mercredi 16 mars 2005

Question orale de Jean-Luc CRUCKE au Ministre ANTOINE sur "le suivi dans la gestion des participations suite à la crise financière"

Mme la Présidente. L'ordre du jour appelle la question orale de M. Crucke à M. Antoine, Ministre du Budget, des Finances, de l'Emploi, de la Formation et des Sports, sur « le suivi dans la gestion des participations prises suite à la crise financière».
La parole est à M. Crucke pour poser sa question.

M. Crucke (MR). Madame la Présidente, Monsieur le Ministre, chers collègues, nous ne sommes pas dans une dette cachée cette fois-ci, mais bien dans les investissements, les prises de participation entre autres. Je voulais faire le point sur trois dossiers, Monsieur le Ministre : un, le dossier Dexia; deux, le dossier Ethias et trois, le holding communal. En ce qui concerne Ethias, fin septembre 2008, c'est 350 millions d'euros que la région va apporter par le biais d'une augmentation de capital. Le code des sociétés étant ce qu'il est, le cours doit être considéré à ce moment-là, comme étant supérieur au cours en vigueur, et la somme acquittée est de 9,90 euros par action. Elle est aujourd'hui aux deux tiers de cette somme. Faisons le bilan : comment comptabilise-t-on cela dans la comptabilité de la région ? Le risque financier continue-t-il à être étudié de manière interne à l'administration et peutêtre également de manière externe? C'est le même raisonnement pour Ethias. Si j'avais parlé tout à l'heure de Dexia, mes craintes pour Dexia sont peut-être un peu plus précises qu'on pourrait le penser. Vous savez comme moi qu'il y a un stresstest qui doit encore être organisé. Je pense que l'on est dans une période extrêmement sensible.

M. Antoine, Ministre du Budget, des Finances, de l'Emploi, de la Formation et des Sports. On fera cela tous les lundis avec vous.

M. Crucke (MR). Peut-être, mais chez Dexia, ce n'est pas tous les lundis. L'information que vous détenez, puisque c'est quand même le premier interlocuteur wallon en la matière, est importante, non seulement pour les parlementaires, mais je pense également pour les marchés. En ce qui concerne Ethias la participation s'élève à 500 millions. Je vous pose les mêmes questions par rapport au risque et par rapport à l'analyse. Pour ne pas être long, en ce qui concerne le holding communal, une garantie de 140 millions d'euros a été apportée sur les 800 millions qui avaient été empruntés par le holding. J'ai envie de mettre tout cela en phase avec ce qui a été très récemment déclaré par la Cour des comptes le 22 décembre dernier, puisque c'est la même question que je pose pour le holding. Je cite: « les participations et les garanties prises par les 55 autorités publiques dans les institutions financières demeurent un facteur important d'insécurité pour l'évaluation future de leurs finances ». Est-ce que vous êtes d'un avis conforme, est-ce que cela veut dire que le rating de crédit qui est celui de la région demeure actuellement sous pression ou pourrait l'être?

Mme la Présidente. La parole est à M. le Ministre Antoine.

M. Antoine, Ministre du Budget, des Finances, de l'Emploi, de la Formation et des Sports. Je remercie très sincèrement M. Crucke pour cette question, parce que j'y vois aucune polémique, mais un intérêt légitime. Je voudrais quand même dire à M. Crucke mais il le sait, que cette opération que nous avons réalisée pour trois institutions Dexia, Ethias et puis le holding communal à travers la FIWAPAC a été sollicitée par le fédéral lui-même. Nous l'avons fait en bon accord, je ne dis pas cela pour m'en disculper ou pour me dissimuler, mais la réalité à ses droits. D'autre part, elle a fait l'objet d'une tolérance de la commission européenne et d'EUROSTAT. Même si in fine, l'ICN nous a quand même un peu querellés en 2009 sur la FIWAPAC. C'est comme cela et nous nous expliquerons devant l'ICN. Tout cela pour dire à M. Borsus, vous lui répéterez, qu'il y a une marche de discussions avec l'ICN. C'est comme pour la Cour des comptes. Elle nous a donné raison contre l'ICN, on verra bien ce qu'il en sera pour l'avenir. Je voulais replanter le décor si j'ose dire. Faisons le point si vous le voulez bien pour les trois opérations. Je vais me montrer prudent quoique tenter d'être précis parce que tout ce que je vais dire n'est pas, comme vous l'avez parfaitement relevé, uniquement à l'adresse des parlementaires, mais cela pourrait être utilisé dans d'autres cas, y compris le marché boursier. Vous me demandez si je garde espoir de revoir un jour le cours de Dexia proche des 10 euros puisque nous les avons souscrits à 9,90 euros pour être tout à fait précis, alors que cette banque, ditesvous, sera bientôt soumise à de nouveaux tests de résistance, les stresstest. Vous me permettez, bien sûr, de ne pas me prononcer sur l'impact de ses tests sur l'évolution boursière de Dexia pour le moment, notamment parce que nous ne connaissons pas les critères de ces nouveaux stresstest ni bien sûr leurs résultats a fortiori. Il m'est donc difficile de prendre aujourd'hui position sur les conséquences des tests dont les critères même ne sont pas encore connus. Dois-je vous rappeler il vous l'a peut-être dit au bureau du parti que lors de la dernière réunion mensuelle des ministres des finances de l'Union européenne nous étions représentés en qualité les représentants des différents pays ne sont pas parvenus à s'entendre sur les critères des prochains stresstest, notamment en matière de traitement de liquidités c'est-à-dire le marché interbancaire et ce que nous avons souscrit au niveau de la banque européenne et du risque souverain. Ce deuxième élément est important puisque vous savez que les banques peuvent classifier, d'un point de vue comptable, leurs investissements dans notament deux portefeuilles : il y a un portefeuille de trading, quant la banque à l'intention de vendre les investissements avant la date d'échéance de ces derniers, et puis il y a un portefeuille bancaire (hold to maturity) où l'intention des banques est de garder les investissements jusqu'à maturité, comme par exemple, c'est souvent le cas pour les obligations émises par les pouvoirs publics. Ils ne sont pas parvenus à se mettre d'accord sur un troisième élément, celui de la méthode de publication des résultats. Imaginez un seul instant que le stresstest indique une connotation plus préoccupante, le marché la déformerait immédiatement. J'en veux pour preuve que le cours de Dexia qui s'était relevé il était remonté à 3,51 dès lors que la banque a communiqué ses résultats, replongé à 3,30. Simplement parce qu'il y a eu une déception dans le chef des investisseurs. Tout cela n'est pas simple : liquidité, retenez bien cela, risque souverain et publication des résultats. La banque, comme vous avez pu le lire, envisage une année 2011 difficile, c'est vrai, mais un retour à la normale, je cite les responsables : « En 2012». Les derniers résultats qui ont été publiés mercredi dernier étaient, reconnaissons-le, dans leur chef et peut-être dans le nôtre, inférieurs aux attentes. Si vous regardez d'un peu plus près, c'est essentiellement les conséquences des chiffres en provenance de la filiale française qui nous avait déjà valu tant de problèmes à l'origine et qui continue à nous poser des problèmes. Je ne voudrais quand même pas que l'on passe sous silence les efforts qu'ont réellement déployés les représentants, la direction de Dexia, depuis 2008. J'en veux pour preuve quelques éléments. Premièrement, et c'est important, Dexia a réduit sa dépendance vis-à-vis de la Banque centrale européenne. Elle est actuellement de 18 milliards d'euros. Je rappelle qu'avant la crise, elle était de 121. C'est quand même déjà un premier indice du marché interbancaire qu'elle pouvait organiser. On passe donc de 121 à 18. Deuxièmement, elle a réduit, et cela me paraît important, sa dépendance vis-à-vis du financement à court terme, qui représente aujourd'hui 20% alors qu'en 2008, avant la crise, elle était de 35%. En fait, ce que l'on reprochait à Dexia, c'était de conclure des prêts à long terme et de les financer par des emprunts à court terme. Évidemment, l'opération devait se réajuster. C'est ce qu'ils ont fait : 20 % au lieu de 35 %. Troisième élément, elle a cédé des actifs pour un montant de 52,4 milliards, notamment en revendant la filiale américaine bien connue qui, elle aussi, avait été source de quelques inconvénients, vous vous en rappelez. Et puis, elle a surtout réduit son portefeuille de fonds souverains et son exposition aux pays tels que l'Italie, l'Espagne et le Portugal. Enfin, et cela me paraît un élément important aussi, elle a renforcé le ratio des fonds propres de base qui s'établit dorénavant à 13,1% alors qu'il n'était que de 12,3% en 2009. C'est donc là aussi important. On parle ici des fonds propres de base qui ne souffre aucune discussion parce les spécialistes vont vous expliquer qu'il y de grosses discussions sur la définition des fonds propres. Ici, ce sont vraiment les fonds propres de base tels que, par exemple, les réserves qui ont été constituées par des bénéfices. Il me paraît important de souligner que la viabilité de l'activité sur le long terme a été confirmée aussi par la Commission européenne et que Dexia, reconnaissons-le, est en avance sur son plan de transformation à l'Horizon 2014. Voilà pour Dexia. L'allégement du bilan et le recentrage sur son métier de base sont également de priorités chez Ethias. Elle les a mis en uvre à travers son plan de restructuration, son plan à l'horizon 2011. Ce sont des questions vraiment très précises et très techniques, mais je vais accélérer. Les objectifs du plan sont d'ailleurs largement atteints, et ce, dès la clôture de l'exercice 2010. Ethias clôture l'exercice 2010 sur un résultat opérationnel positif, vous le savez, de plus de 220 millions d'euros, à comparer avec les 37,7 de 2009 et des prévisions de 48 millions en début d'exercice. Deux éléments exceptionnels, je le dis par correction, ne sont cependant pas pris en compte dans ce résultat opérationnel très positif. Le premier, c'est la prise en compte de la plus-value à réaliser après la conclusion de la vente de BelRé qui est sa filiale de réassurance basée au Luxembourg. Cela c'est positif. Ce qui est par contre négatif, c'est évidemment la prise en compte lors de la prochaine assemblée générale d'une moins-value sur les actions Dexia détenues par Ethias. C'est ennuyant parce que la commission a demandé à Ethias d'être moins exposée dans la détention d'actions Dexia. Ils vont donc devoir vendre une partie de leur exposition. Lorsque vous les vendez, vous devez acter leur valeur réelle et non plus leur valeur comptable en la matière. Donc, là, il y a une source d'interrogations en la matière. Pour le holding communal, d'abord, je voudrais réactualiser les chiffres que vous avancez dans votre question écrite qui était jointe. La garantie régionale accordée au holding communal ne s'élève plus à 140 millions comme vous le prétendez, mais à 43,75 millions d'euros depuis le 1er janvier 2010. Cette garantie arrive à terme le 30 juin 2011. Le holding communal nous envoie régulièrement une analyse chiffrée sur l'évolution de la situation. Nous avons d'ailleurs eu une réunion très longue, il y a quinze jours, avec Carlos Bourgeois sur le sujet. Il était convenu entre les différents garants régionaux de solliciter la garantie du fédéral à hauteur de 125 millions d'euros si notamment le cours de Dexia venait à chuter fortement, car dans ce cas, la garantie conjointe des régions ne suffirait pas. En ce qui concerne la remarque de la Cour des comptes, la crise de la dette souveraine européenne est intimement liée au destin des banques et, pour cause, l'une des principales craintes d'un défaut d'un souverain européen est l'impact des pertes subies par les banques avec le spectre de la nécessité d'une nouvelle intervention publique, comme nous l'avons connue, tant au fédéral qu'au niveau de la région. Je partage la remarque de la Cour des comptes sur le fait que les participations et garanties prises par les autorités publiques dans les institutions financières demeurent un facteur important d'insécurité aussi pour leurs propres finances publiques. Je vous rappelle que toutes nos garanties maintenant feront l'objet d'un paiement puisque, je répondais à M. Borsus tout à l'heure, l'arrêté est finalisé devant l'inspection des finances. Pour ce qui concerne la remarque de la Cour sur Dexia, je nuancerais un peu leurs propos parce qu'il me semble que Dexia est correctement capitalisée aujourd'hui. Vous me parliez également du rating de la région. le rating de la Région wallonne est Aa2. Je vous rappelle que celui de la Communauté française est Aa1. Nous sommes meilleurs en Communauté française qu'en Région wallonne. Moody's, que nous payons pour nous analyser, nous dit : «attention, en région, vous avez la volatilité des impôts régionaux, ce que ne connaît pas la Communauté française».
Vous me demandez que pourrait-il nous arriver de mal. Je vous réponds, Madame la Présidente. Tout d'abord, que le fédéral lui-même soit dégradé, ce qui n'est pas exclu eu égard à l'incertitude sur le gouvernement fédéral et les éventuelles absences de mesures prises pour retrouver l'équilibre en 2015 puisque nous sommes collés, en Communauté française, au fédéral. La notation fédérale est la même qu'en Communauté française. Dès lors que la Région wallonne connaît une plus grande volatilité, si la Communauté française est dégradée dans la suite du fédéral, la Région wallonne risque de l'être, même si aujourd'hui, selon le dernier bulletin de Moody's, nous sommes en perspective stable. Nous avons pu les convaincre, je pense, des efforts réels que nous poursuivons. J'ajoute, j'aurais dû le dire à M. Borsus, l'homme de l'ICN, que Moody's a encore d'autres critères que l'ICN. C'est pour cela que quand on fait des envolées, je les comprends, des effets de manche politique, M. Borsus a le talent pour le faire, il faut être prudent quant à ce que cela veut dire sur le plan technique, ce n'est pas la même forme d'appréciation les uns des autres. Excusez-moi, Madame la Présidente, j'ai été long, mais j'ai voulu être agréable à M. Crucke.

Mme la Présidente. La parole est à M. Crucke.

M. Crucke (MR). Je remercie M. le Ministre pour sa réponse. J'avais clairement dit que ce n'était pas, pour moi, un dossier polémique. C'est un dossier dans lequel il faut avoir un certain nombre de craintes. On peut comprendre la prudence du propos de M. Le Ministre. Mais la meilleure des prudences dans la matière, c'est de donner l'information telle qu'elle est, quelles soit bonne ou pas bonne. Je suis un peu moins optimiste que lui quand il parle de Dexia. J'avoue que je suis plus pessimiste que lui lorsqu'il parle du holding.Je n'ai jamais cru à ce deuxième dividende, je suis de ceux qui, depuis le début, ont dit que ce n'était pas crédible. Je ne cherche pas à avoir raison. La problème n'est pas celui-là.
(Réaction de M. le Ministre Antoine)
Oui, évidemment, si on commence à jouer avec une telle crédibilité par rapport aux propos, je pense alors que certains auraient mieux fait d'être prudents. On en reparlera, notamment concernant Ethias. Je n'ai qu'un souhait, c'est que chez Ethias, les choses puissent bien se passer. Je pense que cela aurait sinon des conséquences pour d'autres qu'Ethias.

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