Actions collectives en Justice: Jean-Luc Crucke interroge le ministre de la Justice
02 Question de M. Jean-Luc Crucke au vice-premier ministre et ministre de la Justice et des Réformes institutionnelles sur "les actions collectives en Justice" (n° 4334)
02.01 Jean-Luc Crucke (MR): Madame la présidente, monsieur le ministre, une pétition lancée par Test- Achats circule actuellement et a récolté en quelques jours 10.000 signatures; elle concerne les "class actions", donc les actions collectives.
Lorsqu'il est question d'action collective, on pense aux États-Unis et à des procès que défraient souvent la chronique et dans lesquels les condamnations font état de montants astronomiques. Pourtant, à mon sens, cette comparaison n'est pas fondée: en effet, il ne s'agit pas vraiment d'une "class action", mais d'une action collective en matière de consommation, la plupart du temps, mais aussi en matière environnementale, vis-àvis de laquelle le relais établi permet simplement un accès à la justice.
Monsieur le ministre, je crois profondément qu'un des droits qu'un État démocratique doit offrir à sa population est cette possibilité d'accéder à la justice. Même dans un État comme le nôtre, largement reconnu comme démocratique comparativement à certaines autres situations dans le monde, l'inégalité quant à l'accès à la justice existe encore. Parfois uniquement faute de moyens financiers, mais parfois aussi en raison de l'importance des enjeux entre une très grosse entreprise et une personne qui se sent isolée, démunie de conseils, alors que, participant à un groupe, elle pourrait s'exprimer de manière plus exacte, profonde et respectueuse des droits de la démocratie. Ce n'est donc pas toujours l'expression d'un droit égoïste, mais plutôt celle d'un droit collectif.
Une très bonne étude du professeur Guy Horsmans de Bruxelles traite ce sujet; je vous la conseille.
Ma question vise donc à ce que le ministre prenne position dans ce débat, évidemment pas en référence à ce qui se pratique aux États-Unis. Observez ce qui se passe en Angleterre et au Pays de Galles. Monsieur le ministre, tout à l'heure, en aparté, nous discutions de pays où se pratiquaient deux langues, voire des systèmes judiciaires complémentaires: en Angleterre et au Pays de Galles, les systèmes judiciaires font largement appel à l'action collective en justice.
Je sais que la FEB n'est pas d'accord et craint en arriver à des procès entraînant des hausses de primes d'assurance. À mon avis, c'est inexact. Cette matière mérite réellement l'attention de la commission de la Justice et de son ministre.
Monsieur le ministre, quelle est la position du gouvernement quant aux actions collectives en justice?
Une adaptation du droit belge en la matière vous semble-t-elle possible? Il est bien entendu que ce à quoi il s'agit de parvenir, tant sur un plan judiciaire que sur un plan législatif, c'est à encadrer une telle action et pas à laisser les choses aller à tous vents: au contraire, l'action collective devrait exister dans un cadre précis.
Pensez-vous qu'un débat soit disponible pour cette question?
02.02 Jo Vandeurzen, ministre: Monsieur le président, monsieur Crucke, dans l'accord de gouvernement du 18 mars 2008, il est précisé que le gouvernement veillera, de manière générale, à améliorer la législation en vue de garantir une information correcte et une transparence réelle à l'égard des consommateurs.
Le gouvernement souhaite d'abord attendre les résultats de l'étude européenne sur les avantages et les inconvénients de l'introduction des actions collectives. L'accord de gouvernement reprend donc clairement la position du gouvernement et celle-ci n'a pas évolué en quelques mois.
En tant que ministre de la Justice, je suis, avec le gouvernement, l'étude européenne sur l'introduction d'une action collective.
Comme j'ai l'ai déjà dit lors d'une question précédente à ce sujet, les actions collectives sont
exceptionnellement déjà réglées dans notre législation Par ailleurs, l'article 98 §1 de la loi sur les pratiques du commerce permettent déjà actuellement à certaines associations professionnelles ou organisations interprofessionnelles et associations de consommateurs d'engager, au nom de leurs membres, une action en cessation d'un acte constituant une infraction aux dispositions de la loi sur les pratiques du commerce.
Jusqu'à présent, les conséquences de l'introduction généralisée d'un droit d'action collective dans notre droit judiciaire n'avait pas encore fait l‘objet d'une vaste étude.
Avant de prévoir d'autres exceptions aux articles 16 et 18 du Code judiciaire, ce dans un souci d'intérêt et de qualité, il convient de réaliser une évaluation des actions collections telles qu'elles sont appliquées dans d'autres systèmes juridiques étrangers.
Comme indiqué dans l'accord de gouvernement, les consommateurs doivent pouvoir faire valoir leurs droits et le gouvernement s'engage à améliorer l'information relative au service de médiation et à encourager la création d'une commission des litiges avec les acteurs concernés.
Dès que les résultats de l'étude européenne seront disponibles, j'en tirerai les conclusions qui s'imposent, notamment en ce qui concerne les contacts avec les groupements professionnels.
02.03 Jean-Luc Crucke (MR): Madame la présidente, je remercie le ministre pour sa réponse. Je vais luidonner l'occasion d'appliquer de façon extrêmement rapide l'accord du gouvernement, puisque le communiqué de la Commission européenne par rapport à l'étude à laquelle il fait allusion est sorti le 3 avril dernier. Je vous en donne lecture: "Le 3 avril, la Commission européenne a publié un livre blanc proposant un modèle permettant d'indemniser les consommateurs et les entreprises qui sont victimes de violation des règles de concurrence. Il existe en effet dans la plupart des États membres d'importants obstacles dissuadant les consommateurs et entreprises de demander réparation en engageant devant les tribunaux une action en dommages et intérêts pour infraction aux règles sur les ententes et les abus de position dominante. Le livre blanc présente des propositions visant à accroître l'efficacité des demandes
d'indemnisation des victimes tout en garantissant le respect des systèmes et traditions juridiques européens.
Le modèle proposé par la Commission repose sur le principe d'une indemnisation unique des dommages subis."
Si ce texte fait suite à la déclaration gouvernementale, je préfère faire confiance à cette dernière plutôt que d'espérer l'une ou l'autre proposition d'un collègue de la minorité qui porterait sur un autre système. En appliquant l'accord de gouvernement, nous obtiendrons déjà à un effet immédiat.
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