci. C'est le paysage morcelé des GRB et leur pratique totalement différente. Ce qui n'arrange absolument pas les choses.

M. le Président. La parole est à M. Yzerbyt.

M. Yzerbyt (cdH). Je n'ai malheureusement pas l'expertise juridique. Quelque part, M. Crucke est un juriste, donc il peut comprendre tout ce qui se dit, tout ce qui se fait, tout ce qui se pense et toutes les références que l'on fait. Donc, quand il dit : « Je vous comprends», moi je comprends de moins en moins. À un certain moment, c'est la CREG qui vous renvoie ou qui renvoie des courriers en disant que ce n'est pas du tout de sa compétence. Donc, on peut continuer, et j'ai l'impression effectivement que la CREG a la compétence d'accepter ou non des tarifs. Elle n'a pas la compétence de les fixer. Mais, je simplifie peut-être. Permettez-moi, avec ma formation d'enseignant d'essayer la manière de pouvoir expliquer cela en tant, et permettez-moi
encore de cumuler 2 fonctions : échevin des finances et député wallon. C'est important. Il faut en profiter. Demain, il faudra qu'il y en ait d'autres qui viennent expliquer dans les communes à quoi on est en train de jouer. Quand on dit que c'est le citoyen qui paye! Quand le citoyen paie, il vient à la commune. Il vient dire : «Regarde, je suis venu payer une facture». Et donc, il faudra que l'on puisse expliquer, et pas avec des Conseils d'État, etc. Aujourd'hui, je pose la même question dans 30 secondes à M. le Ministre Furlan et je ne m'attends pas à avoir une réponse plus adéquate de ce côté-là. Pas que je vous en veux, soyons bien d'accord et ne jouez pas avec la langue de bois, mais je crois qu'il y a une difficulté. Il faudrait prendre la responsabilité, car comme vous le dites, c'est un acte qui pourrait être attaqué. Mais donc, que le Gouvernement wallon puisse prendre, mettre en application et décider de le faire parce qu'il y voit l'intérêt des communes. Certainement, et je le dis, on peut refaire le débat au détriment du citoyen qui va payer in fine, mais effectivement, il y a peut-être une responsabilité à prendre dans l'intérêt des communes. Aujourd'hui, on reste dans une impasse, et moi, je crains fort et vous le dites vous-même la rétroactivité. Le Conseil d'État ne la remet pas en cause. On est encore en train d'essayer de percevoir ou en tout cas de faire en sorte que la redevance « voiries gaz» 2010 soit à un certain moment perçue. On verra ce que cela va donner, mais cela pose problème aux communes pour l'instant et notamment à l'élaboration du budget.

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