lundi 31 octobre 2005

Question orale de Jean-Luc CRUCKE au Ministre MARCOURT sur "les garanties données aux travailleurs de Duferco

Mme la Présidente. L'ordre du jour appelle la question orale de M. Crucke à M. Marcourt, Ministre de l'Économie, des PME, du Commerce extérieur et des Technologies nouvelles, sur « les garanties données aux travailleurs de Duferco.» et l'interpellation de M. Desgain à M. Marcourt, Ministre de l'Économie, des PME, du Commerce extérieur et des Technologies nouvelles, sur « l'avenir des entreprises sidérurgiques.».
La parole est à M. Crucke pour poser sa question.

M. Crucke (MR). Madame la Présidente, Monsieur le Ministre, chers Collègues, je suis heureux de poser cette question avec M. Desgain, qui a déjà abordé le sujet lors de la séance plénière. C'est un de ces dossiers symbolique pour la Wallonie; symbole, à la fois parce que l'on sait très bien que l'on vient d'un passé extrêmement riche, d'une restructuration difficile, peut-être pas totalement terminée, mais d'un avenir que l'on veut tous, quelle que soit notre approche politique etphilosophique, voir très présent par rapport à tout ce qui est dans ce passé et ce présent. C'est un dossier délicat, on sait que l'on marche sur un certain nombre d'oeufs. On sait aussi que ce dossier ne dépend pas uniquement d'une décision du Gouvernement wallon, donc pas uniquement de la Wallonie, mais je pense que l'on peut y jouer un rôle extrêmement utile, sensible et opportun. Je ne dois pas vous rappeler les dernières grèves qui ont quand même ramené pas mal de monde en rue c'était le 30 septembre, il y avait entre 3.000 et 4.000 métallos. On sait que lorsqu'ils se mobilisent, ils ne le font généralement pas par demimesure. Je citais l'expression d'une inquiétude, mais aussi une volonté de dire qu'ils étaient partie prenante pour que cette entreprise en particulier puisse continuer à vivre, et bien vivre. C'est aussi une rencontre qui a eu lieu avec le Gouvernement wallon, vous-même et le Ministre-Président. Là, je pense qu'il est intéressant que l'on puisse avoir le contenu de cette rencontre, le contenu du débat, le contenu des décisions qui ont été prises, les assurances qui ont été éventuellement données, le schéma qui a pu être développé, schéma complet ou incomplet: comment a-t-on abordé le sujet et comment l'a-t-on abordé vis-à-vis de l'avenir? Quelle est la stratégie développée par la Wallonie et par son gouvernement en la matière? J'avoue avoir été un peu surpris par le propos de M. Antoine, encore que connaissant l'intéressé, il n'y a plus grand chose qui m'étonne lorsqu'il prend la parole, et je reprends ses mots: « Qui va décider d'élever le ton?». Je veux bien que l'on élève le ton, et il faut pouvoir le faire de temps en temps, je le fais moi-même, mais ici, on joue avec de nombreux emplois, directs et indirects. Quand je vois une entreprise qui, non seulement a pignon sur rue, mais qui a aussi des moyens financiers importants, ce qu'il faut continuer à faire, c'est privilégier le contact, les relations, la négociation et surtout la relation de confiance. Il n'y a rien de pire qu'une relation de confiance qui se brise. Je ne veux pas du tout que l'on joue au même jeu avec une entreprise comme Duferco. Mais cela n'empêche pas d'être ferme dans ce que l'on dit et dans la volonté qui doit être exprimée. Alors, quelle a finalement été la stratégie? Est-on dans une stratégie qui est toujours celle des vertus de la négociation celle en laquelle je crois ou bien celle du ton qui doit être élevé, du poing tapé sur la table? Quelle est finalement la ligne de conduite qui a été choisie par le gouvernement dans ce dossier, et en particulier par vous-même qui êtes en charge du département?

Mme la Présidente. La parole est à M. Desgain pour développer son interpellation.

M. Desgain (Ecolo). Madame la Présidente, Monsieur le Ministre, chers Collègues, face au silence du groupe Novolipetsk et aux inquiétudes légitimes des quelques 3.000 travailleurs qui en dépendent, je vous ai interrogé en question d'actualité, lors de la dernière séance publique, sur le calendrier d'action du gouvernement à propos de l'avenir des entreprises du groupe Duferco- Novolipetsk qui sont regroupées au sein de la société Steel Invest and Finance. En réponse, vous avez annoncé des rencontres prochaines - ce dont je me suis réjoui -, tant avec la direction du groupe Duferco qu'avec la direction du groupe Novolilpetsk. Vous avez également fait état de la disponibilité de la Région wallonne à intervenir dans le cadre des dispositions européennes en vigueur en matière de respect des règles de la concurrence.
Je voudrais aujourd'hui vous demander de faire le point plus sur le fond du dossier, parce que les inquiétudes sont vives. Si les outils de Clabeq tournent de façon satisfaisante, on sait que depuis deux ans, le groupe a perdu 649 emplois, depuis mai 2008, ce qui n'est quand même pas négligeable, que toute la phase à chaud de Carsid est à l'arrêt depuis deux ans et que l'on n'annonce pas de reprise. C'est quand même préoccupant, parce que quand on regarde les concurrents les plus directs, les unités de production qui sont à peu près dans les mêmes niveaux de prix de revient, la seule qui ne tourne pas est celle de Carsid, les autres ont repris leurs activités. C'est évidemment particulièrement préoccupant. Je voulais vous demander de nous faire le point sur le fond du dossier et sur les perspectives réelles de maintien du périmètre industriel parce qu'il a sa cohérence. Les forces vives de la région de Charleroi l'ont d'ailleurs rappelé dans une prise de
position toute récente. Je voulais aussi vous interroger sur les perspectives de développement futur, afin que l'on puisse soutenir l'inscription de ce secteur dans le cadre du développement durable. Il y a déjà des investissements qui ont été fait antérieurement dans ce sens-là. Il y a du potentiel. Je voulais vous interroger principalement par rapport à cela, d'autant que l'on reste dans une situation économique qui est très particulière, la consommation d'acier n'a pas encore retrouvé le niveau qu'elle avait avant. On peut le lire comme étant une surcapacité en tout cas, pour le moment de production au sein de l'Union européenne.
Quand on voit les perspectives sur certains marchés, notamment le marché automobile, duquel la sidérurgie wallonne dépend pour partie, elles ne sont pas particulièrement à la hausse non plus, ce qui pose un problème pour ce secteur important, qui est un des secteurs structurants de l'économie wallonne. Dans ce contexte, et afin d'éviter une délocalisation du savoir-faire dont nous disposons en Wallonie, et un éparpillement potentiel des outils existants, ou leur démantèlement, le risque peut exister, à ce stade-ci, je ne lis pas très bien dans la stratégie de l'investisseur russe. Il souhaite poursuivre l'activité ou juste reprendre ce qu'il juge comme étant les meilleurs morceaux qui apportent la valeur ajoutée la plus élevée? Dans tous les cas, il serait opportun de poursuivre les investissements vers les productions à haute valeur ajoutée et les installations de La Louvière, de Charleroi et de Clabecq permettraient justement des investissement dans ce sens-là. Par exemple, sur Carsid, le traitement sous vide, l'investissement est gelé, alors que c'est effectivement un investissement intéressant qui permet d'élargir la gamme de produits, donc de trouver de nouveaux clients. Dans ce cadre, je voudrais vous demander si vous pouvez me donner les éléments du schéma industriel que le gouvernement souhaite voir mis en place ou maintenu, afin de pérenniser le plus grand nombre d'emplois possibles et de me décrire le périmètre auquel le gouvernement pense. Dans ce cadre, quelles sont les possibilités d'action dont vous disposez afin de pérenniser le schéma existant, c'est en tout cas mon souhait le plus cher, ou de concrétiser ce schéma? D'autres scénarios sont-ils envisagés, au cas où les actionnaires, au bout de la négociation, refuseraient de remettre en activité la filière fonte à Charleroi? Cela me paraîtrait surprenant, parce que je pense qu'il y a du potentiel effectivement. Cette question a-t-elle déjà été envisagée avec soit la recherche d'autres actionnaires que ceux existants pour le moment, soit la recherche avec eux d'autres investissements pour conserver une cohérence dans le schéma industriel et conserver le plus grand nombre possible d'emplois ?
Je dirais que c'est plutôt un plan B. Moi, je suis sur le plan A d'abord, mais je pense que la question mérite en tout cas d'être posée. Et vous demander si des synergies avec des entreprises existantes sont possibles.
Je vous avais déjà interrogé, il y a deux ans, sur l'évolution du dossier et vous aviez fait référence à l'étude de La place conseil qui montre qu'effectivement il y a un potentiel. Je voulais vous demander s'il y avait eu une actualisation de cette étude ou si, en fonction des éléments, je n'avais vu que la synthèse, je n'avais pas pris connaissance de l'étude complète on peut réapprécier l'opportunité, l'intérêt que cette activité puisse se
poursuivre, si on sait bien l'évaluer, notamment par rapport aux perspectives d'évolution du secteur automobile. Parce que je pense que l'on doit intuitivement, je dirais, à moyen terme, poursuivre la diversification pour ne pas être uniquement dépendant de ce secteur-là, ou l'être moins que ce que l'on est aujourd'hui. Enfin, j'élargis ma question au niveau européen, puisque la Belgique a la présidence du conseil des ministres de l'industrie, pour savoir si vous avez eu des contacts afin de voir s'il était possible d'organiser ou de gérer en-dehors d'une stricte politique de concurrence, je dirais, absolue, d'éventuelles répartitions des baisses temporaires de capacité de production entre les différents opérateurs, ou entre les différents grands bassins sidérurgiques, dans une perspective de pérenniser les activités sur l'ensemble des grands bassins et dans une perspective sociale aussi de limiter au maximum les pertes d'emplois?
Enfin, je pense qu'il est aussi important d'inscrire les activités sidérurgiques dans le développement durable et sur le plus long terme, et s'il est question de relancer certains outils ou de s'engager dans de nouveaux investissements, la réflexion au niveau des émissions de CO2 et des impacts environnementaux doit se poursuivre ainsi que la réflexion sur les gammes de produits à développer pour des usages futurs. Et donc, je voulais aussi savoir si vous aviez des éléments pour voir comment on peut améliorer le positionnement du
groupe Duferco dans cette perspective-là. Si on est sur les émissions de CO2, je pense que, quand on voit les réflexions qui sont en cours au niveau européen sur le passage de 20% à 30% de réduction des gaz à effet de serre sur le territoire européen, ou de mise en place d'une taxe carbone, je pense qu'il y a quelques secteurs, dont on sait que si on met ce type de mesures-là en place, connaîtront des difficultés parce que les pays concurrents ne sont pas engagés dans un processus de réduction d'émissions de CO2. Dans ce cas-là, je pense qu'il faut clairement prévoir des mécanismes de compensation au niveau de l'Union européenne pour qu'on ne soit pas victime d'une concurrence déloyale sur les émissions de gaz à effet de serre. Je n'ai pas de problème à le mettre en place quand les choses sont tout à fait objectivées. Pour le secteur des cimenteries, c'est très clair. Pour le secteur de la sidérurgie, j'ai moins d'informations précises aujourd'hui. Autant le dire ici, s'il y a une concurrence environnementale sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre par rapport à des régions qui n'ont pas d'objectifs ambitieux, cela me paraît clair que l'Union doit mettre en place un dispositif de protection de son secteur pour éviter un dumping environnemental. Dans tous les cas, je pense qu'il est indispensable de mettre en place toutes les actions possibles pour assurer un avenir à court et à moyen termes aux entreprises sidérurgiques présentes dans le Hainaut, je rajoute, parce que Tubize, ce n'est pas le Hainaut, même si c'est très proche, l'Ouest du Brabant wallon et de pérenniser le plus grand nombre d'emplois possible et d'obtenir, voire de soutenir lorsque c'est possible, des investissements pour améliorer les productions et les orienter vers le développement durable. Ceci implique une forte mobilisation des forces vives de ma région et de Wallonie. J'espérais d'ailleurs qu'en déposant une interpellation d'autres collègues de la région de Charleroi ou du Centre se joignent à mon interpellation parce que les forces vives carolorégiennes ont pris une position unanime pour défendre la sidérurgie, et de demander au gouvernement de le faire. Peut-être le fait qu'on soit un vendredi fait que certains sont restés dans leur commune et n'ont pas fait le déplacement jusque Namur. Je n'en sais rien, mais j'espérais en tout cas qu'il y ait un plus grand nombre d'élus qui se joignent à cette interpellation, parce que je pense vraiment que le dossier est sensible, que le nombre d'emplois concernés, le nombre d'emplois directs concernés, est important et que, sur la structuration de l'économie de cette partie-là de la Wallonie, je pense qu'il y a un enjeu tout à fait critique. Je pense qu'on doit aussi mobiliser nos intelligences technologiques et politiques afin de penser le futur de cette sidérurgie et d'investir aujourd'hui dans cette perspective pour garder de l'activité économique et le maximum d'emplois possible.

Mme la Présidente. La parole est à M. le Ministre Marcourt.

M. Marcourt, Ministre de l'Économie, des PME, du Commerce extérieur et des Technologies nouvelles. Je voudrais tout d'abord faire une remarque liminaire.
Le dossier Duferco n'est pas le dossier de Charleroi. Il n'est pas le dossier de La Louvière. Il n'est pas le dossier de Clabecq. Il est le dossier de la Wallonie. Il ne s'agit pas, à aucun moment, de dire, parce que l'implantation se situe à un endroit particulier de la Wallonie, que cela concerne, je dirais même, principalement, voire prioritairement, les gens qui habitent cette région. Il est clair que la plupart des travailleurs viennent de cette région, mais c'est un dossier qui concerne la Wallonie et on n'est pas un bon ou un mauvais carolo parce qu'on pose une question sur ce thème. Je pense que c'est le dossier de tout le monde.
Deux, évitons bien de dire, et à Charleroi, et à La Louvière, il y a Clabecq, il y a le groupe Duferco et il faut traiter l'ensemble du groupe Duferco et essayer de voir comment on évite de dire ce qui est bien pour l'un n'est pas bien pour l'autre. Moi qui ai vécu un moment donné où, par rapport à Hainaut Sambre et à d'autres sujets, on disait, au sujet de Cockerill, que ce qui est bon pour l'un n'est pas bon pour l'autre. Je pense que tout cela est derrière nous. Il faut absolument éviter de retomber dans ce qui m'apparaît être un travers.
Deux, vous avez abordé le CO2. Je pense que les Européens feraient bien, un peu comme les Coréens du Sud le font aujourd'hui, de ne pas considérer que l'industrie est le coeur de la diminution. Il y a trois grands secteurs: il y a les ménages, il y a le transport et il y a l'industrie. C'est une erreur fondamentale de faire porter l'essentiel de l'effort sur l'industrie. Il faut demander à l'industrie de faire des efforts conséquents, mais pas au mépris des efforts à faire par les autres secteurs.
Je constate qu'en Corée du Sud où j'ai été récemment, les efforts sont aussi faits considérablement sur l'habitat. L'alliance emploigouvernement prouve que le gouvernement a bien compris qu'il y avait là une opportunité. Au niveau européen, on est encore un peu trop, me semble-t-il, dans un schéma où on a transformé le CO2 en marché plutôt qu'en objectif citoyen. Constatons, pour rentrer dans le coeur de vos questions, qu'on n'a jamais produit autant d'acier dans le monde qu'en 2009, sauf dans une région, l'Europe, après les États-Unis. En Amérique du Sud et en Asie, les productions ont explosé. La consommation d'acier en Europe de l'Ouest reste insatisfaisante. Les prévisions. Que vaut une prévision économique puisqu'elle prend des paramètres par convenance plutôt que par rationalité? Évidemment, puisqu'on essaie d'envisager l'avenir, on pense qu'on ne pourra retrouver le niveau de consommation d'acier qu'en 2015 environ. J'espère plus vite, mais on me dit que la production 2007 en Europe de l'Ouest ne sera atteinte qu'à l'horizon 2015. C'est vite et c'est loin en termes de temps. C'est rapide parce qu'à l'échelle d'une économie, c'est peu d'années. Pour les travailleurs qui sont concernés, c'est extrêmement long. Depuis 2006, nous vivons avec la convention d'un holding intermédiaire, appelé Cif, où Duferco, d'une part, et NLMK, Novolipetsk, d'autre part, détiennent des parts à 50-50. Il est prévu qu'en 2010, la possibilité de transférer le contrôle, voire l'intégralité du contrôle du holding Cif, puisse passer de Duferco vers Novolipetsk. Cela ne simplifie pas les choses, reconnaissonsle. À partir du moment où il y a eu des changements d'actionnaires, dans une situation économique compliquée, reconnaissons que cela n'aide pas à définir une stratégie claire et perceptible, d'autant que, si j'ai bien compris les conventions datant de 2006, c'est avant la crise, et l'exécution des conventions, c'est 2010, après la crise. Je pense que tout qui a déjà vu des conventions peut se dire qu'il y a donc des interprétations qui peuvent intervenir. Puisque vous avez longuement parlé de Carsid, reconnaissons aussi que l'absence d'une cokerie est une détérioration significative de la rentabilité immédiate de l'outil. Nous avions espéré avoir du coke de bonne qualité. La mine qui produisait ce coke de bonne qualité a été fermée pour un accident minier, ce n'est pas le seul pays, ce n'est pas qu'en Russie qu'il y a des accidents miniers, la presse relate les sauvetages ou les catastrophes humaines à intervalles réguliers, mais on doit constater cet élément. Vous avez abordé l'étude de la place conseil. Que fait-on? Comme vous le savez, je l'ai déjà dit, on a rencontré, MM. Jean-Marc Nollet, André Antoine et moi-même le Ministre-Président Rudy Demotte, ayant une manifestation européenne ce jour-là, n'a pas pu assister à la rencontre avec les organisations syndicales. On a mis les choses à plat. Notre volonté, aujourd'hui, c'est effectivement d'envisager, avec les deux groupes, puisque les deux groupes sont toujours là, mais en reconnaissant qu'il y en a un qui pense à sortir pendant que l'autre pense à contrôler tout, donc de nouveau, il ne faut pas faire un long dessin pour savoir avec qui il faut plus parler, même si parler avec Duferco reste important, notamment sur toutes les hypothèses de travail, nous travaillons. Si la rencontre avec M. Lisin qui est le patron de Novolipetsk n'a pas encore eu lieu, c'est justement parce que nous travaillons de manière approfondie avec ses collaborateurs, avec mes collaborateurs, avec les collaborateurs de la SOGEPA, avec les collaborateurs du groupe Duferco pour préparer la rencontre. Il ne sert à rien d'aller le voir et de lui dire «Vous devez faire cela.» Il faut justifier pourquoi nous pensons que ce qu'il doit faire mérite d'être fait. Je pense que, lorsque vous allez voir quelqu'un, il ne suffit pas dire « Vousne pouvez pas ne pas faire cela», si vous ne le justifiez pas. Nous travaillons de manière concrète avec des économistes, avec des personnes qui connaissent très bien le secteur sidérurgique pour expliquer en quoi il est de l'intérêt de Novolipetsk de maintenir en activité, non pas de maintenir, de relancer l'activité de tous les outils. Il y en a un qui fonctionne parce que sa niche est positive, c'est Clabecq. On n'a pas toujours dit cela, mais cela prouve qu'il n'y pas de vérité intangible dans ce secteur et que se battre est une chose positive. Je pense que Carsid, que La Louvière ont un avenir
économique, qu'ils ont, comme je l'ai indiqué sur la phase à chaud, un handicap, c'est l'absence de cokerie, mais qu'on décide d'en refaire une ou pas, ne résout pas le problème immédiat. Il faut donc aller justifier pourquoi nous pensons ce que je pense il est possible de relancer aujourd'hui. Il y a un engagement aujourd'hui assez clair, c'est de dire, les actionnaires disent: lorsque les conditions de marché seront réunies, nous relancerons l'activité. La question assez claire, c'est donc de déterminer quand on peut dire que les
conditions de marché sont réunies. Sur cette question, reconnaissons que nous pouvons avoir des opinions extrêmement différentes, en fonction des paramètres que nous allons injecter dans cette équation. C'est ce que nous faisons aujourd'hui. Je pense donc que, durant le mois de novembre, nous n'aurons pas terminé tous ces travaux, mais nous parlons et nous avons des contacts avec les différentes organisations syndicales tant au niveau employés qu'ouvrier, pour expliquer les choses. C'est l'engagement que, avec mes collègues, nous avons pris lorsque nous avons rencontré les organisations syndicales: assurer la transparence, assurer la rapidité. C'est un dossier complexe. Vous avez évoqué un Plan A et un Plan B.
Comme toujours, il faut envisager toutes les hypothèses, c'est ce que nous faisons. Mais, aujourd'hui, nous avons des interlocuteurs. C'est à leur égard que nous entendons parler, en tentant non seulement de convaincre sur notre bonne mine, mais de convaincre sur base d'arguments qu'il y a un certain nombre de paramètres qui nous permettent de penser qu'il est possible, envisageable, dans une échéance qui ne soit pas lointaine, de relancer l'ensemble des activités dans le maximum de périmètres puisque c'est une des demandes des organisations syndicales, c'est le maintien du périmètre. On a beaucoup parlé des produits plats mais il y a aussi des produits longs, comme vous le savez. Là, il y a des différences d'analyse entre les gens, mais ce n'est pas aujourd'hui qu'il faut rentrer là-dedans. Notre objectif, c'est le périmètre tel que demandé par les organisations syndicales. En termes de soutien, nous avons dit que nous allions aussi loin que l'encadrement européen nous y autoriserait.
Vous avez abordé et c'est une question importante, même si vous ne l'avez pas abordée explicitement comme ça, je parle de M. Desgain -, c'est la compétitivité externe de l'Europe. C'est un des sujets que j'ai mis, en tant que président du Conseil européen « compétitivité-filière industries» d'être très attentifs à la compétitivité externe de l'Europe. Il faut que l'Europe se préoccupe de sa compétitivité externe. Il n'y a pas l'Europe unie même si c'est le premier marché mondial, je le rappelle et il faut réfléchir comment on le gère par rapport à la Chine, à la Russie, aux États-Unis ou au Brésil, l'Inde. C'est quoi nos règles de compétitivité?
Sur la question de la taxe carbone, il n'y a pas d'homogénéité de points de vue entre les États membres et il n'y a pas d'homogénéité de points de vue entre les industries. Certaines sont pour, certaines sont contre. Cela mériterait sûrement un débat.
Deux, vous avez abordé le plan acier pour faire bref, qu'Etienne Davignon avait, il y a maintenant un certain temps, mis. Il n'y a pas de consensus au sein des États membres pour défendre un plan acier. On peut le regretter, c'est comme ça. Vous avez, par contre, justement dit qu'il est très rare aujourd'hui, même si, reconnaissons-le, des hauts fourneaux qui avaient été relancés, ont été arrêtés et je ne parle pas de l'incident à Ougrée, que connaît bien M. Onkelinx et dont il me parlera, je suppose, dans quelques instants mais le haut fourneau de Florange, il y a plusieurs hauts fourneaux en France qui, aujourd'hui, sont à l'arrêt
alors qu'ils avaient été remis en évidence. Je vais m'arrêter ici en disant qu'il y a une chose claire : on ne peut laisser les travailleurs dans l'élément d'incertitude tel qu'il est aujourd'hui. Mais il serait encore plus dommageable que, par une démarche téméraire, voire mal préparée, la réponse soit: non, on arrête. Vous me direz qu'il y a un certain nombre de conséquences à cela et vous auriez raison de me le dire, mais je pense vraiment qu'il faut toujours travailler et c'est vraiment l'objectif. J'ai donc programmé la possibilité de me rendre en Russie, durant le mois de novembre. C'est vers ce schéma-là qu'on ira. Tous mes collègues qui voudront venir avec moi seront les bienvenus parce que ce n'est pas mon dossier, c'est le dossier du gouvernement. Nous aurons l'occasion d'en reparler. La volonté est vraiment aujourd'hui de démontrer, de la manière la plus objective possible, l'environnement économique du groupe Duferco en Wallonie.

Mme la Présidente. La parole est à M. Crucke.

M. Crucke (MR). Monsieur le Ministre, je partage vos remarques préliminaires sur le fait que ce dossier est un dossier wallon et qu'il ne peut pas être divisé entre sous-régionalisme, ni sites. S'il a une chance de sortir par le haut, c'est parce qu'on le voit dans une stratégie globale sur la Wallonie. Cela me semble une évidence. Deux, le dossier n'est pas totalement mûr. Vous annoncez vous-même votre déplacement en Russie, ce qui est une bonne chose. Je suis prêt à entendre ce discours-là aussi que de dire : on ne rencontre pas pour le plaisir de rencontrer. Le jour où on rencontre, il faut que le dossier soit complet, qu'on le maîtrise totalement, complètement et là, ça vaut la peine effectivement d'avoir ce dialogue, ce débat. Il sera d'autant plus attendu que vous l'annoncez de la sorte, parce qu'il y a un élément incontournable et on le sait, c'est que le groupe russe sera majoritaire. C'est vraiment là que les discussions doivent aller, c'est avec eux que la discussion doit avoir lieu. Simplement, je pense que, dans votre discussion, il faudra aussi que des éléments qui sont renseignés, à savoir l'éventuelle construction d'un nouveau fourneau en Russie. Cela fait partie du débat. C'est une manière de donner une orientation au dossier wallon. Il faut, à un moment donné que, là-dessus, il y ait une clarification, que le plan industriel,
finalement, nous soit dévoilé, vous soit dévoilé mais le soit également aux travailleurs. Sans vouloir faire de comparaison une raison, il faut quand même rappeler que cette entreprise a été rachetée pour un euro symbolique. Donc, quelque part, la bonne volonté, elle est déjà été prouvée et c'est parce qu'on sait qu'il y a une série de concessions qui ont été faites je pense à juste titre qu'à un moment donné, il y a des craintes qui, légitimement, se lèvent sur le plan du personnel. Je l'ai dit dès le départ aussi: je pense qu'il n'y a pas
d'autre solution que de négocier. Regardez la catastrophe d'Anvers avec Opel. Si on pouvait prendre un exemple contraire de ce qu'il ne faut pas faire, c'est Opel Anvers. C'est avec une certaine confiance que je vous vois aborder ce dossier comme vous le faites. J'imagine bien le poids des responsabilités. Je sens bien le regard des uns et des autres. Ils regarderont sûrement ce dossier après que vous ayez été en Russie et que la communication sera sortie de cette rencontre.

Mme la Présidente. La parole est à M. Desgain.

M. Desgain (Ecolo). Madame la Présidente, je suis rassuré, mais je n'en doutais pas, que le gouvernement en fasse un dossier du gouvernement, que ce ne soit pas juste un dossier juste du Ministre de l'Économie et que ça soit effectivement bien un dossier wallon. C'est comme ça que je le conçois, d'autant plus que les différents outils sont complémentaires entre eux. Il y a donc effectivement un intérêt à tout mettre en oeuvre pour maintenir le périmètre industriel et même, si on peut, en renforcer la cohérence. Cela me paraît quelque chose de tout à fait évident et les différentes régions de Wallonie, les différents bassins industriels y ont effectivement un intérêt. Je partage aussi votre position sur le fait que la fermeture de la cockerie a vraiment
considérablement fragilisé le schéma industriel et que l'option idéale est, effectivement, la remise en service d'une cockerie: celle existante avec les améliorations environnementales qui s'imposent ou une nouvelle. Mais, je pense aussi que cela vaut la peine, quand on reparle des investissements parce qu'il faudra en faire, à un moment donné que la réflexion soit quand même engagée sur la réduction des émissions de gaz à effets de serre, entre les différents types d'investissements. Chaque fois qu'on peut améliorer l'efficacité énergétique d'un dispositif et quand on passe d'une cockerie qui a 40 ans d'âge à une cockerie moderne, on a des améliorations, on peut vraiment avoir un avantage compétitif lié à la réduction des émissions de gaz à
effets de serre. Dans ce cadre-là, je trouve qu'il faut le faire, de façon très claire. Cela a en tout cas un intérêt industriel à court terme et dans une vision à long terme. Je ne peux donc ici que relayer les positions des forces vives carolorégiennes. Je reprends ma petite casquette locale ici, mais ce n'est pas tous les jours que les Carolos sont tous d'accord entre eux sur un dossier important. Quand on voit ce qui se passe sur l'enseignement supérieur pour le moment et les pôles universitaires, ça a l'air de chahuter un peu plus. Ici, je relaie donc vraiment l'importance de conserver un schéma industriel qui soit complet et cohérent et si on peut en renforcer la cohérence, c'est quelque chose qui va tout à fait dans le bon sens.
Petit complément sur les émissions de gaz à effets de serre : effectivement, il n'y a pas que l'industrie qui doit faire le travail. L'alliance emploienvironnement, vous l'avez dit, devrait s'engager et apporter sa contribution. Je pense aussi que le gouvernement doit faire un travail soutenu sur la question du transport parce qu'elle est un peu plus complexe et qu'il faut aussi se donner des outils ambitieux pour que, au niveau des transports, on puisse avoir une réduction effective des émissions, parce que, depuis la mise en oeuvre du protocole de Kyoto, c'est le seul secteur qui voit vraiment ses émissions augmenter sensiblement. Personne n'est encore parvenu, en Wallonie, à les juguler. Un autre qu'on devra regarder un jour plus attentivement, ce sont les télécommunications parce que, l'air de rien, c'est un secteur qui a une consommation d'énergie importante
.
M. Marcourt, Ministre de l'Économie, des PME, du Commerce extérieur et des Technologies nouvelles. C'est pour ça qu'on fait Euro Green IT.

M. Desgain (Ecolo). Tout à fait. Je ne peux donc que vous encourager à préparer au mieux le dossier et les rencontres, dans l'objectif de relancer l'activité, de pérenniser les outils et de les inscrire dans la perspective du développement durable parce que c'est effectivement une opportunité industrielle qui me paraît tout à fait
significative.

Mme la Présidente. L'incident est clos.

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