Caisse d'Epargne de la Ville de Tournai: Question de JL Crucke et réponse de Didier Reynders
03 Questions jointes de
- M. Jean-Luc Crucke au vice-premier ministre et ministre des Finances et des Réformes
institutionnelles sur "la Caisse d'Épargne de Tournai" (n° 4013)
- Mme Juliette Boulet au vice-premier ministre et ministre des Finances et des Réformes
institutionnelles sur "la Caisse d'Épargne de Tournai et la gestion des dividendes par le collège
communal" (n° 4577)
03.01 Jean-Luc Crucke (MR): Monsieur le président, monsieur le vice-premier ministre, cette bonne ville de Tournai est sans doute l'une des dernières villes de Wallonie à disposer de sa propre caisse d'épargne.
Comme pour tout organisme financier de ce type, les dividendes doivent être reversés à la caisse
communale – rien que de très normal jusque là. Cela ne semble toutefois pas toujours avoir été le cas avant le 1er janvier 2008. Pire: cela ne fut jamais le cas précédemment, puisqu'il semble que 10% des montants aient été affectés de manière discrétionnaire par le Collège. Jadis, on parlait des "petites oeuvres", en l'occurrence celles de l'évêque. Puis, ce fut le Collège communal qui gratifia de ses bontés les associations sportives, culturelles, etc.
Certains crient au clientélisme, d'autres s'offusquent de l'absence de délibération par le Conseil communal à ce sujet. Nous pouvons évidemment comprendre de tels griefs. Toutefois, certains membres de la majorité communale et le secrétaire communal ont justifié l'utilisation de ces fonds en rappelant que la caisse était contrôlée par la Commission bancaire, financière et des assurances (CBFA), laquelle n'aurait jamais toléré des pratiques répréhensibles.
Monsieur le vice-premier ministre, entre-t-il dans les compétences de la CBFA de contrôler la répartition des dividendes? Dans cette hypothèse, certains éléments ont-ils échappé à sa vigilance? Ou, au contraire, a-telle émis des remarques? Si oui, lesquelles et à qui furent-elles adressées?
Comprenez bien que ce n'est pas l'épargnant de la Caisse d'Épargne de Tournai qui vous pose la question.
Je ne tiens pas à déclencher un conflit d'intérêts. Simplement, plusieurs citoyens se demandent ce qu'il advient de leur argent placé dans cette caisse. C'est aux fins de leur apporter une réponse que je vous interroge.
03.02 Juliette Boulet (Ecolo-Groen!): Monsieur le président, je me joins à mon collègue M. Crucke tout en rappelant que ce problème fut soulevé en Conseil communal par mes collègues écologistes.
Sans vouloir répéter toute cette histoire, je signale que certains bénéfices de cette caisse d'épargne avaient
été utilisés pour payer les échevins et le bourgmestre dans le but de diminuer leurs revenus imposables.
Certes, cette pratique fut corrigée en son temps, mais après qu'eut été mise en évidence l'existence de
nombreuses dérives.
Comme l'a rappelé M. Crucke, le Collège communal s'était défendu en prétendant que si de tels
agissements avaient été illégaux, la Commission bancaire serait intervenue. Est-ce bien la vérité? A-t-elle
été informée? Avez-vous obtenu des renseignements à ce propos?
Enfin, la pratique ici relevée est-elle légale?
03.03 Didier Reynders, ministre: Monsieur le président, chers collègues, la Caisse d'Épargne communale de la ville de Tournai est la dernière caisse d'épargne communale régie par l'article 64 de la loi du 22 mars 1993 relative au statut et au contrôle des établissements de crédit. Son statut est très particulier dans la mesure où sa personnalité juridique ne se distingue pas de celle de la commune dont elle est l'émanation.
Se distinguant en cela des autres établissements de crédit, l'article 64 précité limite le type d'activités que peut exercer une telle caisse mais la soumet néanmoins au contrôle de la CBFA au même titre que les banques.
La loi bancaire du 22 mars 1993 a pour objet de régler, dans un but de protection de l'épargne publique et de bon fonctionnement du système du crédit, l'établissement, l'activité et le contrôle des établissements de crédit opérant en Belgique. À cette fin, la CBFA est chargée de contrôler l'organisation d'un tel établissement ainsi que les caractères adéquats de son financement et la prudence de sa gestion. La CBFA peut intervenir si elle constate que l'établissement soumis à son contrôle ne fonctionne pas en conformité avec les dispositions de cette loi ou que sa gestion ou sa situation financière est de nature à mettre en cause la bonne fin de ses engagements (article 57 de la loi du 22 mars 1993).
En ce qui concerne l'allocation des dividendes, il convient de distinguer, d'une part, les phases relatives à l'établissement des comptes et à la distribution de dividendes et, d'autre part, les finalités auxquelles la commune déciderait d'allouer les bénéfices distribués.
En ce qui concerne la phase d'établissement des comptes et donc la détermination d'un éventuel bénéfice, celles-ci relèvent naturellement du contrôle révisoral auquel est soumise la Caisse d'Épargne communale de la ville de Tournai et du suivi de la CBFA. De même, la décision de distribuer les bénéfices ainsi déterminés
relève des préoccupations de la CBFA, dans la mesure où une telle distribution est susceptible d'affecter la solvabilité de l'établissement. La solvabilité d'un établissement de crédit est en effet contrôlée via divers ratios afin de veiller à ce que l'établissement dispose en permanence de fonds propres suffisants. Dans le cas de la Caisse d'Épargne communale de la ville de Tournai, des exigences statutaires additionnelles aux exigences légales et réglementaires complètent encore le niveau de solvabilité à respecter.
L'examen de la CBFA concernant une éventuelle distribution des bénéfices en ce qu'elle relève du suivi de la solvabilité de la Caisse ne doit pas être confondu avec la question de savoir à quoi vont servir les bénéfices ainsi distribués. Il n'entre en effet pas dans la compétence de la CBFA de surveiller les fins auxquelles sont destinés les bénéfices ainsi distribués.
En d'autres termes, la nature des projets auxquels sont alloués les bénéfices ainsi distribués ne relève pas de la compétence de contrôle de la CBFA . L'usage que le bénéficiaire fait de ce dividende échappe donc aux prérogatives de contrôle de la CBFA, dans la mesure où il est étranger à l'activité de l'établissement luimême
et est sans impact sur sa situation financière.
Pour le surplus, la question en cette matière relève de l'appréciation du pouvoir de tutelle des villes et des communes. Il y a évidemment une différence importante entre l'impact de la distribution de dividendes sur la solvabilité de l'institution qui est contrôlée par la CBFA et l'affectation de dividendes elle-même. Une fois qu'il a été décidé de distribuer des dividendes, le contrôle relève exclusivement de l'autorité communale ellemême
mais de la tutelle sur les villes et communes et non de la CBFA.
03.04 Jean-Luc Crucke (MR): Monsieur le président, je remercie le vice-premier ministre pour sa réponse et ce, à double titre.
D'abord, pour avoir confirmé que cet argent est bien celui de tous les Tournaisiens, représentés par la ville de Tournai. Il appartient donc bien au conseil communal d'en délibérer et non à quelques collégiens réunis une fois par semaine en fonction de projets subjectifs. Cet aspect dépend d'ailleurs davantage du ministre wallon qui, questionné sur le problème, n'y a pas apporté beaucoup d'éléments de réponse, comme à son habitude.
Ensuite, je suis satisfait d'apprendre qu'on replace la CBFA là où elle doit se trouver en lui précisant son rôle. En aucune manière, elle n'a couvert l'affectation des fonds à différents bénéficiaires, comme cela avait pourtant été prétendu par d'aucuns au sein de cette bonne ville. Voilà qui a le mérite d'être clair au point que ceux qui l'ont prétendu pourront dorénavant infirmer leurs prétentions ou leurs affirmations.
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