Question orale de Jean-Luc CRUCKE au Ministre MARCOURT sur "le suivi de l'administration dans le dossier de l'ADL de Pecq-Celles-Mont de l'Enclus"
Crucke (MR). Madame la Présidente, Monsieur le Ministre, chers collègues, finalement cela tombe bien que ce soit vous, M. Furlan, qui répondiez à ma question, encore que vous n êtes pas le seul impliqué dans le dossier, le ministre de l économie l est également, et votre collègue, M. le Ministre Antoine l est tout autant. Mais vous connaissez les traditions de ce parlement, on en choisit un et il répond sans doute pour l ensemble. C'est bien, l'un est absent, l autre est présent, j ai déjà les deux tiers des responsables du dossier sous la main ! J ai à deux reprises, Monsieur le Ministre, questionné M. le Ministre Marcourt sur ce dossier. À chaque fois, il m a répondu qu un certain nombre d avancées étaient effectuées dans le cadre d une enquête menée sur les irrégularités de la gestion de l ASBL Pecq-Celles-Mont de l'Enclus. Nous sommes bien dans le cadre d un dossier qui vise trois communes. Il s agit bien aussi d une agence de développement local. Suite à un premier rapport, un rapport complémentaire avait été sollicité et lors de ma dernière question, il avait été prévu de solliciter, comme le prévoit d ailleurs le décret, l avis de la Commission d agrément et d accompagnement. Il semble que maintenant cet avis ait été rendu. J aurais bien évidemment voulu avoir le contenu de l avis d autant que la presse s était penchée sur le dossier. Et ce que la presse en dit n est vraiment pas élogieux pour ceux qui géraient le dossier. On parle de comptabilité défaillante, de dépenses effectuées par et avec de l argent public, mais des recettes prévues et surtout perçues par les sociétés plus privées qu elles soient ASBLou pas. On parle de points APE utilisés à d autres finalités que celles qui ont été initialement prévues. En d autres termes, avec l argent public, on aurait fait un peu tout et n importe quoi, mais surtout pas ce que, initialement, l agence de développement local devait faire. Vous pouvez donc comprendre que cela crée certaines tensions entre les trois communes, puisque certains souhaitent que l on aille en profondeur dans les responsabilités et les comptes. Et on parle même d une liquidation de l ASBL par voie judiciaire. C est la Commune du Mont de l'Enclus qui vient de voter en fin de semaine passée une décision qui mandate le bourgmestre et le collège pour que sur le plan judiciaire, cette liquidation intervienne. Mes questions sont les suivantes : - Où en est à présent le dossier ? ; - Y a-t-il des remboursements qui ont été exigés ? De quelle ampleur ? Qui va rembourser ? ; - Vise-t-on bien l ensemble des années qui sont les années concernées par l inspection : 2007, 2008, 2009 et sans doute également 2010 ?
la Présidente. La parole est à M. le Ministre Furlan.
Furlan, Ministre des Pouvoirs locaux et de la Ville, en lieu et place de M. Marcourt, Ministre de l'Économie, des PME, du Commerce extérieur et des Technologies nouvelles. Merci Madame la Présidente. Tout d abord, permettez-moi d excuser mon collègue M. le Ministre Marcourt qui est à l étranger pour représenter le gouvernement et la Wallonie économique. C est important. Je souligne ensuite l implication de M. Crucke à Pecq, car je pense que nous allons en débattre aussi tout à l heure dans ma commission. Concernant les événements de l ADL, mon collègue me demande de refaire le point sur la chronologie des événements. En octobre 1997, les communes de Pecq, Celles et Mont-de-l'Enclus vous l avez souligné s'associaient pour créer une ADL, agence de développement local. Dans le cadre de l'expérience pilote, l'ADL de Pecq-Celles-Mont de l'Enclus était localisée au sein de l'administration communale de Pecq, les deux autres communes intervenant financièrement, selon une clé de répartition imputant un tiers des dépenses à chacune. Toujours dans le cadre de l'expérience pilote, cette ADL a porté le projet Mobi-ServiceS, projet de taxi social destiné aux citoyens des trois communes. Très vite, l'administration a invité les représentants de l'ADL à créer une structure autonome et à ne plus porter ce projet elle-même. C'est à ce niveau que se situe la plus-value d'une ADL : une fois un projet mis en uvre, l'ADL s'en retire progressivement afin de se concentrer sur d'autres projets porteurs d'activités nouvelles. En 2008, suite à l'entrée en vigueur du décret du 25 mars 2004 relatif à l'agrément et à l'octroi de subventions aux agences de développement local, l'ADL s'est constituée sous la forme d'une ASBL. Le 4 août 2009, le Collège communal de Montde- l'Enclus informait l'administration de la création, par l'ADL, d'une société commerciale sous forme de société coopérative à responsabilité limitée à finalité sociale, nommée Mobi-ServiceS, dont le siège social était établi au domicile d'un des agents. Le 6 août 2009, un administrateur de la société coopérative à responsabilité limitée à finalité sociale, SODALIS Corporation, société active dans la fourniture de services de proximité, informait 4 l'administration de certains agissements qui lui semblaient suspects. Le 14 novembre 2009, l'administration indiquait à l'ADL que ses agents ne devaient plus être impliqués dans le fonctionnement de Mobi- ServiceS. En parallèle, elle demandait à l'inspection d'opérer un contrôle. Les inspecteurs ont tour à tour auditionné l'administrateur de la SCRL à FS SODALIS, les trois bourgmestres concernés, qui sont également président ou vice-présidents de l'ADL, et les agents de l'ADL aux fins de vérifier notamment l'étendue de l'éventuel conflit d'intérêts entre l'ADL et Mobi- ServiceS et de porter un regard sur les comptes de l'ADL. À la suite de la réception du rapport de l'inspection sociale, l'administration a rencontré les trois bourgmestres afin de leur faire part des conclusions du rapport et de ses exigences, dont celle de mettre fin à une quelconque implication de ses agents dans la société Mobi-ServiceS. Le 4 février 2010, le conseil d'administration décidait de dissoudre l'ASBL et le 29 avril 2010, l'assemblée générale fixait la dissolution de l'ADL au 30 juillet 2010, date de la fin des préavis des deux agents encore en service au sein de l'ADL. Nonobstant ce qui précède, les comptes certifiés de l'ADL depuis sa création n'ayant pas été transmis à l'administration, une inspection complémentaire a été diligentée à cet effet le 6 juillet 2010. A cette occasion, l'inspection a à nouveau constaté le conflit d'intérêts entre l'ADL et les différentes sociétés de services créées par les agents de l'ADL. En effet, une partie des activités de ces sociétés se déroulaient au sein des bureaux de l'ADL, bénéficiant ainsi du travail fourni par le personnel de l'ADL et de ses moyens logistiques. C'est curieux ! Le 13 juillet 2010, la Commission ADL entendait le président de l'ADL et un administrateur. Elle a également pris acte de la délibération de l'assemblée générale extraordinaire et a émis un avis favorable sur le retrait de l'agrément de l'ADL en date du 30 juillet 2010. Enfin, elle a décidé de statuer lors de sa prochaine réunion, après réception des derniers éléments de l'enquête d'inspection, sur le paiement et/ou la récupération de subventions à l'ADL. Le 14 juillet 2010, l'administration a envoyé au seul ministre de l'emploi, qui, pour rappel, partage la tutelle sur les ADL avec M. le Ministre Marcourt et moi-même, une note reprenant les conclusions du rapport d'inspection complémentaire concernant la comptabilité de l'ADL. Ces conclusions étaient les suivantes. Concernant la comptabilité de l'ADL de 1998 à 2008, première conclusion : « Durant cette période, l'ADL est totalement intégrée et gérée au sein de l'administration communale de Pecq. Au début, il n'existe aucune comptabilité spécifique à l'activité de l'ADL. Par contre, dès son arrivée en 2005, la nouvelle receveuse communale établit des tableaux comptables et met en exergue une dette dans les comptes de l'ADL. Cependant, ces tableaux ne peuvent être certifiés par le Conseil communal de Pecq et sont contestés par les bourgmestres des deux autres communes. La Commune de Pecq s'est alors engagée à fournir, pour le 31 juillet 2010, le détail de l'ensemble des dépenses et recettes spécifiques au fonctionnement de l'ADL. La Commune de Pecq a respecté son engagement, mais les deux autres communes n'ont jamais avalisé ces comptes. » Deuxième conclusion de cette inspection : « Concernant la comptabilité de l'ADL dès son agrément en 2008, dès 2008, les deux agents ADL sont désignés par l'assemblée générale pour tenir les comptes de l'ASBL. Bien qu'ils aient été approuvés par le conseil d'administration, les comptes 2008 et 2009 comprennent de nombreuses erreurs qui empêchent de se rendre compte du déficit réel de l'ADL, déficit estimé à plus de 100 000 euros par l'inspection. En effet, ce déficit serait lié au fait que les sociétés de services privées, créées par les agents de l'ADL, ont pu bénéficier du personnel ainsi que des moyens logistiques de l'ADL. En clair, les charges des sociétés étaient comptabilisées au budget de l'ADL tandis que la société privée percevait les recettes. En conclusion, la subvention accordée à l'ADL par la Région wallonne n'aurait pas été utilisée aux fins pour lesquelles elle est accordée puisqu'elle a servi en grande partie à créer et gérer des sociétés privées. Aussi, le 18 novembre 2010, suivant l'avis de la Commission, les ministres en charge des ADL signaient l'arrêté de retrait d'agrément à l'ADL de Pecq-Celles-Mont de l'Enclus, avec une entrée en vigueur au 30 juillet 2010. » Pour ce qui concerne le retrait éventuel des subventions, le service juridique de la DGO6 a rendu un avis qui stipule que, selon les lois sur la comptabilité de l'État : « Toute subvention accordée par l'État ou par une personne morale subventionnée directement ou indirectement par l'État doit être utilisée aux fins pour lesquelles elle est accordée ». Quoi de plus normal ? L'avis juridique précise toutefois que pour récupérer la subvention, il y a lieu de se baser sur des éléments patents. En l'occurrence, ce n'est qu'au travers du rapport de l'inspection complémentaire évoqué plus haut que ces éléments patents peuvent être établis. Dès lors, la Commission a estimé que l'administration ayant formellement signalé le 3 février 2010 à l'ADL qu'elle devait clairement scinder ses activités de celles des sociétés privées. C'est à partir de cette date que la Région wallonne doit suspendre le paiement de ses subventions. Ainsi, en ce qui concerne les paiements, la situation actuelle est la suivante : le solde de la subvention 2009, d'un montant de 19 601 euros est en cours de liquidation. Le montant de la subvention 2010, arrêtée au 3 février 2010, est de 5 430 euros. Le paiement sera effectué dès réception, par l'administration, des déclarations de créance et des fiches ONSS. Par contre, aucune subvention n'a été et ne sera versée pour la période comprise entre le 3 février 2010 et le 30 juillet 2010. J'ai essayé d'établir les éléments de ce dossier difficile dans la plus grande clarté.
la Présidente. La parole est à M. Crucke.
Crucke (MR). Je remercie M. le Ministre pour sa réponse dans ce dossier. Le fait de refaire l'historique du dossier n'est pas en soi inintéressant. Vous avez d ailleurs ajouté, Monsieur le Ministre, le terme « curieux » en parlant du comportement qui a été adopté au sein de cette agence de développement local et je pense que le terme « curieux » est approprié. Vous verrez que je ne fais pas une fixation sur la Commune de Pecq, mais qu une fois de plus, c'est bien de la Commune de Pecq dont on parle dans ce dossier par rapport à une série de comportements qui sont totalement inadmissibles sur le plan de la gestion publique. J'ai bien noté, et je reviendrai vers le ministre en question, que la commission avait non seulement marqué un avis favorable par rapport au retrait d'agrément, mais également considéré que le remboursement se justifiait par un déficit de 100 000 euros. J'ai malgré tout un regret, c'est que l'on parle d'un remboursement à partir du 3 février 2010, parce que, dites-vous, il faut trouver des éléments patents et que c'est à partir de ce moment-là, que l'on peut faire courir le recours. Quand je lis les documents qui m'ont été transmis, je pense que le gouvernement doit aller plus loin dans ce dossier. Je me demande même s'il ne doit pas céder le relais à la justice et transférer un certain nombre d'éléments à la justice parce qu'il y a des éléments qui sont infractionnels. Je lis : « deux décisions ont été prises et cela ne nous concerne pas directement, mais indirectement dans la décision, c'est bien pour cela que je dis que je reviendrai également vers le ministre de l'emploi- ; première décision : l ADL s est vu octroyer 6 points pour l'engagement de minimum un équivalent temps plein coordinateur pour les services de transport, d accompagnement et de ramassage d encombrants gérés au sein de l'ADL, du 10 mars 2006. j'attire votre attention Au 30 décembre 2008, la personne engagée dès l'inspection, bénéficiaire de ce point APE, a été engagée par la Commune de Pecq comme chauffeur pour le taxi social MobiserviceS et non comme coordinatrice comme exigé par une décision ministérielle ». On est donc bien dans ce qu on appelle l'utilisation du personnel à d'autres fins que celles qui ont été accordées. C'est un élément infractionnel qui pour moi doit être dénoncé à l'auditorat et également au parquet. Deuxième décision : « dans le cadre de son ADL, la Commune de Pecq s'est vu octroyer 3 points APE pour un chauffeur pour le taxi social du 4 mars 2004 au 30 mars 2007 ; il apparaît que la personne engagée par le biais de ces points n'a jamais exercé la fonction de chauffeur pour le taxi social, mais bien d'animatrice et guide touristique niveau 1 auprès d'une maison qui dépend de la Commune de Pecq ». Si cela, ce n'est pas, en termes d'utilisation de subsides publics, un détournement d'argent public, je ne sais pas ce que c'est ! Je demande au ministre, je ne vise pas M. le Ministre Furlan à titre personnel, les choses ne sont pas de cet ordre là qui est responsable de ce dossier et au gouvernement de transmettre ce dossier au Procureur du Roi. Vous savez que lorsqu on a connaissance d'une infraction sur le plan pénal, nous avons l'obligation de le faire. J'en termine là, en lisant les conclusions du rapport sur base des différents éléments que je vous ai cités : « les membres de la commission décident d'octroyer, comme vous l'avez dit, la subvention à l'ADL Pecq, Celles et Mont-de-l'Enclus jusqu'au 3 février 2010, date à laquelle l'administration a seulement demandé aux agents de choisir s'ils continuaient à travailler au sein de l'ADL, au sein de Mobi-serviceS ». Demander aux agents de choisir s'ils continuaient à travailler au sein du service, cela je peux le comprendre par rapport à une décision d'agrément, mais il n'en reste que pour les périodes qui sont antérieures, l'argent public a été utilisé à d'autres fins ; cela ressort de manière non contestable de ce dossier. Je pense que nous devons non pas avoir des largesses à l'égard de ceux qui ont fauté mais réellement, si l'on veut faire de la bonne gestion et si l'on veut être « réglo » en matière de gestion de l'argent public, l'on doit non pas seulement montrer l'exemple, mais intervenir au niveau de la commune de Pecq à l'égard de ceux qui ont mis un pied de travers.
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