Question orale de Jean-Luc CRUCKE à la Ministre TILLIEUX sur "la privatisation des homes publics"
M. le Président. L ordre du jour appelle la question orale de M. Crucke, sur «la privatisation des homes publics» et la question orale de Mme Bertouille sur « la volonté de certains CPAS de se séparer de leurs maisons de repos» à Mme Tillieux, Ministre de la Santé, de l Action sociale et de l Égalité des chances.
La parole est à M. Crucke pour poser sa question.
M. Crucke (MR). Monsieur le Président, Madame la Ministre, chers collègues, je voudrais tout d'abord vous adresser mes meilleurs v ux, notamment à Mme la Ministre que je n'ai pas encore personnellement vue cette année. C'est un plaisir de vous voir. J'ai pris connaissance d'un certain nombre de déclarations qui ont été faites dans la commune d'Ath, cette bonne commune d'Ath, où le CPAS est riche de plus d'un home public, parce qu'il y en a au moins deux. J'aimais bien la directive qui a été développée par certains en fonction que l'on se trouve, comme dirait certains comptables, du côté des manifestants ou des «verbalisants». Il est question ici de collaborations à entrevoir entre le service public, les homes publics, et simplement de privatisation. Je parle ici au conditionnel parce que je ne connais pas suffisamment le dossier pour aller plus loin. Il semble qu'il soit question de la collaboration qui pourrait exister entre les homes publics («Roselle» et «Primevère») et les mutualités socialistes. Pourquoi pas? Si on va plus loin, on passe vite de la collaboration à la privatisation du service. D'une manière ou d'une autre, avez-vous été approchée dans ce dossier? La ministre des Affaires sociale et de la Santé publique, en charge du bienêtre des personnes âgées, des seniors, a-t-elle été interpellée par le CPAS? Il semble qu'il y ait des difficultés et que la situation actuelle ne permette pas de garantir le service. Je crois que tout doit partir de là. Je vous avouerai bien qu'à titre personnel, je ne suis pas contre une privatisation, contre une collaboration ou contre plus de privatisation. Le travail en commun entre le privé et le public, généralement, me plaît.Je ne vais pas maintenant dire qu'il faut jeter tout cela. Rien n'est bon, tout est mauvais? Non. Encore faut-il savoir ce que l'on veut faire quand on ouvre un tel chantier? Il faut commencer par une base. Voilà ce que l'on sait faire, ce que l'on peut faire, voilà ce que l'on a les moyens de faire, voilà ce que l'on ne sait pas faire, ou ce que d'autres pourraient mieux faire. Ce schéma là existe-t-il ? Vous a-t-il été présenté? Deuxièmement, s'il vous a été présenté, quelle est la manière dont l'administration rentre dans cette réflexion? Associe-t-elle à cette réflexion ou bien considère-t-elle que, d'une manière ou d'une autre, chacun a des prérogatives et il n'est pas question d'innover, pas question d'aller vers des chemins qui seraient des chemins un peu différents de ceux que nous avons l'habitude de voir? Trois : si on emploie ces chemins, comment faiton jouer la rentabilité de celui qui vient de l extérieur? On externalise certains services? Et qu un partenaire ou l autre n a rien avoir dans le choix qui se fera par rapport à la connaissance qu on pourra avoir ou par rapport à la sensibilité qu on peut avoir, ou l amabilité historique des uns et des autres ? La législation sur les marchés publics doitelle
être d application ? Non, si on externalise, on externalise dans le cadre d une législation qui prévoit la mise en concurrence. On aurait donc plusieurs opérateurs extérieurs qui tous pourraient avoir droit aux marchés et aussi jouer dans ce jeu. Quatre : ce que l on voit à Ath, est-ce quelque chose que vous rencontrez dans d autres CPAS, dans d autres communes? Est-on dans une forme de vague où les services publics, CPAS en l occurrence, n auront plus les moyens d assumer un certain nombre de tâches qui leur sont habituellement dévolues? Ressentez-vous quelque chose dans son évolution? Ou bien doit-on considérer que c est une exception par rapport à ce qu on connaît sur le territoire? Si je pose la question, c est pour deux raisons. La
première, c est si réellement on est vers une transformation du paysage, vers une sorte de vague qui va transformer un peu à la fois le secteur, je pense que nous, législateurs, Parlement wallon, il faut qu on se saisisse du dossier. Ce n est plus seulement un ministre vis-à-vis d une commune qui peut dire qu il donne l aide de l administration, qu il donne son point de vue et essayer d avancer dans le dossier. C est plus un élément structurel qui devient un débat. On doit sérieusement y mettre un certain nombre de balises. Par rapport à l expérience qui est la vôtre, la connaissance que vous avez du dossier sur l ensemble des communes wallonnes, avez-vous cette impression que le cas que connaît la Ville d Ath pourrait se répéter?
Dernière question, on part d une situation x, Ath comme ailleurs, les pouvoirs publics sont souvent intervenus pour permettre à cette situation d exister en tant que telle : subsidiations, subventionnements ont permis d améliorer un certain nombre de homes, de chambres d accueil. C est la logique même du partenariat entre les régions et les communes. À partir du moment où on sort d un schéma public-public pour le faire évoluer soit vers une privatisation, soit vers un schéma privé-public, y a-til un risque de remboursement vis-à-vis des subventionnements qui ont été accordés par le pouvoir public qu est la Région wallonne? Là aussi, si je vous pose la question, c est parce qu on me l a posée sur le plan local. Je pense qu il faut que chaque décideur sache avant de prendre ce qui peut être un tournant peut-être pas négatif, il faut au moins qu il sache à quel jeu il joue. Si on vient par après dire: « On vous a aidés, on vous a indiqué, vous avez fait cela, c est une nouvelle structure» et qu après on vienne réclamer les financements du passé, c est clair, l'oiseau, on ne lui donne même pas la possibilité de s envoler ! Les ailes sont coupées et je crains que les ogres, qui sont à l extérieur, n attendent qu une seule chose, que tout se casse et que l oiseau soit réellement étouffé et ce ne sera plus qu un oiseau pour le chat. Voilà les cinq questions que je me posais par rapport à la situation que l on vit à Ath. Essayons quand même de faire en sorte que le débat puisse être utile à la fois au local et à la réflexion du Parlement wallon.
M. le Président. La parole est à Mme Bertouille pour poser sa question.
Mme Bertouille (MR). Monsieur le Président, Madame la Ministre, chers collègues, je ne répéterai pas les questions que vient de vous adresser mon collègue, M. Crucke. Effectivement, d après les échos que nous avons eus, sans concertation avec le Conseil de l action sociale, le Président du CPAS d Ath a annoncé son intention de se séparer de ses deux maisons de repos au profit de deux mutuelles. Cette décision apparaît comme surprenante d autant plus que les deux maisons de repos en question sont tout à fait aux normes, qu elles sont en équilibre financier, et qu elles rendent un service à une population fragilisée et garantissent un service neutre et de qualité aux Athois. Et donc, c est la vie de tout un chacun qui est concerné à Ath. Madame la Ministre, quelle est votre position par rapport à ce dossier qui est un exemple de ce qui se déroule au niveau de la Région wallonne? Le Président du CPAS d Ath justifie sa décision par une volonté de recentrer le CPAS sur ses missions de base. Les maisons de repos rentrentelles dans les missions de base des CPAS ? Si oui, encouragez-vous tous les CPAS à agir dans ce sens, et donc, à se «séparer» de leurs maisons de repos ? Enfin, on parle d un partenariat privilégié avec deux mutuelles. À ma connaissance, les autres mutuelles qui existent dans la région n ont pas été contactées. Avez-vous eu des informations à ce sujet? D autres partenariats avec d autres secteurs privés ont-ils également été envisagés?
M. le Président. La parole est à Mme la Ministre Tillieux.
Mme Tillieux, Ministre de la Santé, de l'Action sociale et de l'Égalité des Chances. Madame la Députée, Monsieur le Député, je n'ai pas connaissance de l'éventuelle volonté du Centre public d'action sociale d'Ath, de partager ou de céder la gestion de la maison de repos « la Roselle». J'ai par contre connaissance d'un autre dossier de ce type, celui du CPAS d'Herbeumont qui a cédé la gestion de sa maison de repos « Home la Bonne Espérance» à la fondation « Tounov-Solvay ». Sachez que je n'encourage pas ces privatisations. Je suis tout au contraire attentive au maintien de la diversité de l'offre des lits de maison de repos, notamment par le secteur public qui assure le caractère d'intérêt général de l'activité. Mais vous savez que les secteurs coexistent : privé, commercial, associatif et public. Force est toutefois de constater que pareilles décisions de céder ou de partager la gestion d une maison de repos, relèvent du pouvoir autonome des autorités locales, sous réserve du respect des règles de tutelle. Selon les informations que vous me donnez, il ne s'agit pas d'un transfert vers le secteur commercial, mais d'un éventuel transfert vers le secteur associatif qui assure une mission déléguée de service public. Dans ce cas, il y a transfert de l'activité du secteur public vers le secteur associatif; les subsides aux infrastructures éventuellement octroyés restent acquis car ce dernier secteur étant également éligible aux subventions. Par contre, s'il y avait transfert vers le secteur privé commercial, un remboursement des subsides octroyés serait demandé au prorata de l'amortissement. Pour le reste, il faudrait probablement connaître un peu mieux les intentions pour aller plus avant dans l analyse d un éventuel transfert ou partage, ou cession totale de gestion.
M. le Président. La parole est à M. Crucke.
M. Crucke (MR). Je remercie Mme la Ministre pour sa réponse brève mais précise. Elle est indicative parce que ce que je craignais, c est que ni votre administration, ni le cabinet n aient été informés de ce type de tractation. Il n'est pas ici question de petits homes. On a affaire à des structures qui sont importantes dans le cadre du service, une visibilité conséquente et une efficacité, tant dans la gestion que dans le service qui est donné. On joue ici dans peut-être une valorisation d un outil public pour avoir des recettes qui rentrent dans un outil. Je sais comment fonctionne le capitalisme, mais j ai toujours pu comprendre qu on avait mis certaines balises et vous-même en me répondant, vous les rappelez. Cela m inquiète car cela veut dire qu on ne joue pas dans un cas où difficulté impose solution et là, la richesse des solutions c est d en trouver une. L exemple que vous donnez en plus, celui d'Herbeumont, est instructif car je pense que ce que nous devons conseiller à tous ceux qui sont sur le terrain et s intéressent à ce dossier, c est d aller voir ce qui s'y fait. Certes, comparaison n est peut-être par raison, mais en tout cas, cela permet d avoir des indications de réalisme sur ce qui peut ou ne doit pas être fait. Vous m avez répondu clairement par rapport aux subsides. J aimerais juste avoir une précision, c est que la loi sur les marchés publics est d application, même lorsqu'on fait appel au secteur associatif. C est qu on ne choisit pas un opérateur ou un partenaire par affinité, mais on a plutôt des partenaires en concurrence. Je n ai pas entendu votre réponse à cet égard, mais peut-être qu un signe de la tête Je reviendrai sur cette question délicate parce que je pense que je vois où est la brèche.
M. le Président. La parole est à Mme Bertouille.
Mme Bertouille (MR). Madame la Ministre, je ne suis pas tout à fait rassurée par rapport à la problématique d Ath. Je crains que cette mainmise d un secteur bien particulier ne se développe dans ce secteur des maisons de repos, comme on voit se multiplier toutes ces opérations dans le secteur des hôpitaux. Je ne suis donc pas rassurée quant à l évolution de la situation pour les maisons de repos en Région wallonne.
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