dimanche 8 avril 2007

Nouvelle réforme de la PAC:le point avec Sabine Laruelle

Nouvelle réforme de la PAC – en débat à la Chambre 08 04 2008

10 Question de M. Jean-Luc Crucke à la ministre des PME, des Indépendants, de l'Agriculture et de la Politique scientifique sur "la nouvelle réforme de la PAC" (n° 4011)

10.01 Jean-Luc Crucke (MR): Madame la ministre, je voudrais revenir sur la réforme de la PAC après la dernière déclaration – la dernière en date et sans doute pas l'ultime – de la commissaire Fischer Boel qui espère obtenir un accord de l'ensemble des États membres pour 2008 et qui présentera la réforme le 20 mai à la Commission. Au-delà de 2008, on tombera dans le principe de la codécision et l'avis du Parlement deviendra nécessaire; c'est ce qu'elle semble vouloir éviter. Le dossier est sensible, en raison de grandes différences entre les agricultures des pays européens. En outre, on peut comprendre les difficultés quand on touche à l'un des éléments les plus importants du budget européen.
J'aurais voulu que vous fassiez le point sur ce sujet et que vous nous fassiez connaître la position de la Belgique dans ce dossier. Partagez-vous l'ambition de la commissaire quant aux dates et quant au fond?
Une réforme de ce genre nécessite des modifications d'ordre économique tout en préservant la sécurité alimentaire de l'Europe et de chaque État, les équilibres mondiaux en la matière, et en luttant contre les changements climatiques, ce qui fait beaucoup pour une seule réforme. C'est pourquoi j'aimerais connaître le point de vue de la ministre sur la question.

10.02 Sabine Laruelle, ministre: Monsieur le président, monsieur Crucke, comme vous l'avez dit, la Commission a présenté un document qui concernait le bilan de santé. Il ne s'agit donc pas de redéfinir la Politique agricole commune pour l'après 2013 mais bien d'adapter le système actuel pour le rendre plus performant, plus simple et plus en adéquation avec les réalités nouvelles des agriculteurs.
Nous avons eu un premier cycle de discussions au sein du Conseil. Le Conseil du 17 mars a pu approuver les conclusions de la Commission, qui va pouvoir préparer les textes législatifs. Ces conclusions ont été adoptées à l'unanimité moins deux: la Lettonie et la Tchéquie qui se sont abstenues.
L'ensemble des États membres, moins les deux abstentions, a reconnu la justesse de l'analyse de la Commissaire à l'Agriculture, notamment à propos des nouveaux défis qui s'ouvrent à cette Politique agricole commune, en pointant l'efficacité et la rationalisation, mais aussi la simplification du système des paiements uniques qui doit être évalué et adapté comme toute nouvelle mesure. Le rôle des instruments de gestion et de soutien du marché est la meilleure réponse à apporter aux attentes nouvelles du marché mais est aussi la réponse à de nouveaux défis, que ce soit en termes de climat, de gestion de l'eau, de biocarburants ou de biodiversité.
Monsieur Crucke, vous venez d'une région où un agriculteur a dû faire abattre tout son cheptel à cause d'une pollution environnementale et la question de l'indemnisation se pose à chaque fois. Il faut vraiment mettre en place des systèmes beaucoup plus cohérents avec des interventions beaucoup plus rapides. Je plaide notamment pour des systèmes assurantiels depuis quelque temps.
La Belgique a plaidé pour une stabilité dans un certain nombre de domaines. Vous savez que pour les
déclarations de paiements uniques, les États avaient deux possibilités: soit on se base sur une référence géographique et on a des droits de paiements uniques homogènes sur une région donnée, soit il y a le modèle historique, modèle que la Belgique a suivi. La Belgique a donc plaidé pour qu'on ne change pas le système en cours de route et pour qu'on maintienne le modèle historique, quitte à permettre aux États
membres qui veulent basculer de ce système vers le système géographique de le faire. La Belgique ne souhaitait pas qu'on change son système. Vous connaissez le monde de l'agriculture, cela pourrait créer pas mal de problèmes et de remous.
En ce qui concerne un plus grand découplage, nous avons plaidé pour une adaptation et non pour une modification substantielle.
Dans sa première proposition, la Commission voulait abolir le système de jachère. Je sais bien que le prix des céréales est élevé, mais le taux de jachère a été placé à 0%. Cela ne signifie pas que, dans trois ans, le marché sera moins porteur. Peut-être devrons-nous réactiver la gestion de l'offre. C'est la raison pour laquelle nous avons demandé le maintien des instruments de gestion de l'offre, même s'il peut être mis à zéro, comme c'est actuellement le cas pour les céréales.
Enfin, nous avons continué de plaider pour un premier pilier fort et suffisamment financé. Autrement dit,
nous nous sommes opposés à une plus grande modulation qui viserait à transférer des moyens du premier pilier – donc, des droits de paiement unique – vers celui qui est dédié au développement rural. Nous pouvons ainsi voir que la Région wallonne ne parvient pas à dépenser les montants prévus à cet égard.
Pour l'économie agricole, et par conséquent pour les revenus de chaque agriculteur, il importe de maintenir un premier pilier aussi solide que possible, compte tenu du glissement de certains moyens vers le second.
Toutes ces considérations ont été prises en compte dans les conclusions présentées par la Commission.
Pour la réforme du secteur laitier, nous avons accepté une augmentation de 2% des quotas. Nous attendons les propositions législatives qui suivront ce bilan de santé. Il semblerait que la Commission européenne envisage de plaider pour une augmentation des quotas de l'ordre de 1% par an jusqu'en 2014. Gardons en mémoire que l'abolition de ces quotas est prévue pour 2015, sauf si le Conseil prend une décision contraire.
Nous pouvons d'ailleurs observer des changements dans les prises de position. C'est ainsi que l'Allemagne commence à se dire qu'il conviendrait peut-être de laisser perdurer ce système après 2015. La France s'est
déjà exprimée à ce sujet. Je ne sais pas si, en Belgique, nous obtiendrons un accord entre les Régions. En tout cas, la situation européenne évolue. En attendant, la Commission maintient la date prévue et souhaite augmenter graduellement les quotas laitiers tout en proposant un dispositif d'atterrissage en douceur.
En ce qui concerne les quotas, d'autres mesures proposées entraîneront des répercussions importantes sur le secteur. Il s'agit notamment des changements de modalité d'intervention pour le beurre, la poudre de lait écrémé, de la suppression du stockage privé pour le fromage, de l'aide au beurre destiné à la pâtisserie.
Ces mesures risquent d'augmenter l'offre sur le marché traditionnel. Il importe donc de ne pas choisir une hausse des quotas laitiers sans réfléchir à ses éventuelles conséquences dans le marché concerné.
La Belgique a rappelé que, pour elle, l'abolition des quotas laitiers en 2015 n'était pas aussi inexorable que semble le penser la Commission européenne. Vous avez expliqué pourquoi. Effectivement, certains gros pays changent de position. La Belgique a également demandé une révision, dans le cadre de cet atterrissage en douceur, de la correction "matières grasses". Vous savez que les agriculteurs ont un quota laitier qui est corrigé en fonction de la matière grasse.
La matière grasse a été prise en compte en 1984 lors de la mise en oeuvre des quotas laitiers. Or, à
l'époque, le cheptel laitier n'était pas encore aussi spécialisé qu'aujourd'hui. Je sais que ma réponse est très technique, mais rien que cette mesure "correction matières grasses" peut représenter 5 à 6% des quotas laitiers pour la Belgique, ce qui est évidemment excessivement important. Nous verrons donc ce qu'il est possible de faire au niveau des propositions législatives.
Je voudrais maintenant évoquer l'éventuel report des décisions relatives aux propositions législatives pour 2009, et la codécision avec le Parlement européen en janvier 2009. Je ne me prononcerai pas sur le sujet mais, à titre personnel, j'estime – et je crois que c'est le cas des agriculteurs –, qu'il s'agit d'un bilan de santé et qu'il faut adapter une réforme qui doit produire ses effets jusqu'en 2013. Cet éventuel report assorti d'une codécision risque de reporter la réforme à fin 209, début 2010. Adapter un système pour deux ans n'aurait plus beaucoup de sens. Je ne me prononce pas sur la codécision. En revanche, je souhaite que l'on puisse prendre des décisions concrètes le plus rapidement possible pour que les agriculteurs puissent s'adapter également le plus rapidement possible.
Monsieur le président, je vous demande de bien vouloir m'excuser d'avoir répondu aussi longuement, mais vous savez que le sujet me passionne.
10.03 Jean-Luc Crucke (MR): Monsieur le président, je tiens à remercier la ministre pour sa réponse que je n'ai pas trouvé longue. Tous les passionnés de ce sujet le comprendront. Il s'agit de matières effectivement complexes mais leur importance pour le secteur économique qu'est l'agriculture de ce pays est telle que l'on ne peut que répondre de manière complète.
En tout cas, je vous remercie, madame la ministre, pour la position que vous défendez au nom de la Belgique.
Het incident is gesloten.
L'incident est clos.

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