la Présidente. L'ordre du jour appelle la question orale de M. Crucke à M. Antoine, Ministre du Budget, des Finances, de l'Emploi, de la Formation et des Sports, sur « la mobilité frontalière des travailleurs franco-belges ». La parole est à M. Crucke pour poser sa question.
Crucke (MR). Madame la Présidente, Monsieur le Ministre, chers collègues, ma question a deux pans. Le premier concerne la mobilité des travailleurs wallons vers la Flandre. Je reviens avec un chiffre qui a été cité par le ministre flamand de l'emploi, M. Wouters lui-même, en précisant que sur base de chiffres de 2009, il y avait une augmentation de 10 % de travailleurs qui se rendaient en Flandre pour pouvoir y trouver de l'emploi. Je souhaiterais, Monsieur le Ministre, qu'on puisse faire le point sur le dossier qui gère l'ensemble de ce processus et cette dynamique, à savoir ces équipes mixtes entre VDAB et FOREM, et qui se retrouve principalement dans trois villes : Mouscron, Liège et Hal. A-t-on affaire à un effet de levier ? Le fait d'avoir mis le mécanisme en place a-t-il boosté cette mécanique ? Tant mieux, si c'est le cas. Dans l'affirmative, peut-on imaginer amplifier également le phénomène ? Comment cible-t-on les emplois ? On sait ce qu'on appelle des emplois en pénurie et a-t-on affaire au même type d'emplois en pénurie en Flandre qu'en Wallonie, ou bien y a-t-il des différences substantielles en la matière ? Les emplois occupés par des Wallons peuvent-ils, être ciblés, de manière peut-être à former, si besoin en est, des personnes supplémentaires ? Ma deuxième question est par rapport à la France. Vous savez que la convention franco-belge de lutte contre la double imposition a été revue. Je pense que cela va progressivement nous permettre de retrouver une dynamique où ce seront des Wallons qui iront travailler en France plus que l'inverse. En effet, sur les 28 000 Français qui travaillent en Wallonie, plus de 20 000 sont en Hainaut. Par contre, on voit très peu de Wallons qui vont travailler en France. Je pense que c'est de l'ordre de 5 000. Là aussi, ce n'est quasiment que les Hennuyers qui font le transfert vers la France. Il faut reconnaître que cette convention sur la double imposition n'a jamais facilité l'attractivité de l'emploi en France. Cela devrait donc changer. Est-ce que, là aussi, une politique a été mise en place ? Déjà en 2010, vous m'aviez dit que certaines mesures avec EuresChannel étaient prises. A-t-on créé et amplifié les dynamiques ? Est-ce que les chiffres s'inversent déjà aujourd'hui ou, là aussi, il y a-t-il matière à réflexion ?
la Présidente. La parole est à M. le Ministre Antoine.
Antoine, Ministre du Budget, des Finances, de l'Emploi, de la Formation et des Sports. J'ai deux parties de réponse à la question de M. Crucke. La première concerne le nombre de travailleurs wallons qui, quotidiennement, vont travailler dans une autre région que la nôtre. Ils sont plus de 200 000, nous en dénombrons à peu près 100 000 à Bruxelles, 45 000 en Flandre, 34 000 dans le Luxembourg. Vous pouvez y ajouter à peu près 5 000 pour la France, l'Allemagne et les Pays-Bas. Cela veut donc dire et je le répète à cette commission depuis plus d'un an une évolution extrêmement favorable de la mobilité. J'avoue que la communication que je vous ai faite n'a pas eu beaucoup de succès, ni par l'impact que les journalistes en ont donné, ni par celui que vous auriez pu leur en donner. Peut-être ai-je été maladroit dans l'expression. Il a fallu que Philippe Muyters, qui partage les mêmes chiffres que nous, le proclame au Parlement flamand, pour que chacun soit étonné, impressionné, de la mobilité des Wallons, cassant, au passage, une image d'un Wallon qui ne sait pas aller bien plus loin que son canton pour trouver du travail. Il y a une quinzaine de jours, j'ai passé toute l'après-midi avec Philippe Muyters et je lui disais que, dorénavant, lorsque je voudrais faire connaître quelque chose, je lui enverrais le texte, parce qu'il était bien meilleur que moi pour le faire diffuser. Deuxièmement, nous avons une structure en commun VDAB, FOREM et Actiris -, que n'a pas mentionné M. Crucke, mais qui est exceptionnelle d'efficacité, c'est Synerjob, qui nous permet d'échanger les meilleurs pratiques en matière d'emploi, de formation, d'offre d'emploi et de gestion de celle-ci. C'est du reste notre Administrateur général, M. Méans, qui préside actuellement cette association d'échange, dont nous avons réactivé si j'ose dire les travaux pour bénéficier de tout ce qui se fait de bien à Bruxelles, en Flandre, et peut-être en Wallonie pour les autres. Troisièmement, Monsieur Crucke, oui, il y a là un phénomène de coïncidence entre les effectifs que le FOREM a détachés pour la gestion des emplois en Flandre et les résultats obtenus. Du reste, c'est la rolls en matière d'offre d'emploi, puisque ce personnel gère proportionnellement moins d'offres d'emploi que leurs collègues wallons pour les offres d'emplois wallons. Mais cela nécessite un travail soutenu en termes d'identification des connaissances techniques et surtout linguistiques, voire même de préparer par des modules appropriés, ou de combler les lacunes de certains travailleurs wallons pour qu'ils puissent décrocher un travail en Flandre. Donc, oui, c'est vraiment un travail volontariste. Dans mon chef, Monsieur Crucke, vous me connaissez, ce n'est pas nouveau. Lorsque j'étais ministre des Transports, j'y avais déjà pensé, puisque j'avais défendu l'idée de lignes interrégionales. Certaines ont connu un grand succès, d'autres un peu moins malheureusement. Cela participait déjà de la même volonté de bâtir des ponts entre nos trois régions. Vous verrez qu'en matière de sport, je me suis efforcé là aussi- ce n'est pas simple, compte tenu de la famille politique à laquelle appartient à M. Muyters de re-coordonné, concerter, et parfois même harmoniser, nos politiques sportives. Vous verrez que, dans un prochain avenir, j'ai pu le convaincre de prendre des initiatives en commun. C'est d'autant plus nécessaire pour le sport, mais d'autant plus difficile, eu égard aux prises de position que vous connaissez de l'intéressé, et surtout de son parti. Donc, oui, je crois que nous pouvons être fiers. C'est un des pans pour lequel je donne un excellent bulletin au FOREM. J'ai toujours dit, à Mme Cornet notamment, « Ne voyez pas le FOREM de manière unilatérale ». Il peut y avoir des dysfonctionnements, des déficiences, mais il y a aussi des points forts et des atouts. Je souhaiterais qu'à l'avenir, on soit plus justes avec le FOREM. Bien sûr, il y une volonté politique, je l'exprime, je l'incarne et je l'implémente au FOREM. Mais il y a aussi une volonté administrative de l'appliquer avec beaucoup d'efficacité. Concernant le deuxième pan de votre question, sur la Wallonie et les travailleurs transfrontaliers, si j'en crois les chiffres de l'INAMI, la Wallonie accueille 28 816 travailleurs français dont, il est vrai, 20 821 pour la seule province du Hainaut. Tandis que sur l'ensemble des frontaliers wallons, ils ne sont pas plus que 4 996 les quasiment 5 000 que je vous citais tout à l'heure à travailler en France. En tant que ministre de l'emploi, il ne m'appartient pas de revenir sur l'attrait de la Wallonie pour les transfrontaliers Français, liés essentiellement aux dispositions fiscales applicables. Cet aspect des choses est du reste susceptible, à compétences et motivations égales, de faire pencher la balance de l'employeur vers un travailleur originaire de France, puisque l'employeur ne verse aucun précompte professionnel. Le travailleur, tout en s'y retrouvant par ailleurs, n'a pas le même salaire non plus. Cette situation est toutefois vouée à évoluer, compte tenu de la suppression du régime frontalier. C'est dès lors, me semble-t-il, Monsieur Crucke, davantage sur la communication relative à l'évolution de cet environnement fiscal ainsi qu'aux opportunités d'emploi que je m'attarderai dans le cadre de la question que vous m'avez posée dans sa seconde partie. Dès l'annonce de l'application de la nouvelle convention fiscale, le FOREM, qui fait partie du réseau EuresChannel, et qui participe aux actions de ce dernier en matière d'échange, d'actions d'emploi et de conseil en accompagnement sociojuridique, a tenu à intensifier sa collaboration pour l'emploi et ce, à trois niveaux. D'abord, par des séances d'information sur les opportunités d'emploi en France qui ont lieu régulièrement et qui sont le fruit d'une collaboration entre les services publics d'emplois au niveau franco-belge. Ensuite, le Forum de l'emploi d'EuroMétropole -Lille-Kortrijk- Tournai -se tiendra cette fois à Tournai, en septembre 2011. Comme à l'accoutumée, il rassemblera plus d'une centaine d'entreprises. Cellesci seront notamment informées des opportunités qui se dégageront en matière d'emploi quand la nouvelle convention prendra pleinement ses effets. Enfin, outre ces échanges plus structurés, les Carrefour Emploi Formation CEFO sont en train de s'outiller en vue de diffuser toutes les informations disponibles sur l'emploi en France, tout en développant un argumentaire précis pour amener nos travailleurs wallons à s'intéresser à ce type d'emploi. Cette information systématique sur le nouvel environnement fiscal et sur les opportunités d'emploi, que ce soit au sein du FOREM ou via une collaboration entre les SPE concernés, devra se traduire à terme par un accroissement de la mobilité au niveau transfrontalier. Voilà la stratégie volontariste et non pas fataliste, que nous menons pour décrocher un maximum d emplois en France pour nos amis wallons.
la Présidente. La parole est à M. Crucke.
Crucke (MR). Je remercie M. le Ministre pour les réponses données. Il conviendra de vérifier sur le terrain, mais je pense aussi que lorsque le FOREM travaille bien et en la matière, c est le cas -, il faut pouvoir le dire et le souligner. Je n ai aucune difficulté à pouvoir être témoin d un certain nombre de choses qui se font sur le terrain et qui permettent effectivement à la fois d aller chercher de l emploi en Wallonie. Il n y a pas que le transfert de travail qui doit se faire, il y a parfois aussi des entreprises qui voient très bien qu elles pourraient ou qu elles peuvent venir s installer en Wallonie et y trouver également des personnes ressources, mais qu elles ne trouvent pas toujours en Flandre. Je considère par contre que vis-à-vis de la France, tout le travail reste à faire, mais je partage l analyse qui était celle de dire que pour l instant sur un plan purement fiscal, l attractivité était quasiment pour le travailleur wallon.
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