Question orale de Jean-Luc CRUCKE au Ministre André ANTOINE, sur "Centre de formation du cyclisme francophone (CFCF) et activation du cyclisme"
M. Jean-Luc Crucke (MR). – Monsieur le ministre, j’ai écouté votre récente communication sur le Centre de formation du cyclisme francophone. Vous y précisiez que huit coureurs d’élite seront pris en résidence dans ce centre pour l’édition 2010 et ajoutiez que des contrats Rosetta seront mis à leur disposition afin de leur assurer une certaine sécurité financière. Sur le fond, il ne doit pas y avoir de grandes divergences entre nous, monsieur le ministre. D’ailleurs, M. Dodrimont, qui suit de très près ce que vous faites en matière de cyclisme, ne manquerait pas de signaler un quelconque dérapage.
J’aimerais savoir comment ces huit coureurs, certes de grande valeur, ont été sélectionnés. Un règlement définit-il la procédure de sélection ? Y a-t-il un jury ? Si oui, comment est-il composé ? Quels sont les critères pris en considération, non seulement pour ces huit sportifs mais aussi pour d’autres à l’avenir ? Le nombre de sportifs sélectionnés est-il limité ? Quel est le mode de communication? Le mécanisme est-il connu ? Comment ce centre est-il évalué ? Une analyse externe à la cellule et au centre est-elle réalisée ? Si oui, par qui ?
Par ailleurs, quelle est la composition du personnel de ce centre ? Quelles sont les rémunérations? Quel est le budget de fonctionnement et celui lié aux organisateurs ?
J’ai constaté la présence de partenaires privés et de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Quels sont leurs rôles respectifs ? Comment leurs missions sont-elles articulées ? Quelles sont les parts de travail des uns et des autres ? Quel est leur apport financier éventuel ? Le centre jouit-il d’un statut juridique particulier? Est-il chapeauté par un conseil d’administration? Si oui, par qui est-il présidé ?
Ce centre a-t-il une mission de contact ou une mission permettant de soutenir des initiatives de formation ou d’entraînement à vocation plus sous-régionale ? Dans ma région, au Pays des Collines, nous avons des initiatives de formation qui sont généralement bien menées. Le centre communique-t-il son savoir ? Un travail de contact et de coordination est-il réalisé ?
Enfin, lorsque vous parlez du Centre de formation du cyclisme francophone, vous ne pouvez pas vous empêcher de donner d’autres nouvelles dans la presse. Vous dites ainsi que vous rêvez d’imiter la Flandre, et vous prenez comme référence Top Sport Vlaanderen.
Vous évoquez également un possible subside pour toute une équipe cycliste. Est-ce là votre ambition ? Monsieur le ministre, vous qui allez habituellement au bout de votre pensée, comment envisagez-vous cette équipe ? Quel montage pourrait-il être envisagé ? Des contacts ou des partenariats sont-ils en discussion ? Je ne vous demande pas de nous dévoiler la composition de l’équipe aujourd’hui. Je me réjouis simplement de cette initiative car comme M. Dodrimont, je partage ce rêve avec vous. Si nous pouvons vous aider, nous n’hésiterons pas. Il serait toutefois intéressant, monsieur le ministre, de clarifier la situation pour tous les amateurs de cyclisme en Wallonie et en Communauté française.
M. André Antoine, vice-président et ministre du Budget, des Finances et des Sports. – Je connais l’intérêt de M.Crucke pour le sport, en général, et le cyclisme, en particulier, intérêt partagé avec M. Dodrimont qui ne peut qu’aimer le cyclisme. Non pas simplement parce que la course Liège-Bastogne-Liège passe par sa commune mais parce qu’elle a la grande chance d’avoir un citoyen d’honneur prêté momentanément à Monaco mais qui devrait sans doute revenir d’ici quelque temps à Aywaille ! Si nous voulons retrouver et garder des Philippe Gilbert, nous devons former dès maintenant de jeunes cyclistes. Nous en avons discuté avec M. Gilbert et avec d’autres champions cyclistes, aujourd’hui à la retraite, dont l’un, Eddy Merckx, organise pour l’instant le Tour du Quatar féminin, manifestation ô combien remarquable dans un pays où beaucoup de femmes portent la burqa. À l’heure actuelle, il ne nous reste plus que onze coureurs francophones belge sous contrat professionnel. Philippe Gilbert, notre étoile, est très connu. Je tiens à citer également Maxime Montfort, excellent coureur, Christophe Brandt, Sébastien Rosseler, Sébastien Delfosse, Benjamin Gourgue, Kevyn Ista, Olivier Kaisen, Frédéric Amorison, Romain Zingle et Gil Suray.
Parmi ces onze coureurs professionnels, trois sont passés par l’organisme de formation créé par mon prédécesseur Claude Eerdekens. Il s’agit de Benjamin Gourgue, de Romain Zingle et de Sébastien Delfosse qui probablement n’auraient jamais été présents dans un peloton professionnel sans ce centre de formation francophone malheureusement supprimé depuis. Cette structure a constitué un maillon indispensable entre le sport amateur et professionnel.
Un autre avantage de cette formule est que les clubs ne sont pas déstructurés. Les coureurs appartiennent toujours à leur club mais, le moment venu, comme pour les centres d’élite, nous les regroupons pour leur faire bénéficier du meilleur encadrement technique sportif, voire surtout de leur offrir des stages de la même nature que ceux d’une équipe professionnelle, assorti du même encadrement pour la musculation, la préparation, le matériel, etc. Bref, ils bénéficient des mêmes conditions que les professionnels. Le premier stage, durant lequel les coureurs pourront se préparer de manière optimale, aura prochainement lieu en Italie. C’est leur offrir la possibilité d’améliorer leurs performances sans quoi ces jeunes cyclistes parcourraient encore les routes de Wallonie derrière une voiture sans bénéficier d’un bon encadrement. L’initiative a été lancée par la Fédération cycliste Wallonie-Bruxelles, dont c’est le rôle, et TRW organisation. Cet opérateur a désormais pignon sur rue, il est devenu le premier organisateur francophone belge de courses cyclistes, avec le Grand prix de Wallonie, le Tour de Wallonie et le Cyclocross d’Ottignies.
En outre, cet organisateur est le partenaire accrédité du groupe Amaury pour le passage du Tour de France en Wallonie. Christian Preudhomme, que j’ai rencontré, ne tarit pas d’éloges à son sujet et vante son professionnalisme. C’est donc la synergie entre la fédération et TRW qui nous a permis de créer ce centre de formation.
Un troisième élément est l’emploi. Nous mobilisons par exemple pour l’instant des emplois « Rosetta », mais cela pourrait être autre chose demain. Le nombre de personnes impliquées dans ce projet n’est pas fixe. Il dépendra des résultats obtenus. Si, en 2011, nous avons la chance de ne pas avoir huit jeunes coureurs, mais dix ou douze, nous ferons un effort supplémentaire.
Les huit coureurs retenus sont Polazzi, Cammaerts, Degand, Van Genechten, Van Melsen,
Rouet, Bille et Stenuit. Ils ont été sélectionnés sur proposition de la fédération qui tient compte de leur classement dans les épreuves destinées aux élites, de leur marge de progression, de leur volonté et de leur engagement, ainsi que d’éventuelles blessures qui les auraient écartés du peloton. Ces jeunes sont encadrés par trois excellents préparateurs, John Lelangue, Gerard Bulens et Rik Verbrugghe, ainsi que par une équipe de kinésithérapeutes et de mécaniciens de haut niveau. Ces cyclistes sont donc encadrés comme des professionnels. Ils seront évalués tout au long de l’année. Il sera tenu compte de leur comportement en course, de leur engagement dans les stages, de leur conduite en sélections nationale et francophone, de leurs classements, etc. La durée de leur contrat est d’un an. Si l’un d’eux devait faire montre de négligence, de désinvolture ou de désintérêt, son contrat ne serait pas reconduit. La convention qui nous lie leur permet d’être soulagés de tout problème matériel et financier, comme le sont d’autres sportifs, comme Bertrand Baguette ou Jérôme Nzolo. L’opération résulte d’un partenariat entre public, semi-public et privé. En effet, outre la Communauté française, qui intervient à hauteur de vingt mille euros, plus de quarante mille euros sont apportés par le Lotto et par la firme Coca-Cola. C’est une belle opération, car nos vingt mille euros ont un effet de levier. J’ai eu l’occasion d’en discuter avec les coureurs,
avec la Fédération et avec l’ancien gouverneur de la Province de Liège à qui je rends un hommage vibrant. M. Bolland a oeuvré énormément et continue à le faire, en faveur du cyclisme dans notre Région et dans notre Communauté. Mon rêve serait de monter une équipe cycliste professionnelle de première ou de seconde année. Pour les coureurs, cela constituerait un tremplin vers un niveau professionnel et leur offrirait l’opportunité de décrocher ensuite un contrat. Ils auront ainsi la possibilité de s’affirmer. J’aimerais donner un coup de pouce supplémentaire
à une équipe prometteuse de Libramont. Le budget d’une équipe cycliste est relativement important. Il ne s’agit pas de l’obtenir au détriment des autres disciplines ou fédérations sportives par des glissements budgétaires mais en développant des partenariats privés-publics. Le secteur public prendrait en charge les emplois, et le privé, l’infrastructure, l’équipement et l’encadrement.
Des contacts ont été établis notamment avec l’organisme financier de Topsport Vlanderen qui, sensible à mon rêve et gêné d’octroyer des fonds seulement aux Flamands, m’a proposé de faire le même effort financier pour les francophones. Cela ne suffira pas et nous devrons trouver d’autres partenaires. Le Lotto intervient de manière très significative en faveur des cyclistes flamands et il n’est pas exclu qu’on obtienne là aussi un complément. Comme vous le voyez, le dossier se construit. Même si je pouvais réunir les fonds publics et privés, nous n’avons pas les capacités de monter une équipe cycliste. Nous n’avons pas le nombre suffisant de coureurs. Nous venons d’en citer huit mais il en faut beaucoup plus pour former une équipe. Celle-ci ne verra peut-être le jour que dans deux ou trois ans en fonction d nombre de jeunes dont les performances s’amélioreront.
Je vous rassure, je ne me transformerai pas en directeur sportif et ne participerai pas au Tour de France. Tout au plus je souhaite, en collaboration avec l’administration des sports, faciliter la constitution d’une équipe pour autant que nous ayons des coureurs de valeur qui n’aient pas de contrat dans une équipe professionnelle. Je ne veux pas leur faire concurrence. Cela dit, il y
a peu de chance que nous leur fassions quelque concurrence car nous pourrons offrir un salaire équivalent. Pour un coureur, être présent dans les épreuves professionnelles une première année peut constituer un tremplin intéressant pour sa carrière. À l’instar de la Flandre, nous pourrions renouer avec cette tradition et j’estime le moment bien choisi parce que nous avons Philippe Gilbert. L’engouement pour les vedettes des sports d’élite entraîne la création de nouveaux clubs.
C’est le cas pour l’instant des clubs cyclistes, ce n’était plus arrivé depuis longtemps. Je le vois aux demandes de subventions Je pense que nous devrions être présent également dans le cyclo-cross. Ce n’est pas qu’un sport tchèque et flamand. Ce pourrait être aussi un sport wallon. Je voudrais aussi ajouter que le cyclisme est un des rares sports gratuits pour les spectateurs, ce qui le rend populaire. Cependant, la pratique de ce sport ne s’est pas démocratisée ; elle est coûteuse. Il y a vingt ans on pouvait acheter un vélo de course dans une grande surface. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. Le matériel est fort coûteux et nombre de jeunes ne peuvent l’acquérir. Certains sont obligés d’organiser des soupers pour se payer le matériel
de base. Certains vélos de marque coûtent une petite fortune et les pouvoirs publics devraient modestement jouer un rôle d’accompagnateur.
M. Jean-Luc Crucke (MR). – Je voudrais remercier le ministre pour ses explications. J’apprécie ses initiatives et constate avec plaisir que nous avons onze coureurs professionnels dans les pelotons. J’espère que ce n’est qu’un début.
Le Centre de formation me semble une bonne initiative pour atteindre l’excellence J’ai bien compris que c’est la Fédération qui sélectionne les sportifs selon ses critères. Pour ma part, je suis très favorables aux initiatives public-privé, dans le sport également. Les budgets pour le sport ont souvent été délaissés en Communauté française et le privé peut trouver un avantage à participer à son financement. Je regrette de ne pas avoir reçu de réponse sur l’évaluation de la structure et il pourrait être intéressant de faire appel à une personne externe car on ne peut être juge et partie. Cette personne pourrait émettre des recommandations et de conseils sans grever le budget.
M. André Antoine, vice-président et ministre du Budget, des Finances et des Sports. – Le problème, c’est leur « explosivité » qui n’est pas exploitée. Les stages permettront d’y apporter une solution.
Dans ma région, une structure de cyclistes locaux a mis sur pied une formation pour des jeunes cyclistes de 14 à 16 ans. Cette formation réunit une vingtaine de jeunes pendant un long weekend. Les parents sont systématiquement informés du déroulement du séjour. Ne faut-il pas donner au centre une mission qui tienne compte de ces initiatives locales ? J’adhère à l’idée d’une équipe professionnelle en première et en deuxième année. L’équipe pourrait comporter des coureurs professionnels étrangers qui assumeraient un rôle de formateur des jeunes coureurs. Nous vous soutiendrons pleinement dans ce projet.
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